logo

La seule femme poursuivie pour génocide fixée sur son sort dans la journée

Le Tribunal pénal international pour le Rwanda doit rendre son verdict à l'encontre de l'ex-ministre de la Famille Pauline Nyiramasuhuko, accusée d'être impliquée dans les viols et les massacres survenus à Butare lors du génocide de 1994.

AFP - La seule femme poursuivie devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), l'ex-ministre de la Famille Pauline Nyiramasuhuko, sera fixée sur son sort vendredi, ainsi que cinq co-accusés, tous poursuivis pour génocide en 1994 à Butare (sud du Rwanda).

Mme Nyiramasuhuko, qui est par ailleurs la première femme poursuivie pour génocide devant un tribunal international, a comparu depuis juin 2001 avec son fils Arsène Shalom Ntahobali, deux anciens préfets de Butare ainsi que deux anciens maires.

Poursuivis pour crimes de génocide et crimes contre l’humanité, les six accusés font partie, selon le procureur, des principaux responsables des massacres de Tutsi à Butare en 1994.

Sans eux, "le génocide n’aurait pas été possible à Butare", a déclaré Holo Makwaia, à l’ouverture d’un long réquisitoire, le 20 avril 2009. La magistrate tanzanienne avait ensuite particulièrement accablé l'ex-ministre.

"Pauline Nyiramasuhuko n’était pas seulement une grande figure; elle a été impliquée dans les massacres et les viols qui ont été commis (en 1994) à Butare", avait soutenu Mme Makwaia.

"Au lieu de protéger les familles comme le stipulait le mandat de son ministère, elle a décidé d’exterminer les familles", avait-elle poursuivi. "Shalom Ntahobali n’était pas loin de sa mère; il a tué et violé", avait également accusé la représentante du procureur.

Prenant le relais, la Canadienne Madeleine Schwarz avait abondé dans le même sens, accusant l’ex-ministre d’avoir ordonné à son fils, aux miliciens et aux soldats de tuer les hommes tutsi, de séquestrer, violer et mettre à mort les filles et les femmes tutsi.

Deux jours plus tard, la défense de l’ex-ministre contre-attaquait. "C’est une abomination que de prétendre que Pauline Nyiramasuhuko est allée jusqu’à ordonner à son fils de violer des jeunes femmes tutsi", s’était indignée Me Nicole Bergevin, l’avocate principale de l’ex-ministre.

"Nyiramasuhuko n’est pas coupable de ces allégations abominables portées contre elle", avait ajouté l’avocate québécoise, appelant la chambre présidée par le Tanzanien William Hussein Sekule à acquitter l’ex-ministre.

Le deuxième avocat de Nyiramasuhuko, Guy Poupart, également du barreau du Québec, avait dénoncé une campagne visant à diaboliser les membres du gouvernement en place pendant le génocide.

Plaidant également l’acquittement, l'avocat de Shalom Ntahobali avait fait état de graves contradictions dans les témoignages à charge et souligné que plusieurs accusateurs n’étaient même pas parvenus, lors de leur comparution, à reconnaître l’accusée dans le prétoire.

Les avocats des autres accusés ont également demandé l'acquittement.

Née dans une modeste famille du sud du Rwanda, Mme Nyiramasuhuko, qui paraît plus jeune que ses 65 ans, entre, après ses études primaires, à l'Ecole sociale de Karubanda dans sa région.

En 1986, alors quadragénaire, elle reprend des études sanctionnées par une licence en droit en 1990.

En avril 1992, elle est nommée ministre de la Famille et de la promotion féminine dans le premier gouvernement multipartite.

Elle sera reconduite à ses fonctions en 1993, puis en 1994, pendant le génocide.

Après la victoire militaire du Front patriotique rwandais (FPR - actuellement au pouvoir), elle se réfugie à Bukavu dans l'est de l'ex-Zaïre. C'est alors que les organisations internationales des droits de l'homme commencent à la mettre en cause.

Elle sera arrêtée au Kenya en juillet 1997 et transférée, pour jugement, au TPIR où elle attend son verdict vendredi.