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L'épidémie de choléra se propage dans Port-au-Prince

L'épidémie de choléra qui touche Haïti depuis la mi-octobre a atteint mardi la capitale, Port-au-Prince, menaçant les quelque 3 millions d'habitants qui y vivent. Pour le gouvernement, la maladie est devenue un problème "de sécurité nationale".

L’épidémie de choléra qui sévit dans le nord du pays depuis la mi-octobre va probablement s’étendre à tout le territoire haïtien dans les prochains jours. Telle est en tout cas la crainte des autorités locales, qui tablent désormais sur une propagation extrêmement rapide de la maladie. Depuis son déclenchement, celle-ci a déjà fait 724 morts. 11 000 personnes seraient par ailleurs infectées, selon un dernier bilan officiel. Soit 81 morts et 1 000 infections de plus que les chiffres dévoilés 24 heures plus tôt.

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"Les consignes d'hygiène sont très strictes"
L'épidémie de choléra se propage dans Port-au-Prince

Mardi, le directeur général du ministère haïtien de la Santé, Gabriel Thimoté, en charge de la cellule d’urgence haïtienne, a convoqué les journalistes pour faire part de son inquiétude. "Nous sommes sortis de la simple urgence humanitaire, nous considérons aujourd’hui qu’il en va de la sécurité nationale", a-t-il déclaré.

Quatre morts à Port-au-Prince

La sonnette d’alarme a été tirée après que la bactérie - hautement contagieuse - a touché la capitale où des millions de sinistrés s’entassent dans des camps de fortune. Les chiffres les plus récents font état de quatre morts et de quelque 70 malades à Port-au-Prince.

Pour contrer le fléau, le gouvernement tente de prendre les devants, mais les efforts qu'il déploie ne suscitent, pour l'instant, qu'un certain scepticisme. "Le pays renforce sa campagne de sensibilisation auprès de la population. Du matériel médical et des sérums ont été envoyés dans tous les départements du pays, même ceux épargnés par le choléra. Mais le gouvernement sait que cela ne suffira pas. L'État, les ONG et l'ONU doivent se mobiliser", commente, sur place, Amélie Baron, correspondante de RFI pour France 24.

Une analyse partagée par Blandine Contamin, responsable du service urgences à Médecins du monde. "Les Haïtiens ne sont pas préparés à l’épidémie alors que nous nous attendons au pire… Nous sommes donc là pour les soigner, mais aussi pour former le personnel médical. Il faut que nous soyons prêts en cas de scénario catastrophe."

"Une maladie inconnue pour les Haïtiens"

S'il n'en est pas encore question à Port-au-Prince, une certaine panique est cependant perceptible au sein de la population. "Les Haïtiens doivent faire face à une maladie inconnue puisque le choléra avait été éradiqué dans le pays. Ils ne réagissent donc pas

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"Les patients présentant les symptômes du choléra sont nombreux"

toujours comme il le faudrait", explique Antoine Petibon, responsable des opérations internationales de la Croix-Rouge.

Selon les indicateurs dont il dispose, la situation devrait  inéluctablement empirer. La précarité qui prévaut dans de nombreux camps à travers tout le pays est accentuée par les volumes d'eau - vecteur du choléra - accumulés lors du passage de l'ouragan Tomas en fin de semaine dernière. "Nous déployons de vastes campagnes d’hygiène, nous démarrons des projets ambitieux car nous allons vers une épidémie majeure, qui risque de s’installer pour plusieurs années", s’alarme-t-il. Les chiffres officiels ne représentent que la partie immergée de l’iceberg. "Au début de l’épidémie, l’OMS (Organisation mondiale de la santé, NDLR) prévoyait déjà l'infection de 100 000 personnes et le décès de plus de 10 000 individus. Ces prévisions sont sûrement revues à la hausse aujourd’hui."

Appliquer les consignes d’hygiène reste donc la priorité absolue : boire beaucoup, se laver fréquemment les mains, bien cuire tous les aliments. Si elles sont respectées, ces recommandations devraient permettre d’endiguer rapidement la maladie. Mais la tâche s'avère extrêmement délicate. "Plus d’un million de personnes vivent les unes sur les autres dans les camps de Port-au-Prince. Elles partagent les mêmes toilettes, les mêmes points d’eau... Il s'agit des conditions idéales pour que le choléra se propage", conclut Cyril Vanier, envoyé spécial de France 24 dans le pays.