La candidate écologiste à la présidentielle française a surpris la classe politique en refusant, sur RTL, de se prononcer sur ses consignes de vote au second tour de l'élection. Son porte-parole a démissionné dans la foulée.
AFP - Enflammé par le feu nucléaire, le torchon a brûlé mercredi entre Eva Joly et les socialistes, qui ont enjoint à EELV de trancher cette querelle, la candidate écologiste à l'Elysée s'efforçant dans la foulée de calmer le jeu.
Après s'être obstinément refusée, le matin sur RTL, à dire qu'elle appellerait à voter Hollande au second tour, Mme Joly a précisé un peu plus tard qu'évidemment oui, elle le ferait, il n'y a "jamais eu aucun doute" là-dessus dans son esprit.
Mais en critiquant avec virulence le PS la veille, elle s'est mise à dos une partie de son parti.
Son porte-parole Yannick Jadot a démissionné, décontenancé par la distance qu'elle creuse, selon lui, avec les socialistes, malgré l'accord de mandature qui lie les deux formations depuis le 15 novembre.
Elle fait "les mauvais choix politiques", a renchéri Daniel Cohn-Bendit, figure tutélaire du mouvement écolo. "Eva Joly ne doit pas faire du Mélenchon, du sous-Mélenchon ou du super-Mélenchon", a-t-il insisté, allusion aux formules assassines ("capitaine de pédalo") dont se régale le candidat Front de gauche.
L'eurodéputée a cependant reçu le soutien de Dominique Voynet (EELV), qui l'a précédée en 2007 dans la fournaise élyséenne ("campagne cauchemardesque", s'est-elle souvenue). Il faut jouer collectif autour d'Eva, a-t-elle plaidé.
Un mot d'ordre répété par plusieurs responsables du parti écologiste à l'issue d'un Bureau exécutif extraordinaire qui s'est tenu par téléphone dans l'après-midi
Lors de cette réunion, la direction, les parlementaires, secrétaires régionaux et des membres du Conseil fédéral d'EELV (une quarantaine d'écologistes au total) ont "clairement réaffirmé à Eva Joly que le mouvement était derrière elle", a expliqué à l'AFP le porte-parole du parti Pascal Durand, selon qui la candidate était "soulagée" mercredi soir.
Eva Joly, qui n'a pas rectifié les qualificatifs acerbes ("archaïques", du "bois dont on fait les marionnettes") dont elle avait gratifié les socialistes, sortait mardi d'un silence médiatique de cinq jours, observé pour signifier qu'elle n'était pas partie prenante à l'accord PS-EELV dont sont absentes des mesures à ses yeux vitales: sortie du nucléaire, arrêt du chantier EPR.
Autant d'épisodes qui ont fait gronder à Solférino. De hauts responsables socialistes ont donc mis en demeure Cécile Duflot de faire un choix net.
Mme Joly "est-elle devenue une candidate indépendante, qui vit sa vie toute seule, ou est-ce qu'elle est la candidate des Verts ?", a demandé Jean-Marc Ayrault, conseiller spécial de François Hollande, exigeant que le numéro un d'Europe-Ecologie Les Verts réponde avec clarté.
Il a rappelé au passage que l'accord comprend un volet électoral devant permettre la création d'un groupe EELV à l'Assemblée nationale.
Demande de clarification reprise par Martine Aubry, qui, comme première secrétaire, avait bâti, avec son amie Duflot, l'accord du 15 novembre. Elle a jugé les propos d'Eva Joly "absolument incompréhensibles".
Après la mise au point de l'ex-juge d'instruction, les choses ont semblé s'apaiser. M. Hollande a dit ne retenir que la dernière phrase, Mme Aubry en a pris acte, tout en appelant à être "à la hauteur de l'espoir" que fait naître la gauche.
L'approche des Verts français est "à mes yeux gauchiste et trotskiste", a commenté Jean-François Copé, secrétaire général de l'UMP, parti qui lance lundi, à coup de millions de tracts, une campagne contre le volet nucléaire de l'accord PS-EELV (fermeture de 24 réacteurs).
Dans la tourmente, Eva Joly a reçu un autre soutien: celui d'Alain Lipietz, le Vert qui avait dû abandonner sa place de candidat écologiste à l'Elysée en 2001. Il la juge "en grand danger". Mais il l'encourage: "Tiens bon, Eva".