logo

Démocrates et républicains doivent trouver un accord sur le relèvement du plafond légal de la dette avant le 2 août sinon les États-Unis pourraient ne plus pouvoir payer leurs créanciers. Une situation qui rappelle celle de la Grèce.

Dix jours : c’est le temps que le président américain Barack Obama s’est donné, dimanche 10 juillet, pour trouver un accord avec les républicains afin de relever le plafond légal de la dette américaine. Le locataire de la Maison-Blanche n’a pas le choix. Si l’impasse actuelle persiste au 2 août, "les États-Unis ne pourront plus légalement emprunter de l’argent sur les marchés pour se financer", explique Christine Rifflart, économiste spécialiste des États-Unis à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). En d’autres termes, la première puissance économique mondiale ne pourra alors plus payer ses dettes. Une situation qui rappelle celles de la Grèce et du Portugal.

Le blocage actuel aux États-Unis est d’abord d’ordre politique. Pour faire augmenter le plafond légal de la dette américaine, l’administration Obama a besoin d’un vote au Congrès qui lui demande en retour de présenter un plan pour réduire les déficits. Le président a proposé, en mai, un train de mesures visant à économiser 4 000 milliards de dollars grâce, notamment, à de nouveaux impôts. Une perspective rejetée par les républicains qui, eux veulent, réduire les prestations sociales pour les personnes âgées et les plus pauvres. Une proposition inacceptable pour les démocrates. Du coup, depuis mai, la situation est bloquée. "Actuellement, les deux camps font monter les enchères dans la perspective de l’élection présidentielle de 2012 au risque de faire brûler le bateau Amérique", note Ethan Ilzetzki, professeur spécialistes des États-Unis à la London School of Economics.

Confiance des marchés

Mais derrière la bataille politique, il y a des problèmes économiques bien réels. Depuis le début de la crise économique, la dette américaine a explosé sous l'effet conjugué de la montée du chômage, de la baisse des rentrées fiscales et du plan de sauvetage des banques. En mai dernier, cette dette a franchi un cap historique : elle a atteint 14 400 milliards de dollars soit, pour la première fois de son histoire, plus que la limite légale de 14 300 milliards dollars. "Et actuellement, elle continue d’augmenter", confirme Christine Rifflart. Cet endettement représente 95% du PIB américain. Un niveau certes inférieur à la Grèce (120%), mais supérieur au Portugal(90%). L’économiste française ajoute que pour faire baisser la dette, les États-Unis ont besoin d’un taux de croissance de plus de 2,5% ce qui n’est actuellement pas le cas selon les dernières projections du FMI (il devrait être de 2,5% au mieux en 2011).

Pas de quoi pavoiser donc. Mais de là à promettre aux États-Unis un destin "à la grec", il y a un pas que peu d’économistes oseraient franchir. "La grande différence est que les autres pays continuent à penser que les États-Unis peuvent rembourser leurs dettes", indique Ethan Ilzetzki. Les taux d’intérêt auxquels Washington peut emprunter sur les marchés ne s’envolent pas contrairement à ceux auxquels Athènes ou Lisbonne peuvent emprunter. Ils oscillent aux alentours de 3%, soit le même taux que pour l’Allemagne.

Pourquoi cette confiance alors que l’endettement américain est supérieur à celui du Portugal ? "La Réserve fédérale peut toujours faire tourner la planche à billets pour rembourser les dettes des États-Unis", rappelle Iain Begg, économiste spécialiste de la zone euro à la London School of Economics. Le Portugal et la Grèce ont perdu cette possibilité au profit de la BCE qui s’interdit d’imprimer de l’euro pour financer la dette des pays de la zone euro.

L’arbitre chinois

Il n’y a donc théoriquement aucune limite à l’endettement américain. "La seule limite est le bon vouloir de la Chine", souligne Iain Begg. Tant que Pékin continue d'acheter des bons du Trésor américain, et donc de financer le déficit américain, tout va bien. "Pour l’instant, la Chine n’a pas intérêt à arrêter car cela entraînerait un effondrement du dollar et ferait chuter du même coup la valeur de l’énorme quantité de dollars dans les coffres chinois", rajoute l’économiste britannique.

Mais un jour, Pékin pourrait vouloir mettre le holà aux dérives budgétaires américaines. "La meilleure manière pour Washington de montrer à la Chine qu’ils sont capables d’honorer leurs dettes et de trouver un accord sur la meilleure manière de réduire leur déficit", conclut Ethan Ilzetzki.