De violents affrontements ont opposé manifestants et forces de l'ordre dans plusieurs villes égyptiennes, ce mardi, lors de manifestations contre le régime de Moubarak. Le dernier bilan fait état de trois morts.
AFP - Deux manifestants et un policier ont trouvé la mort mardi lors de manifestations rassemblant plusieurs milliers d'Egyptiens, qui ont réclamé le départ du président Hosni Moubarak, une contestation inspirées par la révolte populaire tunisienne.
Deux manifestants sont décédés à Suez (nord de l'Egypte) après des heurts marqués par des jets de pierres contre la police, qui a répliqué avec des tirs de gaz lacrymogènes, selon des sources médicales et de sécurité.
Au Caire, un policier a succombé après avoir été battu par des manifestants lors d'un rassemblement dans le centre ville, selon la sécurité égyptienne.
Scandant "Moubarak dégage", "la Tunisie est la solution", des milliers d'Egyptiens ont paradé au Caire comme à Alexandrie (nord) et dans d'autres provinces du pays, face à un dispositif policier massif.
Selon des spécialistes, ces manifestations anti-gouvernementales étaient les plus importantes depuis les émeutes de 1977 provoquées par une hausse du prix du pain.
Le secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a toutefois assuré depuis Washington que le gouvernement égyptien, ferme allié des Etats-Unis au Moyen-Orient, était "stable".
Environ 15.000 personnes ont manifesté dans plusieurs quartiers du Caire, notamment aux abords des bâtiments officiels du centre-ville.
La police a utilisé des gaz lacrymogènes et des canons à eau pour tenter de disperser des milliers de personnes, en grande partie des jeunes, rassemblées sur la grande place Tahrir et ses environs en scandant "le peuple veut le départ du régime".
Au total, 20 à 30.000 membres des forces de l'ordre ont été mobilisés dans la capitale, selon la police.
Des manifestations ont également eu lieu dans de nombreuses villes du pays, de la Haute-Egypte au delta du Nil, en passant par le Sinaï.
Partout, les manifestants ont fait référence à la révolte populaire qui a fait tomber mi-janvier le président tunisien Zine El Abidine Ben Ali après 23 ans de pouvoir.
"Pain, Liberté, Dignité", scandaient certains, reprenant des slogans des manifestants tunisiens. "Moubarak dégage", criaient d'autres.
"Ces manifestations sont les plus importantes depuis 1977 non seulement par le nombre des participants et le fait qu'elles ont lieu dans tout le pays, mais aussi parce qu'elles touchent l'ensemble de la population", estime le politologue Amr al-Chobaki, de l'institut al-Ahram.
Le ministre de l'Intérieur, Habib al-Adli, a déclaré que les organisateurs des manifestations étaient "inconscients" et que les forces de l'ordre étaient "capables de faire face à toute menace".
Plusieurs groupes de militants pour la démocratie avaient appelé à descendre dans la rue pour faire de mardi, officiellement "Journée de la police", une "Journée de révolte contre la torture, la pauvreté, la corruption et le chômage".
L'idée a été fortement relayée, en particulier auprès des jeunes, à travers les réseaux sociaux sur internet. Sur Facebook, plus de 90.000 personnes s'étaient déclarées prêtes à manifester. Mais un site américain spécialisé a annoncé que le site de micro-blogs Twitter était inaccessible depuis l'Egypte mardi.
Les Frères musulmans et le Wafd, premier parti d'opposition laïque, ne se sont pas officiellement associés au mouvement, mais ont laissé leurs jeunes militants libres de s'y joindre.
Avec plus de 80 millions d'habitants, l'Egypte est le pays le plus peuplé du monde arabe, et plus de 40% de sa population vit avec moins de deux dollars par jour et par personne. Plusieurs immolations par le feu ont eu lieu ces derniers jours, rappelant celle d'un jeune Tunisien qui avait déclenché la révolte dans son pays.
Le président Moubarak, 82 ans, est au pouvoir depuis 1981. Une élection présidentielle est prévue en septembre, mais il n'a pas dit s'il se présenterait. Son fils Gamal, 47 ans, est donné comme un possible successeur.