Les Syriens se mobilisent pour commémorer le 30e anniversaire du massacre de Hama. Dans le même temps, au Conseil de sécurité de l'ONU, les discussions se poursuivent pour finaliser la mouture édulcorée du projet de résolution contre Damas.
Le Conseil de sécurité de l'ONU poursuit, ce vendredi, les discussions pour tenter de mettre au point une nouvelle trame au projet de résolution contre le régime syrien que ses membres veulent mettre au vote dans les jours qui viennent. En attendant, en Syrie, la mobilisation ne faiblit pas contre le régime de Bachar al-Assad et la répression qui a causé la mort de 6 000 personnes depuis le mois de mars dernier se poursuit. Les militants anti-régime appellent à manifester à Hama pour commémorer le 30e anniversaire du massacre qui s'était déroulé en ville, en février 1982, pour mettre un terme à une tentative d'insurrection des Frères musulmans. Le point sur la situation.
- Le nouveau projet de résolution du Conseil de sécurité finalisé ?

Si, dans les couloirs des Nations unies, certains estiment qu’une nouvelle version du projet de résolution pourrait être proposée dans les heures qui viennent au Conseil de sécurité, d’autres se veulent plus prudents, à l’instar de la France qui envisage un vote lundi au plus tard.
"Beaucoup de concessions ont été faites des deux côtés cette semaine, rapporte Emmanuel Saint-Martin, le correspondant de FRANCE 24 à New York. Et surtout en faveur de la Russie, principal allié de Damas, rapportent certains observateurs." Moscou, qui s'oppose à ce que l'on mentionne explicitement le fait que le leader syrien doive quitter le pouvoir, a eu gain de cause.
La dernière version du texte mise sur la table jeudi matin "soutient pleinement (...) la décision de la Ligue arabe du 22 janvier 2012 de faciliter une transition politique", mais les détails de cette transition - notamment le transfert des pouvoirs du président Assad à son vice-président - n'apparaissent plus.
Autres concessions faites à Moscou : aucune référence n'est faite aux sanctions économiques imposées par la Ligue à la Syrie en novembre dernier, ni aucune inquiétude exprimée sur les ventes d'armes à Damas, que la Russie souhaite poursuivre. Enfin le texte précise que le Conseil veut "résoudre la crise politique actuelle en Syrie de manière pacifique", afin de dissiper toute analogie avec le dossier libyen.
Comme les textes précédents, la dernière mouture "dénonce les violations continues, flagrantes et étendues des droits de l'Homme" par les autorités syriennes et demande à ce "que le gouvernement syrien mette immédiatement fin" à ces violations et à "ces attaques contre ceux qui exercent leur droit à la liberté d'expression".
La Russie, qui bloque depuis des mois le vote d'une résolution, se braque encore sur un point, ou plutôt sur deux mots qui figurent dans le projet : "Fully support" ("Soutien totalement"). Moscou s'oppose en effet au fait qu'il soit mentionné dans le document le fait que le Conseil "soutien[ne] totalement" le plan arabe de sortie de crise prévoyant la mise à l'écart du président syrien Bachar al-Assad. Pour les Russes, l'ONU n'a pas à exiger un "changement de régime" en Syrie. "C’est un point très sensible pour les diplomates russes qui y voient un risque d’ingérence", commente Emmanuel Saint-Martin.
Les tractations entre les ambassadeurs des 15 pays membres du Conseil de sécurité devraient donc se poursuivre toute la journée, avant que le texte ne soit transmis aux différentes capitales concernées pour avis. Si les discussions achoppent de nouveau, la question pourrait être abordée directement ce week-end par la secrétaire d'État américaine, Hillary Clinton, et le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, qui doivent se rencontrer à l'occasion d'une conférence annuelle sur la sécurité à Munich.
En octobre, la Russie et la Chine ont opposé leur veto à un projet de résolution préparé par les Occidentaux qui aurait condamné le gouvernement d'Assad et menacé Damas de possibles sanctions.
- Manifestations à Hama
Les militants anti-régime ont appelé les Syriens à continuer à manifester "par millions" ce vendredi pour commémorer le 30e anniversaire du massacre commis à Hama par le régime, en février 1982. Sous le slogan "Hama, pardonne-nous", ils entendent honorer les dizaines de milliers de morts - entre 10 000 et 40 000 - fauchés par la répression d’un soulèvement des Frères musulmans contre le président d'alors, Hafez al-Assad, le père de l'actuel président.
"Habillons-nous en noir", peut-on lire sur la page Facebook "The Syrian Revolution 2011", l'un des principaux animateurs de la révolte contre Bachar al-Assad depuis le 15 mars 2011.
Vendredi dernier, lors des manifestations anti-régime, une cinquantaine de personnes ont été tuées à travers tout le pays, selon les militants hostiles au pouvoir.
- Des enfants torturés, selon un rapport de Human Rights Watch
La répression du régime syrien n’épargne pas les enfants, selon l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch (HRW). "Les services de sécurité ont tué et torturé des enfants dans leur maison", rapporte à l’AFP Lois Whitman, directeur du département droits des enfants à HRW.
"Des enfants ayant à peine 13 ans ont rapporté à l’ONG que des officiers les avaient placés en confinement solitaire, brutalement battus et électrocutés, avaient brûlé leur peau avec des cigarettes, et les avaient suspendus avec des menottes métalliques, parfois pendant des heures, à quelques centimètres du sol", indique le rapport. Au moins 12 cas ont été recensés.
HRW accuse le gouvernement syrien d'avoir "transformé des écoles en lieux de détention et en bases militaires et d'avoir posté des francs-tireurs sur ces bâtiments où des enfants ont également été arrêtés", poursuit HRW.
"Le gouvernement syrien doit cesser de déployer les forces de sécurité dans les écoles et les hôpitaux", souligne l'organisation, qui appelle le Conseil de sécurité de l’ONU à intervenir pour mettre fin à ces tortures.