
L’Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture a rendu public le nouvel indice des prix alimentaires pour le mois de février. Il bat un nouveau record, renforçant le risque d’une nouvelle crise de la faim dans le monde.
"Malheureusement en février, les prix des denrées alimentaires ont battu un nouveau record historique". C’est ce qu’a annoncé Abby Abbassian, économiste de la FAO, l'organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, à FRANCE 24. En février, l’indice de référence de l’organisation internationale de l’alimentation a en effet bondi de 2,2% par rapport au mois précédent. Au cours des six derniers mois, l’augmentation a été de près de 70%.
La situation, décrite ce mardi par la FAO, ressemble de plus en plus à celle de 2008 lorsqu’avaient éclaté les émeutes de la faim dans le monde. Cette fois-ci, ce sont les prix des céréales qui tirent l’indice vers de nouveaux sommets. Jusqu’à présent, la hausse était essentiellement due à l’envolée des prix du sucre et des huiles végétales.
Des prix comparables à 2008
"Le prix du panier de céréales a dépassé son niveau de juillet 2008", reconnaît Abby Abbassian. Les causes de ce nouveau pic sont connues. Depuis les années 1980, les investissements dans l’agriculture – aussi bien dans les pays riches que les pays pauvres – sont en recul constants. La FAO a plaidé, mardi, pour qu’ils soient au moins égal à 5% du PIB dans les pays en voie de développement. Le développement des biocarburants a également contribué à faire baisser les stocks mondiaux de céréales. "L’an dernier, 120 millions d’hectares de céréales ont ainsi été détournés des marchés alimentaires pour servir aux biocarburants", a déploré Jacques Diouf, président de la FAO lors d’une conférence de presse. Dernière cause : la spéculation, "excessive" selon le président de la FAO, qui tire les prix vers le haut.
Selon la FAO pourtant, plusieurs facteurs pourraient empêcher une nouvelle crise de la faim. "La situation de 2008 était largement due à l’augmentation des prix du riz. Aujourd’hui, il demeure inférieur à ceux de 2008", observe Abby Abbassian. Par ailleurs, le développement des biocarburants est aujourd’hui plus contrôlé par des quotas établis au niveau international.
Par ailleurs, en 2008, l’augmentation des prix alimentaires s’était accompagnée d’une flambée du prix de l’or noir, rendant plus onéreux le transport des aliments. "Le prix du pétrole n’a pas encore atteint ses niveaux de 2008", remarque Abby Abbassian tout en notant une tendance à la hausse du prix du brut.
La Russie reste un grenier à grains important
Il est donc possible que la situation sur le marché des denrées alimentaires s’améliore cette année. "Nous prévoyons une augmentation de 3% de la production de céréales cette année, ce qui serait une bonne chose", affirme Abby Abbassian. Une prévision qui repose sur une reprise économique en Russie et dans les pays de l’ex-URSS considérés comme l’un des plus importants greniers à grain du monde
La FAO espère enfin que le G20 ira plus loin que de se contenter de simples déclarations d’intention pour donner la priorité au problème du prix des denrées alimentaires. Sur ce point, Bruno Le Maire, ministre français de l’Agriculture, s’est voulu rassurant ce mardi : la France – actuellement à la tête du G20 – va demander que la "Banque mondiale alimentaire puisse acheter les céréales à des prix moins élevés que ceux du marché". Une mesure qu’il a qualifié "d’urgente" alors que la FAO plaide pour une approche "structurelle" à plus long terme.