Salva Kiir a gravi les échelons de la rébellion sudiste pour devenir, en 2005, vice-président du Soudan. À l'issue du référendum organisé le 9 janvier 2011, l'homme au large chapeau pourrait être élu président d'un Sud-Soudan indépendant.
Salva Kiir Mayardit est à la fois premier vice-président de la République du Soudan - derrière le chef de l'Etat Omar el-Béchir - et président du gouvernement semi-autonome du Sud-Soudan. C'est aussi, et depuis la mort de l'homme politique et militaire John Garang, le chef du Mouvement populaire de libération du Soudan (MPLS) et le commandant en chef de sa branche armée, l'Armée populaire de libération du Soudan (APLS).
Tous ces titres pourraient cependant être relégués au second plan si les électeurs du Sud-Soudan se prononcent pour la partition du Soudan, lors du référendum du 9 janvier 2011.
Si le scrutin a bien lieu à la date prévue et se déroule dans le respect des règles, son résultat fait peu de doute, selon les analystes : le Sud va voter en faveur de la division du plus grand pays d'Afrique et Salva Kiir, autrefois considéré comme représentant d'un groupe sécessionniste, pourrait devenir le président du plus jeune État de la planète.
Un homme d'abord dans l'ombre de John Garang
Salva Kiir a succédé au leader sudiste historique John Garang, après sa mort dans un accident d'hélicoptère en 2005. Le nouvel homme fort du Sud incarne un style radicalement différent.
Né en 1951, Salva Kiir a rejoint la rébellion sudiste à l'âge de 17 ans. Après un détour par l'armée nationale dans les années 1970, il intègre le haut-commandement de l'APLS à sa création, en 1983. Militaire de carrière, sans aucune expérience politique ou diplomatique, il est propulsé en première ligne à la mort de John Garang, en 2005, dont il est alors le numéro deux.
Si cette nomination est conforme aux règles internes de l'APLS, elle a suscité des controverses au sein de l'organisation, certains de ses compagnons de route estimant qu'il n'avait pas l'étoffe nécessaire. Le soutien de la veuve de John Garang, Rebecca, a néanmoins grandement facilité son arrivée au pouvoir.
À la différence du charismatique Garang - un économiste formé aux États-Unis et brillant orateur -, Salva Kiir a gagné le respect de ses troupes à force d'effcacité et de discrétion sur le front. Depuis qu'il représente les intérêts du Sud-Soudan, il a acquis une réputation d'homme d'État humble et droit.
Séparatiste de cœur, depuis toujours
La différence - fondamentale - entre John Garang et Salva Kiir est sans doute l'aspiration de ce dernier à un Sud indépendant. John Garang avait épousé la cause de l'unité du Soudan et s'est même rêvé président d'un "Nouveau Soudan", Salva Kiir n'a jamais caché son désir de rompre avec le gouvernement de Khartoum.
À l'approche du référendum, Salva Kiir s'est plié à la ligne officielle, dictée par l'accord de paix inter-soudanais de janvier 2005, qui imposait aux leaders du Sud et du Nord d'œuvrer en faveur de l'unité du pays. Pourtant, ceux qui ont suivi l'ascension de Salva Kiir le décrivent comme un séparatiste de cœur.
Pendant des mois, il a mis en garde la communauté internationale, militant pour la tenue du référendum promis par Khartoum. Toute tentative de faire dérailler le processus provoquera le chaos et des violences à une échelle massive, a-t-il averti.
S'il devient président d'un nouveau Sud-Soudan indépendant, la diplomatie restera l'une de ses préoccupations principales. Car de nombreux dossiers - tels que le partage des revenus du pétrole entre le Nord et le Sud, la nationalité ou la délimitation des frontières - n'ont pas encore été réglés.