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Le "Cher Leader" nord-coréen a succombé à une crise cardiaque samedi 17 décembre. Âgé de 69 ans, il dirigeait la Corée du Nord d'une main de fer depuis 1994, année où il prit la relève de son père Kim Il-sung. Portrait.

Le "Soleil du XXIe siècle" s’est définitivement couché. Kim Jong-il, qui dirige la République populaire démocratique de Corée (RPDC) d'une main de fer depuis 1994, n’est plus. Il est décédé samedi 17 décembre à 8 h 30 locales d'un"infarctus du myocarde sévère compliqué d’une crise cardiaque", alors qu'il voyageait dans son train blindé, selon KCNA, l’agence officielle nord-coréenne. Ses funérailles nationales, qui s’annoncent fastueuses, ont été fixées au 28 décembre à Pyongyang, tandis que les autorités ont décrété un deuil national jusqu'au 29 décembre.

Une santé fragile
"Le Cher Leader", qui souffrait de diabète, de problèmes cardiaques et d'une tension élevée, était âgé de 69 ans, selon sa biographie officielle, la même qui affirme qu'"une étoile et un double arc-en-ciel" sont apparus dans le ciel le jour de sa naissance, le 16 février 1942.
A plusieurs reprises ces derniers mois, les médias nord-coréens avaient démenti les rumeurs sur son état de santé, qui s'était dégradée après un accident cérébral en 2008. Diminué, l’absence de Kim Jong-il fut notamment remarquée lors de la commémoration du 60e anniversaire de la fondation de la République démocratique de Corée, en septembre 2008. Cependant, il s'est rendu cette année en Chine à deux reprises et a effectué sa première visite en Russie depuis près de dix ans.
Cette disparition intervient alors que de nombreuses célébrations sont prévues en 2012 à l’occasion du centième anniversaire de la naissance de Kim Il-sung, père et fondateur en 1948 de cette dictature communiste teintée d'idéologie autarcique auquel Kim Jong-il avait succédé. Une succession familiale qui a conféré au pays l'appellation de "première dynastie communiste" du monde, où un culte de la personnalité poussé à l’extrême, les exécutions et les détentions arbitraires dans des camps de travail sont de rigueur. L'agence officielle KCNA a d'ores et déjà appelé les Nord-Coréens à faire allégeance au plus jeune fils de Kim Jong-il, Kim Jong-un, âgé de moins de 30 ans, imposé par son père en personne.
Un tyran à la fibre artistique
Durant les dix-sept années de règne du tyran à la fibre artistique - il est l'auteur de plusieurs opéras et producteur de cinéma autoproclamé -, la Corée du Nord a sombré dans la crise économique et a été frappé de graves pénuries alimentaires à répétition. Les Nations unies ont récemment estimé que six millions de personnes (sur une population totale de 22 millions) ont besoin d'aide alimentaire dans le pays, où la famine a fait des centaines de milliers de morts dans les années 1990.
Kim Jong-il est réputé être un bon vivant amateur de femmes, de homards et de cognac. "Avant son arrivée au pouvoir en 1994, il pouvait organiser des fêtes qui s’étalaient parfois sur quatre jours", confiait récemment à France 24 son cuisinier personnel, réfugié au Japon depuis 2001. Entré en politique dès l’âge de 22 ans, il a gravi les échelons de la nomenklatura du Parti des travailleurs au pouvoir. Détenteur d’un simple diplôme en pensée marxiste de l'université qui porte le nom de son père, il étend progressivement son influence dans le parti et, en 1980, il intègre le Politburo et la commission militaire. Les services de renseignement américains et sud-coréens l'accuseront d'avoir ordonné un attentat à Rangoon en 1983, qui fera 17 morts parmi les membres du gouvernement de Séoul, et, quatre ans plus tard, contre un appareil de Korea Airlines (117 morts).
Désigné successeur de son père dès 1974 "conformément à la volonté unanime du Parti", il accède au pouvoir en 1994 en devenant président de la Commission de défense nationale, le véritable cœur du pouvoir du pays, avec le grade de commandant suprême de l'Armée populaire de Corée.
Tensions diplomatiques et militaires
Son règne est marqué par des tensions avec ses ennemis de toujours - la Corée du Sud, le Japon et les Etats-Unis - autour du programme d’armement nucléaire que développe alors Pyongyang. Même si, du côté diplomatique, il n'a jamais cessé de souffler le chaud et le froid sur le dossier de la relance du dialogue entre les deux Corées.
Considéré en Occident comme un dirigeant paranoïaque, imprévisible et dangereux, il y est tourné en ridicule notamment à cause de ses cheveux bouffants, sa petite taille, son costume invariablement gris-vert et ses chaussures à semelles compensées.
Peu bavard en public, le "Cher Leader" aurait confié à un homme d’affaires sud-coréen que dans un de ses cauchemars récurrents, il était lapidé "d'abord par les Américains, puis par les Sud-Coréens et ensuite par les Nord-Coréens". Mais il aurait surtout confié être "tout à fait conscient" de ne pas être aimé de la plupart de ses concitoyens...