Le ministère de la Justice a demandé, vendredi, un an d'exclusion de la magistrature du juge Fabrice Burgaud pour ses "manquements" dans l'instruction de l'affaire d'Outreau.
AFP - Le ministère de la Justice a demandé l'exclusion pour un an de la magistrature du juge Fabrice Burgaud pour ses "manquements" dans l'instruction de l'affaire de pédophilie d'Outreau, vendredi devant la formation disciplinaire du Conseil supérieur de la magistrature (CSM).
La directrice des services judiciaires (DSJ), Dominique Lottin, a demandé au nom de la Chancellerie au CSM, organe suprême de la magistrature, une "exclusion temporaire d'un an" de M. Burgaud, 37 ans, qui a instruit de février 2001 à août 2002 une affaire d'abus sexuels sur mineurs à Outreau (Pas-de-Calais).
"L'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximum d'un an" se situe au sixième rang dans l'échelle des neuf sanctions prévues par le statut de la magistrature, allant de la simple réprimande à la révocation.
L'instruction de ce jeune juge du tribunal de Boulogne-sur-Mer, aujourd'hui en poste au parquet de Paris, a été très décriée après que 13 des 17 accusés eurent été acquittés à l'issue de deux procès en 2004 et 2005.
La représentante du ministère a dénoncé vendredi à la fois un "manque évident de rigueur" et un "manque d'impartialité" de M. Burgaud.
Elle a fustigé également un "manque d'égards envers les justiciables" et "des atteintes aux droits de la défense".
Mme Lottin a évoqué "des déclarations d'enfants recueillis dans des conditions peu propices à l'émergence de la vérité". Ainsi, "il ne suffisait pas, M. Burgaud, d'ordonner des expertises en crédibilité. Il vous appartenait de procéder vous-même à ces analyses", a-t-elle lancé au magistrat.
Elle lui a également reproché d'avoir posé "des questions fermées induisant les réponses et ne permettant pas tester la crédibilité des enfants".
Fabrice Burgaud aurait également, du point de vue du ministère, présenté "pour acquis" des faits contredits pourtant par les vérifications des enquêteurs.
"A aucun moment, la direction des services judiciaires n'a prétendu que M. Burgaud avait délibérément trompé ses collègues" chargés de contrôler son instruction, au sein de la cour d'appel de Douai, a insisté la DSJ qui a balayé également "la théorie du bouc émissaire" que serait Fabrice Burgaud dans le fiasco d'Outreau.
La décision du CSM, à l'issue des plaidoiries des défenseurs de M. Burgaud au terme d'une semaine d'audience, sera mise en délibéré.
Un autre magistrat, Gérald Lesigne, alors procureur de Boulogne, a été traduit devant le CSM dans le cadre de l'affaire d'Outreau. En juillet 2008, le CSM a estimé qu'il ne méritait aucune sanction mais la ministre de la Justice Rachida Dati lui a toutefois demandé de quitter ses fonctions et l'a nommé à Caen.