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Nouveau report en vue pour le procès des "barons" du cacao

Déjà plusieurs fois ajourné, le procès des "barons" ivoiriens du cacao pourrait de nouveau être reporté. L’accusation estime que l’absence de témoins clés entrave le bon déroulement des audiences.

"Nous sommes dix à la maison et c'est avec ça qu'on se nourrit." Tibor est producteur de cacao et, comme une frange importante des Ivoiriens, il tire de la petite fève brune une grande partie de ses revenus. Chaque année, le cacao rapporte au pays plus de 1,5 milliard d’euros, soit près de la moitié du budget de l’État.

La grande majorité des producteurs ivoiriens de cacao sont favorables au chef de l'État sortant Laurent Gbagbo, mais Alassane Ouattara, président reconnu par la communauté internationale, a récemment appelé à l'arrêt des exportations de cacao jusqu'au 23 février. Une mesure qui, dans un pays qui fournit un tiers de la consommation mondiale, a provoqué l'envolée du cours du cacao.

Dans ce contexte particulièrement sensible s’est ouvert, ce jeudi, le procès des anciens dirigeants de la filière alors que pèsent des soupçons de malversations massives. Mais le procès pourrait être de nouveau ajourné après une nouvelle demande de report de deux mois présentée par l’accusation.

L’accusation estime ce délai nécessaire en raison de la présence de témoins à l’étranger, parmi les 120 qui sont cités dans l’affaire. Cet ajournement, dont l’officialisation pourrait intervenir vendredi matin, s’inscrit dans une longue série de reports. Fin 2010, le procès a été repoussé à plusieurs reprises en raison de l’élection présidentielle et de la crise qui s’en est suivie.

Les anciens "barons" du cacao, parmi lesquels des proches de Laurent Gbagbo, risquent jusqu’à 20 ans de prison. Ils sont poursuivis pour "détournement de fonds, abus de confiance, abus de biens sociaux, escroquerie" mais aussi "faux et usage de faux en écriture privée de banque".

Lutte de pouvoir

Menée à la demande de Laurent Gbagbo en octobre 2007, l'enquête avait abouti, en juin 2008, à de nombreuses arrestations. Après deux ans et demi de détention provisoire, 22 des 25 prévenus ont été remis en liberté au début de janvier.

Ce n’est pas la première fois que la manne financière qui découle de la production de cacao est l’objet d’une lutte de pouvoir. Entre 2002 et 2007, elle avait constitué le nerf de la crise politico-militaire qui avait coupé le pays en deux. Au Sud, et dans une moindre mesure au Nord, des dizaines de millions de dollars avaient été détournés pour financer le conflit.

Aujourd’hui, le cacao, qui représente avec le café environ 20 % du PIB ivoirien, est l’un des enjeux de la lutte que se livrent les deux "hommes forts" de la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara.

Depuis le deuxième tour de la présidentielle du 28 novembre, le conflit qui les oppose a plongé le pays dans une grave crise. Laurent Gbagbo, président sortant, refuse de reconnaître la victoire de son rival Alassane Ouattara, actée par la quasi-totalité de la communauté internationale.