, envoyé spécial à Abidjan – Dans quelques heures, les Ivoiriens sont appelés aux urnes pour élire leur président. Dans les rues des principales villes du pays, l’armée et la police se sont déployées pour assurer la sécurité d'un scrutin qualifié d'historique.
Ils sont plus de 10 000 - policiers et gendarmes ivoiriens, soldats de l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (Onuci) et militaires français - sur le qui-vive ce samedi, à la veille du premier tour de l'élection présidentielle ivoirienne que tout le pays attend depuis plus de 5 ans.
Au lendemain du dernier jour de la campagne électorale qui a vu des milliers d’électeurs converger vers les meetings politiques des trois principaux candidats - le président sortant Laurent Gbagbo, l'ex-Premier ministre Alassane Ouattara et l'ex-chef de l'État Henri Konan Bédié - la Côte d’Ivoire vit en effet au rythme d’un scrutin à haut risque.
À Abidjan, l’envoyé spécial de France24, Willy Bracciano, a pu constater que des membres du Centre de commandement des opérations de sécurité (Cecos) sillonnent la capitale économique ivoirienne. Un millier de gendarmes, policiers et militaires y sont déployés, postés aux points stratégiques de la ville et sur ses grands axes routiers. Dans le nord, fief de l’opposition au pouvoir de Laurent Gbagbo, ce sont d’anciens rebelles qui assurent la sécurité, parfois accompagnés de soldats de l’armée régulière.
Preuve que le scrutin de dimanche est placé sous une étroite surveillance, les quelque 9 500 soldats de l’Onuci ainsi que ceux de l’armée française sont également mobilisés.
Grand-messe et "parade de la paix"
Hier, le dernier jour de la campagne électorale a été décrété férié afin de permettre aux retardataires de récupérer leurs cartes d’identité et d’électeur. Les trois grands favoris du scrutin en ont, eux, profité pour mobiliser leurs troupes. Objectif : remporter la guerre des images...
Mission accomplie pour le chef de l’État et candidat du Front populaire ivoirien (FPI) qui a tenu son dernier meeting dans un stade Houphouët-Boigny archi-comble. Dès 7 heures du matin, des milliers de ses partisans ont convergé vers le lieu de rendez-vous, armés de leurs incontournables sifflets. Sous l’œil vigilant des forces de l’ordre, un cortège incessant de supporters pro-Gbagbo s’est déployé tout au long de la journée aux abords du stade en scandant son slogan favori : "On va installer Gbagbo ! Y’a rien en face !"
Une foule qui est loin d’impressionner Moussa, partisan d’Alassane Dramane Ouattara (dit ADO). "Si tous les gars du RDR [Rassemblement des républicains] descendaient d’Abobo et de Yopougon pour venir ici, il y aurait plus de monde." Pour son dernier tour de piste, l’ancien Premier ministre a parcouru plusieurs quartiers d'Abidjan debout dans une voiture. Le long du boulevard Valéry-Giscard-d’Estaing, les sympathisants du RDR ont attendu cette "grande parade de la paix" en se trémoussant joyeusement sur les refrains de leur hit, "ADO Solutions"... tout en invectivant gentiment les passagers des bus du FPI qui passaient - par hasard ? - à proximité. Les amabilités fusent : "Gbagbo, président voleur" pour les uns, "ADO Saucission" pour les autres.
Au siège du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) en revanche, dans la commune de Cocody, à Abidjan, l’ambiance était plus calme, l’ex-chef de l’État Henri Konan Bédié ayant réservé sa grand-messe finale à la ville de Grand Lahou, dans le sud-ouest du pays.
{{ scope.legend }}
© {{ scope.credits }}Mais, à Abidjan, tout le monde n’a pas pu venir applaudir son candidat. Toute la journée, des centaines de personnes ont fait la queue devant l’Office national de l’identification pour récupérer leurs cartes d’identité et d’électeur, documents indispensables à quiconque entend prendre part au scrutin de dimanche. Selon les chiffres que la Commission électorale indépendante (CEI) a rendu public mercredi, 85 % des inscrits avaient retiré leurs papiers à Abidjan, mais seulement 45 % en province.
À moins de 24 heures de l’ouverture des 20 000 bureaux de vote répartis dans le pays, de nombreuses interrogations planent encore sur le bon déroulement du scrutin. Au centre des inquiétudes : le décompte manuel et électronique des voix, l’acheminement des résultats et la formation ainsi que le déploiement des quelque 60 000 agents électoraux de la CEI sur l’ensemble du territoire.
En dépit de ces aléas logistiques toutefois, le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU en Côte d’Ivoire, Choi Young- jin, a estimé jeudi qu’il n’y avait plus aucun obstacle sur la route de la présidentielle, censée mettre un terme à dix années de crise. "La Côte d’Ivoire est prête pour l’élection, et le vote se déroulera sans entrave à la date indiquée."