
L’actuel président du Fond monétaire international deviendra peut-être le prochain candidat socialiste à la présidentielle de 2012. Dominique Strauss-Kahn laisse encore planer le doute. Mais a-t-il été un bon patron du FMI ?
Ira, ira pas ? Lors de son intervention télévisée dimanche sur France 2, Dominique Strauss-Kahn n’a pas levé le doute sur son éventuel candidature aux primaires socialistes pour l’élection présidentielle de 2012. Il a répété penser avant tout à son rôle de patron du FMI. Un rôle qui l'oblige, de toute façon, à une certaines réserves sur les questions de politiques nationales.
Nommé président du Fond monétaire international en 2007, quel empreinte "DSK" a-t-il jusqu’à présent laissé à la tête de la prestigieuse institution internationale ? Axel Dreher, spécialiste allemand des organisations financières internationales à l’université de Göttingen, juge l’action du patron du FMI.
FRANCE 24 : Quel a été l’évolution du FMI au cours la présidence de Dominique Strauss-Kahn ?
Axel Dreher : Le FMI s’est montré moins dogmatique et plus flexible qu’avant pour octroyer des crédits. En ce sens, le Fond monétaire international a pris le bon chemin à mon avis. L’une des grandes critiques qui avaient été adressée au FMI par le passé était qu’il n’accordait de crédits qu’à des pays qui s’engageaient résolument dans la voie de réformes d’inspiration libérale.
Une position qui n’avait pas franchement réussi durant la crise asiatique des années 1990. A tel point que bon nombre d’États s’étaient résolus à ne plus rien demander au FMI qui risquait, pour le coup, de devenir une institution inutile. Depuis, le FMI a mis, notamment, en place un système de crédits non-conditionnés en rupture avec les principes passés qui lui a permis de jouer de nouveau son rôle d’assureur mondial.
FRANCE 24 : Dominique Strauss-Kahn qui pourrait devenir le candidat du parti socialiste aux prochaines élections présidentielles en France a-t-il mené une politique de gauche à la tête du FMI ?
A.D. : On peut dire qu’il a eu une approche moins conservatrice que ses prédécesseurs. Mais je ne suis pas sûr qu’on puisse affirmer qu’il a agi par idéologie. En fait, les décisions du FMI correspondent plus ou moins aux théories économiques actuellement en vogue dans les milieux universitaires, notamment américains. C’est-à-dire un abandon du libéralisme tel que prôné par le passé.
Au crédit de Dominique Strauss-Kahn, le FMI a très vite pris cette évolution de la pensée économique en compte. Par le passé, cette institution avait souvent un train de retard sur les réflexions des universitaires.
FRANCE 24 : Vous semblez donc dire que Dominique Strauss-Kahn est un bon président du FMI ?
A.D. : Certaines orientations, comme d’ouvrir davantage les vannes du crédit, depuis qu’il a pris ses fonctions, vont dans le bon sens. Mais, il reste de grosses incertitudes sur lesquelles le FMI n’a pas encore tranchée et qui montre que l’institution réagit encore à trop à court terme. C’est surtout vrai en ce qui concerne une question centrale : quels sont les pays qui ont droit à un crédit ?
Ces dernières années, le FMI donne l’impression de revenir à ses origines. Pour certains pays, il octroie un crédit sans être regardant quand, pour d’autres, il pose des conditions très sévères. Une politique qui avait valu au FMI d’être fortement critiqué à son origine par les pays en voie de développement qui s’estimaient lésés. Ce risque existe de nouveau aujourd’hui car le FMI donne l’impression de privilégier certains États, notamment les plus riches. Il faut que le Fond monétaire international clarifie cette situation.