La commission bipartisane américaine chargée de dégager 1 200 milliards de dollars d'économies sur dix ans pour réduire le déficit américain a échoué. Un revers qui ouvre la voie à des coupes budgétaires automatiques potentiellement dangereuses.
Le "super-comité" a échoué. Réunis depuis le relèvement du seuil de la dette américaine en août, une commission composée de démocrates et de républicains a reconnu lundi ne pas avoir réussi à dresser ensemble un plan d'économies de 1 200 milliards de dollars sur dix ans. Une telle réduction des déficits avait pourtant été jugée nécessaire aussi bien par le président Barack Obama que par les républicains. Une mesure censée faire passer la pilule budgétaire de l'augmentation du plafond de la dette, celle-ci ayant explosé, dépassant en novembre 15 000 milliards de dollars.
Peu après le constat d’échec de la commission, le président des États-Unis a rejeté la faute sur les républicains, accusés de refuser toute augmentation d’impôt. Ces derniers jugeaient, de leur côté, que le locataire de la Maison Blanche était le grand responsable de ce fiasco car il n’était pas prêt à faire les sacrifices nécessaires, tels que réduire les allocations chômage. Mais derrière la querelle politicienne, cette impasse budgétaire risque surtout d’avoir des conséquences économiques très concrètes.
L’absence éventuelle d’un accord entre les membres du "super-comité" avait, en effet, été anticipée dès le mois d'août. Dans ce cas de figure, un mécanisme de coupes budgétaires automatique devait entrer en action en 2013. Ce dispositif prévoit de ventiler à égalité les coupes entre le budget de la défense et les dépenses sociales comme, par exemple, une réduction annuelle de 2 % du budget de Medicaid (la couverture santé pour les plus démunis) jusqu'en 2021.
L’impact sur la croissance
“Le plus regrettable est que ces réductions de dépenses seront brutales, sans aucune forme de considération pour des situations particulières”, regrette Christine Rifflart, spécialiste de l'économie américaine à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Néanmoins, certains programmes tels que la Sécurité sociale, les coupons alimentaires ou les pensions versées aux vétérans de guerre seront épargnés.
Ces réductions de dépenses, en grande partie aveugles, risquent également de compromettre le potentiel de croissance des États-Unis. Le mécanisme prévu ne fait, en effet, pas de distinction entre les programmes susceptibles de soutenir l’activité économique, tels que les subventions aux associations qui créent des emplois, et les autres. “Les États-Unis vont avoir du mal à retrouver à moyen terme une croissance de plus de 3 %”, confirme Christine Rifflart.
Un retour à une forte croissance s'annonce d'autant plus délicat que Barack Obama avait promis de ne pas s’arrêter aux 1 200 milliards de dollars d’économies. D’autres mesures d’austérité sont encore à envisager. “D’une manière ou d’une autre, nous allons réduire notre déficit de 2 200 milliards de dollars ces dix prochaines années”, a confirmé lundi le président américain lors d’une conférence de presse. “Les États-Unis qui sont habitués à une politique économique expansionniste et qui ne courent pas après les réductions de déficits comme en Europe, vont dorénavant aussi devoir se convertir à des politiques d’austérité”, pressent Christine Rifflart.
Reste que tout ce scénario n’est pas joué d’avance. Les parlementaires ont encore un an, jusqu’au vote sur la loi de finances 2013 en septembre prochain, pour réussir là où le "super-comité" a échoué. “C’est ce qu’ils doivent faire s’ils veulent éviter les coupes automatiques, c’est ce qu’ils avaient promis de faire et ils ont encore un an pour le faire”, a martelé, lundi Barack Obama. Mais les républicains et les démocrates pourraient être tentés de camper sur leur position pour satisfaire leur base électorale, dans la perspective de l’élection présidentielle de 2012.