Dans un entretien exclusif accordé à RFI et France 24, le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, revient sur l'accord conclu à Bruxelles entre les dirigeants de la zone euro pour résoudre la crise de la dette.
Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a accordé un entretien à France 24 et RFI, quelques heures après l'accord européen sur la dette obtenu au forceps dans la nuit de mercredi à jeudi à Bruxelles. Il se montre très optimiste sur les effets du plan européen qui prévoit notamment un effacement de la moitié de la dette grecque, tout en rappelant qu’il reste de lourdes tâches à accomplir. "Il faut maintenant nous concentrer sur l’exécution de ces mesures", explique-t-il.
"C’est une décision très importante que nous avons prise cette nuit. […] Nous avons réalisé des progrès très importants, plus importants que prévus, déclare-t-il. Nous avons proposé une solution d’ensemble qui pourrait en même temps porter une réponse à la question grecque mais aussi aux questions des banques, […], de la stabilité en Europe et quelques mesures pour renforcer la gouvernance de la zone euro."
"Les banques ont fait le bon pari"
Au terme de l’accord conclu cette nuit à Bruxelles, les banques créancières de la Grèce ont accepté de renoncer à la moitié de leurs créances, soit 100 milliards d’euros, effaçant ainsi une grande partie de la dette de la Grèce qui s’élève à 350 milliards d’euros.
"C’est un accord volontaire, assure José Manuel Barroso. Les banques se sont dit : ‘Est-ce que nous prenons le risque de tout perdre ou est-ce que nous nous assurons d’être remboursé à hauteur de 50% de nos prêts ?’ Elles ont fait le bon pari : celui de travailler à rendre possible le remboursement de la dette grecque", comment José Manuel Barroso.
En échange de l'effort demandé au secteur bancaire, une recapitalisation des établissements a été décidée. Les besoins ont été chiffrés à 106 milliards d'euros par l'Autorité bancaire européenne (EBA), bien que les marchés et le Fonds monétaire international (FMI) les estiment supérieurs.
Athènes recevra en outre de nouveaux prêts de 100 milliards d'euros d'ici à fin 2014 de la part de l'Europe et du FMI, dans le cadre d'un programme qui remplace celui de 109 milliards d'euros décidé en juillet.
Pour le président de la Commission européenne, "la Grèce a du potentiel si elle va au bout des réformes structurelles qu’elle aurait dû entamer il y a longtemps, elle est capable de connaître une croissance bien plus élevée que celle qu’elle a connue ces dernières années".
Les pays de la zone euro ont également prévu de faire appel aux pays émergents comme la Chine ou la Russie pour l’aider à résoudre la dette, en particulier pour financer le Fonds européen de stabilité financière (FESF), dont la capacité de prêt a été élevée à 1 000 milliards d’euros. Cette enveloppe devrait permettre d’éviter que la crise de la dette ne gagne l’Italie et l’Espagne, mais l’appel aux finances étrangères provoque nombre de critiques en Europe.
"La zone euro a besoin d’une véritable gouvernance économique"
Il ne s’agit pas d’un appel à l’aide, répond en substance le président de la Commission européenne, mais d’une possibilité d’investissement pour ces économies excédentaires. "Aujourd’hui, nous sommes interdépendants, rappelle José Manuel Barroso. Dans l’économie globale dans laquelle nous évoluons, il y a un intérêt d’ensemble à la stabilité de l’euro. Nous ne sommes pas en train de faire des demandes spécifiques [à ces pays] mais ce que nous proposons, c’est que ces pays qui ont un excédent financier puissent renforcer leurs contributions pour la stabilité financière."
Pour ce faire, le président de la Commission européenne rappelle la nécessité d’une politique économique commune aux dix-sept membres de la zone euro. Ils ont d’ores et déjà décidé de se réunir deux fois par an sous la présidence de l’actuel président de l’Union européenne, Herman Van Rompuy. "Il est évident que la zone euro a besoin d’une véritable gouvernance économique. Il faut qu’une union économique vienne compléter l’union monétaire", explique Barroso. Il annonce également la création d'un "super-commissaire à l'euro" avec l'élargissement des fonctions d'Olli Rehn, le commissaire chargé des Affaires économiques et monétaires.
"L’Europe est aujourd’hui beaucoup plus forte qu’il y a quelques temps, conclut José Manuel Barroso. Nous avons montré toute la détermination dont nous avons su faire preuve pour faire face à cette crise."