Alors qu’il n’a pas encore annoncé sa candidature à la présidentielle, Nicolas Sarkozy est accusé de profiter des privilèges de son statut de président pour faire campagne. Le PS crée un observatoire pour ausculter les dépenses du chef de l’État.
Nicolas Sarkozy aurait-il déjà revêtu ses habits de candidat à la présidentielle ? Le Parti socialiste veut placer le président français sous surveillance, l’accusant de mener une campagne électorale déguisée. Un "observatoire des déplacements du président" doit être créé à partir du 19 décembre pour ausculter les dépenses du chef de l’Etat et décider si certaines d’entre elles n’ont pas lieu d’être inscrites au compte d’une campagne présidentielle. Bien qu’il ne soit pas officiellement candidat, les observateurs estiment que peu de doutes subsistent sur le fait que Nicolas Sarkozy briguera un nouveau mandat en avril 2012.
En vue de la campagne de 2012, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) a publié un "mémento à l’usage du candidat et de son mandataire".
La CNCCFP contrôle les recettes et les dépenses engagées pour la présidentielle et fixe le montant des remboursements. Elle doit ensuite approuver les comptes de campagne ou saisir le juge de l'élection en cas de rejet.
En compagnie de Régis Juanico, trésorier du PS, de Daniel Vaillant, mandataire de campagne de François Hollande, ainsi que d’une équipe d’experts, le président de la commission de contrôle financier du PS, Pascal Terrasse, sera chargé de surveiller le coût des déplacements du président et de saisir, le cas échéant, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP).
"Il n’est plus dans son rôle de président de tous les Français"
Contacté par France 24, Pascal Terrasse assure vouloir aider la CNCCFP à examiner les comptes d’un président coupable d’"un mélange des genres condamnable moralement et même devant la loi". Car pour lui, la candidature de l’actuel président est un "secret de polichinelle" toujours savamment entretenu par l’Elysée. "Il n’a pas intérêt à se déclarer trop tôt car il ne pourrait alors plus se servir de l’appareil de l’Etat pour faire campagne, voilà pourquoi il traîne", s’insurge le député de l’Ardèche.
A l’origine de l’idée de cette "task force", Pascal Terrasse assure vouloir "alerter l’opinion publique sur le fait que Nicolas Sarkozy se sert de l’argent des contribuables pour préparer sa candidature à l’élection présidentielle". Il pointe notamment certains des récents déplacements du "président-candidat". "Quand Nicolas Sarkozy s’est rendu sur le site nucléaire du Tricastin pour parler énergie, il a fait venir des militants UMP et il a dénoncé l’accord entre les Verts et le PS. Comment peut-on dire alors qu’il n’est pas en campagne ? Il n’est plus dans son rôle de président de tous les Français", estime-t-il.
Ces mises en cause ont retenu l’attention de la CNCCFP qui a indiqué, jeudi 15 décembre, qu'une partie des dépenses liées aux déplacements de Nicolas Sarkozy pourrait être intégrée à ses comptes de campagne si celui-ci était "amené à exposer les éléments d'un programme de futur candidat".
Sujet sensible
De son côté, l’UMP rétorque que c’est plutôt sur la primaire socialiste que devrait se pencher que le CNCCFP. Le secrétaire général national du parti majoritaire en charge de la communication, le député Franck Riester, a saisi la Commission la semaine dernière pour déterminer si "dans le cadre de cette primaire, les dépenses engagées par les chaînes de télévision et de radio doivent ou non être intégrées dans le compte de campagne du candidat socialiste". Des accusations rejetées par Pascal Terrasse, qui assure que son parti est "transparent" dans ce domaine. "On a déjà indiqué qu’une partie des dépenses liées à la primaire allait être intégrée aux comptes de campagne", se défend-il.
Le sujet des comptes de campagne est particulièrement sensible alors que pèsent des soupçons sur le financement de la campagne électorale d’Edouard Balladur en 1995. "On a voulu monter cet observatoire car dans ce domaine mieux vaut prévenir que guérir", glisse Pascal Terrasse, selon qui "les anciens candidats bénéficient, une fois élus, d’une certaine impunité".