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La Tunisie dans l'incertitude avant la formation d'un nouveau gouvernement

Trois membres de l'opposition tunisienne figureront dans le nouveau gouvernement qui doit être formé ce lundi. Tunis, la capitale, a été tout au long du week-end le théâtre d'affrontements entre forces de l'ordre et partisans du président déchu.

La composition du gouvernement d’union nationale devrait être annoncée ce lundi. Le Premier ministre, Mohammed Ghannouchi, a précisé dimanche soir sur FRANCE 24 que "les partis d'opposition ont accepté d'intégrer ce gouvernement". Ce qui "permettra d'avoir réellement un gouvernement d'union nationale" susceptible d'"accélérer le processus de réforme." Il devrait comprendre une vingtaine de ministres, dont des membres de la société civile et des dirigeants de l’opposition politique.

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Mohammed Ghannouchi, Premier ministre tunisien
La Tunisie dans l'incertitude avant la formation d'un nouveau gouvernement

D’après le chef historique du Parti démocratique progressiste (PDP, opposition), Ahmed Néjib Chebbi, ce gouvernement doit prendre ses fonctions pour six mois, soit pour une durée plus longue que celle initialement prévue de 60 jours. "Un accord est passé sur six mois pour mettre en œuvre les réformes constitutionnelles et législatives qui préparent à une élection neutre, sous l’égide d’un haut comité neutre et en présence des observateurs internationaux", détaille-t-il ce lundi matin sur FRANCE 24.

Trois dirigeants de l'opposition tunisienne vont figurer dans ce gouvernement : outre Ahmed Néjib Chebbi, au portefeuille de ministre du Développement régional, figurerait également dans l'équipe Moustafa Ben Jaafar, président du Forum pour le travail et la liberté, au ministère de la Santé, selon l’agence Reuters, et Ahmed Ibrahim, du parti Ettajdid, à l'Enseignement supérieur.

"Ben Ali sans Ben Ali"

Ce gouvernement d’union nationale n’est pas du goût de tous les acteurs politiques. "Nous ne reconnaîtrons pas le gouvernement d'union nationale, a déclaré sur FRANCE 24 Hamma Hammami, président du Parti communiste des ouvriers de Tunisie (PCOT), interdit dans le pays. Ce sera la continuité du régime de Ben Ali sans Ben Ali, avec simplement un décor démocratique plus large."

De son côté, Ahmed Néjib Chebbi assure que le gouvernement de transition ne sera pas entaché par la présence de personnes controversées. "Cette transition est négociée avec des forces politiques qui ont toujours résisté au régime de Ben Ali, et avec des hommes qui dans le régime de Ben Ali occupaient des fonctions ministérielles, mais ne sont nullement impliqués dans la répression ou dans la corruption. Ce sont des cadres politiques de l’État tunisien, compétents et propres."

L’une des premières mesures de ce nouveau gouvernement devrait être de "reconnaître" la légitimité de deux partis : le Parti communiste et le Congrès pour la République, formation politique dirigée par Moncef Marzouki, qui a annoncé, ce lundi, sur France Info son retour en Tunisie et son intention de se présenter à l’élection présidentielle.

Assaut sur le palais présidentiel

La principale artère de la ville, l’avenue Habib-Bourguiba, est quadrillée, ce lundi, par des policiers en armes et un véhicule blindé, alors que des centaines de manifestants, dont des membres du syndicat de l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), seule centrale syndicale du pays défilent dans la rue. "Les Tunisiens testent la liberté d'expression et de manifestation", commentent les envoyés spéciaux de FRANCE 24 à Tunis. La veille, sur cette même artère, des combats ont opposé des snipers cachés sur des toits d'immeuble aux forces armées acquises au gouvernement de transition.

Leïla Trabelsi a-t-elle embarqué 1,5 tonne d'or ?

La famille du président Ben Ali aurait pris la fuite avec 1,5 tonne d'or, affirme le journal Le Monde. Selon le quotidien, Leïla Trabelsi, la femme du président, "se serait rendue à la Banque centrale de Tunisie chercher des lingots d'or", et aurait essuyé un refus du gouverneur, avant qu'il ne cède sous la pression de Zine El Abidine Ben Ali. Cette information a été démentie par la Banque centrale de Tunisie.

La journée de dimanche a été marquée par l’arrestation de l’'ancien chef de la sécurité de Ben Ali, le général Ali Sériati, et par l’assaut donné par l’armée au palais présidentiel de Carthage contre des membres de la garde présidentielle du chef de l'État déchu. Lundi matin, l'armée garde l’entrée du ministère de l'Intérieur, et des barbelés ont été déroulés autour du bâtiment.

Tirs "imprévisibles" dans les rues de Tunis

L’un de nos envoyés spéciaux à Tunis, Cyril Vanier, a passé la nuit de dimanche à lundi dans un quartier populaire de Tunis, Haï el-Khadra. "Ici, on ne craint pas les pillages ni les destructions. Ce qui met ce quartier dans un état de psychose, ce sont les tirs imprévisibles, qui ont lieu de manière sporadique : des gens inconnus que tirent depuis une voiture et qui repartent aussitôt. Ces mêmes scènes ont été rapportées dans plusieurs quartiers de Tunis. Les gens érigent des barricades avec ce qu’ils trouvent : des poubelles, des chaises, des tables, et bloquent les rues. Ils se munissent de bâtons et de couteaux et veillent toute la nuit."

Dimanche soir, dans une déclaration téléphonique à la télévision publique, le Premier ministre a averti que les autorités de transition ne feraient preuve d'"aucune tolérance" envers ceux qui sèment le chaos dans le pays.

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