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Des affrontements sporadiques continuent à Tripoli, alors que les combattants se concentrent désormais sur Syrte, fief de Mouammar Kadhafi où l'ex-Guide libyen pourrait avoir trouvé refuge, et appellent l'Otan à poursuivre ses frappes.

AFP - Assurés du contrôle de Tripoli, les rebelles libyens visent maintenant Syrte, dernier grand bastion de Mouammar Kadhafi, tout en affirmant que l'ancien "Guide", en fuite, reste dangereux.

 Moustapha Abdeljalil, le président du Conseil national de transition (CNT), organe politique de la rébellion, a affirmé lundi que le colonel Kadhafi représentait toujours "un danger", en particulier par les discours dans lesquels il appelait encore la semaine dernière ses partisans à se soulever.

"C'est pourquoi nous appelons la coalition à poursuivre son soutien", a-t-il ajouté à l'ouverture à Doha d'une réunion des chefs d'état-major des pays engagés militairement en Libye.

Selon un autre responsable libyen, Jalal al-Deghili, la coalition peut encore aider à "rétablir la sécurité et éliminer les cellules dormantes et les restes du régime de Kadhafi".

L'Otan, qui dirige les opérations depuis le 31 mars, a rappelé que son mandat courait jusqu'au 27 septembre. Et les frappes se sont poursuivies, en particulier sur Syrte, près de laquelle une trentaine de cibles ont été touchées dimanche.

Dans la capitale, la situation était très calme lundi matin, mais le manque d'eau continuait à se faire sentir, avec une multiplication des coupures. Et si les rebelles ont assuré que de l'eau potable était distribuée dans certaines mosquées, tous les habitants n'avaient pas forcément les moyens de s'y rendre.

Dans la nuit, une demi-douzaine de violentes explosions ont résonné près de la capitale après le passage d'un avion de l'Otan, faisant taire pendant quelques minutes les rafales d'armes automatiques des rebelles célébrant la prise de la ville, comme chaque soir depuis près d'une semaine.

Les combats sont terminés à Tripoli, mais quelques petits groupes isolés de loyalistes y sévissent encore sporadiquement, essentiellement la nuit, selon les rebelles. La France a d'ailleurs annoncé la réouverture de son ambassade, qui avait été évacuée en février.

Les regards se tournaient désormais vers Syrte, fief de M. Kadhafi, qui est né dans cette région et pourrait y avoir trouvé refuge. La ville de 120.000 habitants à 360 km à l'est de Tripoli est désormais prise en étau entre des forces rebelles positionnées à 30 km à l'ouest et 100 km à l'est.

Des négociations sont en cours avec les leaders tribaux de Syrte en vue d'une reddition de la ville, selon diverses sources. Mais un porte-parole des rebelles a prévenu qu'elles ne dureraient pas éternellement et que faute d'un accord rapide, la situation serait réglée par les armes.

Dans l'Ouest en revanche, les pro-Kadhafi ont fait croire qu'ils avaient quitté Ragdaline, à une soixantaine de kilomètres à l'est de la Tunisie, avant de combattre avec acharnement pendant des heures des rebelles complètement désorganisés.

"Je ne comprends pas. Pourquoi est-ce qu'ils continuent de se battre ? Ils ne regardent peut-être pas la télévision. Ils devraient savoir que l'ère de Kadhafi, c'est terminé", s'est étonné un jeune combattant rebelle, Agraw Assiny.

Dimanche, les rebelles ont annoncé avoir libéré plus de 10.000 détenus des prisons du régime, mais se sont inquiétés du sort de près de 50.000 "personnes arrêtées ces derniers mois" et manquant encore à l'appel.

L'inquiétude est d'autant plus grande que des charniers ont été découverts et que les témoignages se multiplient sur des exécutions sommaires de prisonniers par les pro-Kadhafi pendant la bataille de Tripoli.

Une cinquantaine de squelettes carbonisés ont ainsi été découverts samedi lors de la prise de la dernière base militaire de Tripoli encore aux mains des forces loyalistes, d'après une journaliste de l'AFP.

Selon un survivant interrogé par l'organisation Human Rights Watch, il s'agissait de prisonniers en majorité civils. Au soir du 23 août, des soldats loyalistes ont lancé des grenades par la porte et tiré depuis le toit, avant d'entrer achever les blessés. Le bâtiment a été incendié trois jours plus tard.

A Benghazi, les familles se pressaient dimanche soir à l'arrivée d'un bateau transportant des réfugiés de Tripoli, des mères lançant des youyous en retrouvant leur fils tandis que d'autres, sans nouvelles de proches arrêtés, interrogeaient les passagers avec angoisse.

"Nous espérons que Kadhafi est toujours en Libye pour que nous puissions débarrasser le monde de cet insecte", a déclaré le colonel Ahmed Omar Bani, porte-parole militaire des rebelles, qui ont promis une récompense de 1,7 million de dollars pour retrouver l'ancien "Guide" vivant ou mort.

Les rebelles ont en outre indiqué qu'un des fils de Kadhafi, Khamis, dont la mort a été annoncée à plusieurs reprises depuis le début du conflit sans jamais être confirmée, pourrait faire partie des soldats tués samedi lors d'un accrochage. Mais les corps calcinés rendent l'identification délicate.

Dans la ville d'Agadez, dans le nord du Niger, des dizaines de jeunes mercenaires, essentiellement des Touaregs, partis se battre en Libye, sont subitement revenus, selon un élu joint par l'AFP. Beaucoup ont rapporté "des véhicules de luxe et du mobilier de tout genre", mais les autorités redoutaient qu'ils aient aussi gardé leurs armes.

De son côté, Alger a cherché lundi à calmer le jeu avec les rebelles, assurant que son chef de la diplomatie, Mourad Medelci, avait rencontré le N.2 du CNT, Mahmoud Jibril ce week-end en marge d'une réunion de la Ligue arabe au Caire, après d'autres contacts similaires depuis plusieurs mois.

Les rebelles ont régulièrement accusé l'Algérie de soutenir le régime de Kadhafi, en envoyant notamment des mercenaires. Alger a démenti et assuré observer une "stricte neutralité".