
À la tête de l'Égypte depuis le départ de Moubarak, l'armée a dissous le Parlement et suspendu la Constitution sous l'œil vigilant des manifestants, qui entendent maintenir la pression sur les nouveaux hommes forts du Caire.
En ce lundi, décrété férié par l’armée, une foule hétéroclite de près de 2 000 personnes s’est de nouveau rassemblée place Tahrir, au Caire, interrompant le trafic autour du rond-point, quelques heures seulement après l'évacuation de la zone par la police militaire et l'armée.
"Les gens viennent en famille voir cet endroit, symbole de la révolte qui restera dans l’Histoire égyptienne, explique Cyril Vanier, envoyé spécial de FRANCE 24 au Caire. D’autres viennent également parce qu’ils considèrent que leurs revendications n’ont pas été entendues, mais ceux-là se font de plus en plus discrets en raison de l’importante présence militaire."
L’armée, qui tente depuis samedi de vider la place Tahrir de ses manifestants, l’a débarrassée des tentes qui y avaient été dressées, appelant à un retour à l’ordre et à la normale. Dans cette perspective, le Conseil suprême des forces armées vient également de demander aux syndicats de mettre fin aux grèves organisées, notamment, dans les services publics et les banques pour demander des revalorisations salariales et une amélioration des conditions de travail.
Vers un amendement de la Constitution
Dimanche, l'armée égyptienne a commencé à démanteler les institutions du régime d’Hosni Moubarak après que le président déchu lui a cédé le pouvoir, vendredi soir.
Le Conseil suprême a ainsi annoncé la dissolution de l’Assemblée du peuple et de la Choura - les deux chambres du Parlement - et la création d'une commission pour amender la Constitution dont les conclusions seront soumises à un réferendum d'ici à deux mois. Les amendements constitutionnels devraient être finalisés dans les dix prochaines jours.
Le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui, qui dirige le Conseil, a également indiqué qu’il présiderait aux destinées du pays jusqu’à l’organisation des prochaines élections législatives et présidentielle, prévues pour septembre prochain.
Des décisions que les Cairotes jugent dans leur ensemble "positives", selon Melissa Bell, envoyée spéciale de FRANCE 24 en Égypte. Mais la transition politique s’annonce difficile, poursuit celle-ci.
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L’Égypte de l’après-Moubarak fidèle à ses obligations internationales
Selon l’envoyée spéciale de FRANCE 24 toujours, "la population, dans son ensemble, fait confiance aux militaires mais reste vigilante, car l’armée n’a toujours pas répondu à deux de leurs revendications : la libération des prisonniers politiques et la levée de l’état d’urgence."
De son côté, le Premier ministre, Ahmed Chafik, a déclaré que sa première priorité était de "restaurer la sécurité et de faciliter la vie quotidienne de la population". Il a également assuré que l'ex-président était toujours dans la station balnéaire de Charm el-Cheikh, au bord de la mer Rouge, démentant les rumeurs d'un départ à l'étranger.
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Dimanche toujours, près de 1 000 policiers ont par ailleurs défilé devant le ministère de l'Intérieur pour réclamer des hausses de salaires, de meilleures conditions de travail et la condamnation à mort de leur ancien ministre, Habib el-Adli, révoqué sous la pression de la rue à la fin de janvier. Accusés de corruption et méprisés par une grande partie de la population, les policiers ont souhaité se rassembler "pour leur honneur". "Nous ne sommes pas des traîtres", a-t-on entendu dans les cortèges. Ils ont assuré qu'ils avaient reçu des ordres pour réprimer avec brutalité les manifestations qui avaient débuté le 25 janvier.
Du côté des relations internationales, le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui a indiqué que le pays restait engagé par ses traités et obligations internationaux. Un message destiné à apaiser les inquiétudes des États-Unis et d'Israël quant au devenir des accords de paix israélo-égyptiens, qui font du Caire un partenaire incontournable des efforts de paix dans la région.