
En novembre 2009, l'ex-ministre de la Défense du gouvernement Balladur déclarait à la mission parlementaire sur l'attentat de Karachi avoir "le sentiment" que l'attaque était "une vengeance de personnes n'ayant pas touché leur part de commissions".
AFP - François Léotard, ministre de la Défense d'Edouard Balladur, faisait un lien en novembre 2009 devant la mission parlementaire sur l'attentat de Karachi, entre l'arrêt de versement de commissions et le mobile de l'attaque de mai 2002, a-t-on appris vendredi de source proche du dossier.
M. Léotard était en première ligne en tant que ministre de la Défense pour négocier le contrat franco-pakistanais Agosta en 1994, sur lequel Jacques Chirac a ordonné l'arrêt du versement de commissions dès son arrivée à l'Elysée en 1995.
Devant les députés de la mission parlementaire sur l'attentat de Karachi (Pakistan) du 8 mai 2002 (15 tués, dont 11 salariés français de la DCN), M. Léotard avait déclaré le 24 novembre 2009 : "Soit c'est Al-Qaïda, mais cela me paraît peu probable, compte tenu de la nature des explosifs utilisés, soit c'est une vengeance de personnes n'ayant pas touché leur part de commissions", selon le PV de son audition, publié par Mediapart.
"Je penche personnellement - mais c'est juste un sentiment - pour la deuxième hypothèse", avait ajouté l'ancien ministre, précisant que le ministère du Budget, occupé en 1994 par Nicolas Sarkozy, "avait un représentant à chaque réunion" consacrée à ce contrat de vente de sous-marins au Pakistan.
M. Léotard, retiré depuis de la vie politique, avait par contre ajouté qu'il ne "croyait pas une seconde" à un lien entre l'attentat et l'arrêt de rétrocommissions vers des décideurs français.
M. Léotard avait par ailleurs confié aux députés que les intermédiaires sur ce contrat "(leur) étaient recommandés par le gouvernement pakistanais mais faisaient l'objet de vérifications par les services de renseignement français, qui attestaient de leur fiabilité".
Plusieurs témoignages versés au dossier indiquent pourtant que le cabinet de M. Léotard a imposé dans la dernière ligne droite du contrat des intermédiaires libanais auxquels étaient promises de juteuses commissions.
"C'étaient principalement les membres de mon cabinet qui recevaient les négociateurs, François Lépine, qui était de mon directeur de cabinet, le général Mercier, Renaud Donnedieu de Vabres, Hervé Morin", avait précisé aux députés M. Léotard.
Interrogé vendredi sur France Info, M. Morin a menacé de porter plainte. "S'il (M. Léotard) venait à réitérer les mêmes déclarations, je demanderais les éléments de preuve et je porterais plainte dans la seconde", a averti celui qui vient de quitter le ministère de la Défense.
M. Donnedieu de Vabres avait pour sa part démenti le 29 novembre dans la Nouvelle République du Centre-Ouest avoir "négocié" le contrat Agosta.
"Oui, j'ai contacté un certain nombre d'émissaires et personnalités étrangères à l'époque, des ministres, Premiers ministres, car je m'occupais de l'environnement politique et diplomatique de ce dossier, mais je n'ai rien négocié, en aucune manière !", avait déclaré l'ancien conseiller spécial de François Léotard.
L'ancien Premier ministre, Dominique de Villepin, a pour sa part assuré lundi devant le juge chargé de l'enquête sur l'attentat, Marc Trevidic, qu'il n'y avait selon lui "aucun lien" entre l'arrêt des commissions décidé par Jacques Chirac en 1995 et l'attentat commis sept ans plus tard.