La circoncision a permis de réduire de 76% les risques d’infection au VIH chez les hommes, selon une étude menée par l’Agence française de recherches sur le sida. Une nouvelle qui ne doit pas enrayer le processus d’éducation préventive.
Présentés dans le cadre de la sixième Conférence scientifique internationale sur le sida organisée à Rome en début de semaine par la Société internationale du sida (IAS), les résultats de l’étude sur la circoncision ont été applaudis par l’ensemble des chercheurs.
Ce projet a été mené par l'Agence française de recherches contre le sida (ANRS), dans le bidonville d’Orange Farm, situé à une soixantaine de kilomètres de Johannesburg, où 40 % des hommes non circoncis sont infectés par le virus du VIH.
Il y a trois ans, une vaste campagne en faveur de la circoncision a été lancée dans ce bidonville où 50 % des hommes non circoncis de plus de 15 ans, soit 200 000 personnes, ont accepté de se faire opérer. Trois ans plus tard, l’analyse d’un échantillon de 1 000 habitants de ce bidonville a permis de conclure que cette opération avait engendré une baisse de 76 % des risques de contamination par le VIH. Cette baisse liée à la circoncision de cet échantillon de population s'explique par la présence, sur la surface interne du prépuce, de cellules de Langerhans, facilement infectées par le VIH.
Selon l’équipe de chercheurs, la circoncision n’encourage pas pour autant les rapports non protégés. Au-delà, les femmes elles aussi doivent pouvoir bénéficier de la réduction des risques.
Une "bonne nouvelle" mais pas un remède miracle
Les résultats de cette étude menée à Orange Farm ont suscité beaucoup d’intérêt chez les habitants du bidonville et les médias locaux.
Installé depuis 1992 dans le bidonville, Richard "Bricks" Mokolo se bat depuis son arrivée pour la prévention contre le Sida dans son quartier. Membre actif de la campagne pour la circoncision depuis son lancement il y a trois ans, il a accueilli les résultats de l’étude comme un "réel progrès" qui donnera un argument de poids à son combat. "Ça reste évidemment un choix personnel, mais je suis persuadé que les habitants feront le choix qui leur permettra de vivre".
Mais Richard "Bricks" Mokolo met en garde contre ce qui pourrait être perçu comme un remède miracle. "L’éducation des habitants, notamment concernant l’utilisation des préservatifs et les pratiques à risques doit absolument accompagner cette bonne nouvelle".
Un rappel qui fait écho aux propos de Françoise Barré-Sinoussi, prix Nobel de médecine 2008 pour avoir participé à la découverte du VIH en 1983 : "Si on veut diminuer l'incidence de l'infection dans le monde, ça ne va pas être la circoncision toute seule, les préservatifs tout seuls, le traitement comme prévention tout seul : c'est un ensemble, dont font partie aussi l'éducation et la lutte contre la stigmatisation", a-t-elle expliqué à l'AFP lors de la conférence à Rome.
La prévention contre le Sida en Afrique du Sud, une histoire de couacs
Les conclusions de l’étude constituent une avancée capitale dans un pays, l’Afrique du Sud, où les autorités ont relayé, à plusieurs reprises, des aberrations scientifiques.
En 2006, Jacob Zuma [président sud-africain depuis 2009] a dû s’expliquer devant la Haute Cour de justice de Johannesburg sur les raisons de ses relations sexuelles avec une femme qu’il savait séropositive. "Je me suis douché après avoir fait l’amour pour minimiser les risques de contracter la maladie", avait-il alors répondu au juge.
En 2007, ce fut au tour de la ministre de la Santé Manto Tshabalala-Msimang d’ulcérer les organismes de lutte contre le sida. Persuadée que les régimes à base d'ail, de betteraves ou de citron pouvaient renforcer les défenses de l'organisme contre le virus, elle soutenait qu’une alimentation saine serait plus efficace que les médicaments antirétroviraux. La presse locale l’avait alors surnommée "Docteur Betterave". Son obstination combinée à celle de l’ancien président Thabo Mbeki ont alors sérieusement contribué au retard des politiques de lutte contre le Sida en Afrique du Sud.