
Le calme est revenu en Guinée après un week-end marqué par des violences entre les partisans des deux candidats à l’élection présidentielle. La Commission électorale propose ce mardi que le second tour de la présidentielle ait lieu le 31 octobre.
Leader de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), Cellou Dalein Diallo, issu de l'ethnie peule, est arrivé en tête du premier tour, le 27 juin, recueillant 43,62 % des suffrages. Premier ministre de décembre 2004 à avril 2006, il fut, pendant de longues années, un cacique du Parti de l’unité et du progrès (PUP) de l'ancien président Lansana Conté, avant de rejoindre l’opposition. Considéré comme l’un des principaux opposants à l'ex-chef de la junte Moussa Dadis Camara, il fut grièvement blessé lors du massacre du 28 septembre 2009 à Conakry, dans lequel plus de 150 personnes ont trouvé la mort.
Le président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) de Guinée a proposé ce mardi que le second tour de l'élection présidentielle ait lieu le 31 octobre. Initialement prévu le 19 septembre puis décalé au dimanche 24 octobre, le scrutin avait une nouvelle fois été reporté vendredi, quatre mois après le premier tour du 27 juin.
En marge de ces atermoiements politiques, la tension est montée d’un cran dans le pays. Lundi, outre des mesures de sécurité exceptionnelles décidées par les autorités, les rassemblements politiques ont été interdits par le gouverneur de Conakry. Car si un calme relatif règne dans le pays, le week-end dernier a été marqué par des violences entre les partisans des deux candidats en lice pour le deuxième tour, Cellou Dalein Diallo, qui a recueilli 43 % des voix au premier tour, et Alpha Condé, crédité alors de 18 %.
Redoutant un nouvel embrasement du pays, Amnesty International a dénoncé l'"usage excessif de la force" par l'armée et la police qui ont tiré à balles réelles pour disperser des manifestants dans la capitale.
Les récentes tensions ont par ailleurs ravivé la rivalité ancestrale entre les deux principales communautés du pays, les Peuls et les Malinkés.
"Les Guinéens sont des gens pacifiques en général"
"Bien que présentes, les tensions ethniques n’expliquent pas tout" tempère le journaliste indépendant Saliou Sy Savane, selon lui "il existe en Guinée des zones de contact ou on assiste à un brassage ethnique". Invité sur l’antenne de France 24, il assure que les appels au calme "peuvent faire retomber la tension car les Guinéens sont des gens pacifiques en général".
Candidat du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG), Alpha Condé, qui appartient à l'ethnie malinké, est arrivé en deuxième position au premier tour de scrutin, avec 18,25 % des voix. Opposant historique des deux premiers chefs de l'État guinéen, Sékou Touré (1958-1984) et Lansana Conté (1984-2008), il a déjà participé à deux présidentielles, en 1993 et en 1998. Longtemps exilé en France, incarcéré au lendemain de la présidentielle de 1998, il a été condamné en 2000 à cinq ans de prison pour "atteintes à l’autorité de l’État et à l’intégrité du territoire national", avant d’être gracié en 2001.
Le général malien Siaka Toumany Sangaré, nommé récemment à la présidence de la Commission indépendante des élections, a lancé dimanche "un appel solennel au peuple guinéen et surtout aux deux candidats pour qu'ils fassent tout pour que le calme revienne dans toutes les localités".
"Si jamais la crise perdurait et allait en s’amplifiant, l’armée pourrait apparaître comme un recours pour certains" analyse Saliou Sy Savane, qui assure que c’est donc aux civils "de faire preuve de maturité afin de faire en sorte qu’on tourne la page de l’armée dans ce pays."
Le journaliste invoque également la communauté internationale, qui a, selon lui," toujours un grand rôle à jouer en Guinée". "Elle doit continuer de peser de tout son poids pour qu’on aille vers des élections transparentes car les rumeurs de fraude s’amplifient."