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Du mythe Maradona à l’énigme Diego

Il en a rêvé depuis sa calamiteuse retraite. Et voilà qu’il accède à la fonction "suprême" de sélectionneur de l’Argentine. Diego Maradona suscite toujours autant la passion. Mais aussi la polémique. Parcours d'une légende vivante.

Mardi, Diego Maradona a été désigné nouveau sélectionneur de l’équipe d’Argentine en remplacement d’Alfio Basile. Pourquoi la Fédération argentine de football (AFA), et son puissant président, Julio Grondona, ont-ils choisi l’ancien capitaine emblématique de l’"Albiceleste" à ce poste ? Pourquoi lui plutôt que Carlos Bilardo, à la tête de l’équipe championne du monde en 1986, au Mexique, ou Sergio Batista, sélectionneur des récents champions olympiques à Pékin ? Le génie de Diego le joueur suffira-t-il à asseoir la réussite de Diego le coach ?

Jorge Forbes, correspondant de la presse argentine à Paris, n’en doute pas un instant : pour lui, Julio Grondona a réussi un "grand coup". Comment ? "Il y avait une grosse pression ces derniers jours en faveur de la nomination de Maradona, précise Forbes. Si ce dernier échoue, Grondona pourra prétexter avoir ‘écouté’ la presse, relais de la vox populi, au moment de faire son choix. Dans le même temps, il se débarrasserait définitivement de Diego. En cas de succès, il pourra toujours se targuer d’avoir été pertinent."

"Diego met le mythe Maradona en jeu"

Véritable icône du football argentin, "El Pibe de Oro" ("Le gamin en or") n’a jamais caché son intention de prendre un jour les rênes de la sélection. Celle-ci est seulement troisième des éliminatoires de la Coupe du monde 2010 de la zone Amsud, derrière le Paraguay et le Brésil. Autant dire que le nouveau sélectionneur est déjà sous pression. A fortiori, comme le souligne le quotidien La Nacion, "Diego met le mythe Maradona en jeu". Mythe ? Oui, mythe. Et légende vivante.

En 1986, au Mondial mexicain, Maradona n’a pas eu besoin de montrer l’immense étendue de son talent. Il l’a étalée naturellement. A peine s’est-il rendu coupable de "tricherie" avec son but de la main contre l’Angleterre qu’il s’est rattrapé quelques minutes plus tard en passant en revue ses adversaires avant de battre le gardien anglais. En finale, face à l’ex-République fédérale d’Allemagne (RFA), il a conduit l’"Albiceleste" à son deuxième sacre mondial. Quatre ans plus tard, en Italie, au soir d’une défaite amère face au Cameroun, lors du match d’ouverture, Diego ne fait pas de rêve, mais une promesse : emmener son pays en finale. Il tient parole.

L’Argentine partagée

Mais la fin de sa carrière, gâtée par la drogue et l’alcool, a été si dramatique qu’elle a quelque peu masqué les exploits du gamin. C’est pourquoi l’Argentine est aujourd’hui divisée. Surtout que son enfant chéri n’a pas de passé d’entraîneur qui plaide en sa faveur. Maria Laura Avignolo, correspondante du quotidien Clarin à Paris, a même peur pour lui. "Ce job est trop compliqué pour Maradona, lâche-t-elle. Son inexpérience, son passé avec la drogue, la pression, tout cela l’handicape. Il a certes eu la carrière extraordinaire que l’on connaît, mais là c’est une autre paire de manches."

Maria Laura Avignolo va plus loin. Elle se demande si "le père du foot argentin" est "suffisamment équilibré pour occuper un poste si exposé". Alors, surprise ? "Oui, affirme-t-elle. D’autant que le président de la Fédération a publiquement rejeté la candidature de Diego après le départ de José Pekerman au lendemain du Mondial allemand en 2006.

Diego a-t-il changé ?


Maradona a-t-il donc changé au point de mériter le poste de sélectionneur ? Les Argentins sont encore partagés. Pour Maria Laura Avignolo, la Fédération lui offre "plutôt la chance de pouvoir changer son image non seulement auprès de ses concitoyens mais aussi auprès de ses fans et des amoureux du foot en général". Oui, il a commencé à changer, clame-t-elle. "Grâce, notamment, à son ex-femme, Claudia, et à ses feux filles. A cause de son âge, aussi." A 48 ans, Maradona sera bientôt grand-père et son beau-fils n’est autre qu’Agüero, l’attaquant de la sélection argentine.

Mais si Jorge Forbes juge le coup de Julio Grondona "bon", c’est parce que ce dernier a pris le soin d’encadrer le successeur de Basile par un adjoint de poids : Carlos Bilardo. Un homme de terrain en bonne entente avec Diego qui sera là pour pallier les insuffisances et les manques. Et un sacré joker en cas d’échec d’"el Pibe de Oro".

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