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Arnaud Montebourg, le monsieur propre du Parti socialiste

À moins de cinq mois de l’élection présidentielle, "le troisième homme" de la primaire socialiste multiplie les accusations de fraude et de corruption contre différentes fédérations socialistes. Une démarche qui sème le trouble au sein du parti.

Arnaud Montebourg joue les incorruptibles. Fort de son score de 17% lors de la primaire socialiste, "le troisième homme" de la consultation d'octobre dernier s’attache sans relâche à assainir son parti. Dernière cible en date : la fédération du Pas-de-Calais qu’il accuse de corruption.

Le député de Saône-et-Loire s'en est pris principalement au député-maire de Liévin, Jean-Pierre Kucheida, qu’il juge être au centre d'un système de financement occulte au sein de la branche départementale du parti. Il a également visé un autre député socialiste, Albert Facon, que le parti doit, selon Montebourg, empêcher de concourir dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais face à Marine Le Pen. Enfin, Montebourg s'est attaqué au député du Pas-de-Calais en demandant que soit dénoncé un "système de corruption (...) dont la présence de Jack Lang dans ce département n'est qu'un des tristes symptômes".

Suite à ces accusations, la direction du parti socialiste a demandé la création d'une commission d'enquête interne pour faire la lumière sur celles-ci.

Faute encore de résultats, le parti est sous tension. Plusieurs députés ont critiqué Montebourg comme le député-maire PS de Lens (nord de la France), Guy Delcourt, qui le qualifie de "procureur aux côtés de Marine Le Pen". Jack Lang parle quant à lui d'"attaques ignominieuses" et prévoit d'engager des poursuites judiciaires contre lui.

"Faire son travail"

Contacté par France24.com, Arnaud Montebourg n’a pas souhaité commenter les derniers rebondissements de l’affaire du Pas-de-Calais mais l'un de ses porte-parole, François Toros, affirme que "Montebourg, qui n’est autre que le secrétaire national du parti en charge de la rénovation, a fait son travail en temps et en heure". Et d’ajouter : "Il s’est attaqué à ce genre de pratiques bien avant la campagne pour la présidentielle".

En décembre 2010 en effet, le Bourguignon avait recommandé dans un rapport confidentiel remis à Martine Aubry – révélé par la presse en mars 2011-, la "destitution" des dirigeants de la fédération des Bouches-du-Rhône, dont il accusait le président du Conseil général, Jean-Noël Guérini, de "clientélisme féodal".

"En phase avec Hollande"

Avocat de formation, Arnaud Montebourg s’est lancé dans la politique en s’attaquant aux fraudes et à la corruption. "Cela fait partie de son histoire et son tempérament", rappelle Jérôme Fourquet, directeur adjoint du département opinion de l'Ifop. En 1997, le député de Saône-et-Loire fraîchement élu anime la mission parlementaire d'information sur le blanchiment des capitaux en Europe. En 2001, celui qui s’oppose à l’immunité du Président de la république propose de renvoyer Jacques Chirac -alors chef de l'État- devant la Haute Cour de Justice, commission qui ne verra finalement jamais le jour. Cette même année, il s’attache aussi à promouvoir une VIe République, basée sur une démocratie plus saine et plus moderne. "Fini le temps des éléphants révolus et place aux jeunes lions !", avait-il déclaré en 2007, après sa réélection aux législatives.

Selon Jérôme Fourquet, la démarche de Montebourg vise Martine Aubry, la secrétaire nationale du parti. "C’est à elle qu’il demande des comptes. Surtout que le Pas-de-Calais se trouve à deux pas du fief de Martine Aubry, maire de Lille". Et d’ajouter : "Arnaud Montebourg lui en veut de ne pas avoir répondu à sa lettre ouverte envoyée durant l’entre-deux tours de la primaire socialiste concernant la rénovation des pratiques du parti".

"Procureur"

Le Bourguignon ne cherche donc en rien à être nuisible à l'ensemble de son parti en vue de la présidentielle d'après François Toros. "Il est d’ailleurs en phase avec François Hollande", souligne-t-il. Preuve en serait le déplacement cette semaine du candidat socialiste à ses côtés dans son propre fief en Saône-et-Loire.

Toutefois, l’entente ne semble pas si parfaite entre le vainqueur de la primaire socialiste et le "troisième homme" de ces élections. Selon Fourquet, Arnaud Montebourg est conscient que les orientations de François Hollande sur les sujets de fond, tels que la dette, l’industrialisation et la démondialisation, s’éloignent de ses positions.

"Il choisit d’incarner le rôle du procureur, ce qui a une certaine cohérence avec ses idées sur une VIe République", estime Fourquet. Une manière aussi de se placer en vue d'une éventuelle victoire socialiste à la présidentielle.