Plusieurs personnes ont été blessées en Turquie dans des incidents survenus en marge des élections législatives qui se déroulent ce dimanche. Plusieurs dizaines d'autres ont également été arrêtées.
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AFP - Les Turcs ont voté dimanche aux élections législatives pour lesquelles le parti issu de la mouvance islamiste du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan part favori et pourrait ainsi s'assurer d'une troisième législature consécutive.
Selon les sondages, le Parti de la justice et du développement (AKP) de M. Erdogan, 57 ans, sortira gagnant des élections, obtenant ainsi sa troisième victoire d'affilée depuis 2002.
Plus de 50 millions d'électeurs, sur une population de 73 millions d'habitants, étaient appelés à se prononcer pour renouveler le Parlement de 550 sièges.
Les derniers bureaux de vote ont fermé à 14H00 GMT et les premières estimations sont attendues à partir de 18H00 GMT, mais généralement les autorités électorales permettent aux télévisions de donner des projections plus tôt.
Le vote est obligatoire en Turquie, sous peine d'amende.
Plusieurs personnes ont été blessées, dont deux policiers, et une quarantaine d'autres arrêtées au cours de plusieurs incidents liés aux élections, notamment à Ankara et dans le sud-est peuplé majoritairement de Kurdes, a rapporté l'agence Anatolie.
M. Erdogan a vanté pendant la campagne la bonne santé économique de la Turquie, actuellement 17e économie mondiale avec une croissance "à la chinoise" de 8,9% en 2010, et une inflation maîtrisée à environ 6%.
Mais l'opposition dénonce son autoritarisme croissant, et des atteintes aux libertés, avec en particulier des arrestations de journalistes.
"J'ai voté pour le retour en Turquie à une démocratie normale, dans laquelle les gens n'ont pas peur d'afficher leurs opinions", a déclaré à l'AFP à Ankara Engin Ünsal, fonctionnaire retraité, qui n'a pas caché son choix pour l'opposition.
"Tout le monde doit respecter le résultat du scrutin", a dit M. Erdogan à Istanbul après avoir voté, évoquant une forte participation.
La campagne électorale s'est déroulée avec quelques coups bas, dont la diffusion sur internet d'enregistrements vidéo compromettants qui ont décapité la direction du parti nationaliste MHP, troisième force à l'Assemblée.
La principale inconnue du scrutin réside dans le fait de savoir si l'AKP aura assez de sièges pour faire adopter une nouvelle Constitution, ouvrant aussi la voie aux aspirations présidentielles du Premier ministre.
M. Erdogan ne cache pas ses ambitions d'avancer vers un régime présidentiel, mais une importante partie de l'opinion craint de voir le pays sombrer dans l'autoritarisme avec de tels changements.
Trois scénarios pourraient se dessiner après le scrutin : si l'AKP dépasse la barre des 367 députés, soit une majorité des deux tiers, il pourra réviser la Constitution sans avoir recours à un référendum. Avec 330 sièges, l'AKP devra organiser un référendum. Enfin, à moins de 330, il lui faudrait l'aide d'autres partis, ou abandonner son projet.
Les sondages donnent l'AKP gagnant avec environ 45% voix (47% en 2007).
Mais le principal parti de l'opposition laïque (CHP, Parti républicain du peuple) semble capable d'une percée. Le MHP (Parti de l'action nationaliste) devrait obtenir entre 10 et 12% des suffrages.
Les sondages prédisent en outre l'élection de députés "indépendants", en particulier favorables à la cause kurde, qui ont choisi cette étiquette pour échapper à la règle selon laquelle 10% des voix à l'échelle nationale sont indispensables à l'entrée d'une formation au Parlement, à l'issue de ce vote à la proportionnelle.
Déchirée par des coalitions instables et des gouvernements éphémères, la Turquie s'est enfin stabilisée, politiquement et économiquement, sous la direction de l'AKP qui a aussi réussi à cantonner dans ses casernes l'armée, jadis acteur politique de premier plan.
Mais la perspective d'une adhésion à l'Union européenne est dans les limbes, en raison notamment de l'opposition de la France et de l'Allemagne.