La secte islamiste Boko Haram a revendiqué les attentats qui ont ensanglanté la communauté chrétienne du Nigeria ce week-end. Qui sont ces militants dont l'objectif est d'imposer la loi islamique à l’ensemble du pays le plus peuplé d’Afrique ?
La fête chrétienne de Noël a de nouveau été endeuillée au Nigeria. Une série d’attentats, fomentés par le groupuscule extrémiste Boko Haram, a visé des églises remplies de fidèles ce week-end : Il y a eu plus de 40 morts dans le centre et le nord du pays. Un scénario qui rappelle celui de Noël 2010, lorsque ce même groupe avait mené des attentats ayant tué plus de 80 personnes.
Fondée en 2002 à Maiduguri, dans l’État de Borno (nord-est du pays) par le prédicateur Mohammed Yusuf (1970-2009), la secte islamiste s’est fixée pour objectif de combattre le pouvoir en place jusqu’à l’instauration de la loi islamique, la charia, à l’ensemble du Nigeria. Ce vaste pays d’Afrique occidentale compte près de 160 millions d’habitants, dont une moitié de musulmans vivant principalement dans le Nord, et une moitié de chrétiens, majoritaires dans le Sud.
Une diversité religieuse que voudrait voir disparaître Boko Haram. "Le groupe vise à effrayer les chrétiens, à les convertir ou à les faire partir du Nigeria" explique Pierre Cherruau, directeur de la rédaction de Slate Afrique. Interrogé par FRANCE 24, il assure que "Boko Haram cherche également à faire peur à un certain nombre de musulmans modérés, car la grande majorité des musulmans ne partage pas sa vision de l’islam". Le groupe prône en effet un islam obscurantiste et considère ceux qui ne suivent pas son idéologie comme des infidèles, qu’ils soient chrétiens ou musulmans.
Révolte sanglante en 2009
Longtemps en sommeil, la secte signe son premier coup d’éclat en juillet 2009, lorsqu’elle mène une révolte dans plusieurs États du nord du pays. Un mouvement insurrectionnel réprimé par les forces de sécurité nigérianes. Mohammed Yusuf, le fondateur et leader spirituel de la secte, sera capturé puis tué en marge des combats. Huit cents personnes périront de chaque côté.
Le groupe se réorganise ensuite autour d’Abubakar Shekau, un ancien lieutenant autoproclamé chef du groupe dans une vidéo mise en ligne en juillet 2010. Longtemps cantonné aux États du nord-est du pays, Boko Haram, qui signifie "l’éducation occidentale est un péché" en langue haoussa, parvient à étendre sa zone d’action en frappant Abuja, la capitale du pays. En juin 2011, elle y mène un attentat-suicide contre le quartier général de la police, puis en août, un kamikaze parvient à s’introduire et faire exploser le siège des Nations unies.
Du fait de sa nouvelle notoriété, Boko Haram commence à se lier à des groupes terroristes du continent africain. Certains de ses combattants seraient ainsi passés par des camps d’entraînement des Shebab de Somalie, tandis que la secte aurait également noué des liens avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
"Boko Haram et Aqmi ont à peu près les même finalités et les mêmes pratiques, comme les attaques d’églises", souligne Philippe Hugon, directeur de recherche à l'IRIS, en charge de l'Afrique.
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"Les liens entre ces deux organisations étaient très faibles au départ, mais depuis deux ans environ on peut penser qu’il y a davantage de ramifications, notamment sur le plan logistique" indique le chercheur.
Dans le sillage de son prédécesseur maghrebin, Boro Haram mène sa guerre sainte, depuis près de dix ans, à coups d’attentat spectaculaires et symboliques. "Il y a une véritable volonté d’avoir une emprise sur le pays par la peur", analyse Pierre Cherruau.