La chancelière a affirmé samedi que la société multiculturelle allemande "avait échoué". Une sortie très controversée qui s'inscrit dans le cadre d'un combat politicien au sein de la coalition gouvernementale, selon la presse locale.
Ce week-end, la chancelière chrétienne démocrate (CDU), Angela Merkel, a enterré le multiculturalisme allemand. "Il a échoué, et bien échoué", a-t-elle affirmé devant les jeunes conservateurs de son parti, samedi.
"La CDU a ressorti des tiroirs son thème favori, l’intégration", s’est inquiété dimanche le quotidien de gauche "Süddeutsche Zeitung". Le journal regrette surtout qu'Angela Merkel fasse ainsi écho aux propos tenus par le président du Land de Bavière, le très conservateur Horst Seehofer.
Samedi encore, le chef de file de la CSU (l’Union des chrétiens sociaux) a en effet publié, dans l'hebdomadaire "Focus", un plan en 7 points visant à mettre un terme à l’immigration en Allemagne. "Nous n’avons pas vocation à être l’assistant social de tous les immigrés du monde", pouvait-on lire, notamment, sous sa plume.
Profil plus à droite
Pour le quotidien "Die Zeit", cette sortie témoigne d'une volonté de la CSU de retrouver sa puissance d'antan. "Il y eut une époque où la CSU fut un parti puissant, Horst Seehofer tente de le remettre au centre des débats en jouant à fond la carte du populisme", peut-on y lire notamment. Un populisme teinté, cette fois, cependant, de xénophobie et d’islamophobie. Horst Seehofer propose en effet de cesser d'accueillir les immigrés "d’une autre culture". "En clair, il ne veut plus de Turcs, de musulmans et d’Arabes en Allemagne", déplore l’éditorialiste du journal.
Reste une question : pourquoi Angela Merkel s'est-elle immiscée dans ce débat, alors que l’Allemagne digère mal les débordements antisémites et racistes d’un ancien membre de la banque centrale, Thilo Sarrazin ? Le quotidien libéral "Die Welt", qui rappelle ce lundi que la chancelière est de plus en plus contestée au sein de la CDU, croit avoir la réponse. "Elle cherche à se construire un profil plus à droite, tout en essayant de contenir ses extrêmes", explique celui-ci.
Si celle-ci a pris ses distances avec Horst Seehofer en affirmant qu’il n’était nullement question d’interdire aux musulmans de venir s’installer en Allemagne, elle plaide toutefois pour que les immigrants "fassent des efforts pour mieux s’intégrer". "Angela Merkel s'est lancée dans un exercice d’équilibriste. En flirtant avec des thèses extrémistes sans les endosser, elle se replace au centre d’un débat qui, sinon, lui aurait totalement échappé", analyse le quotidien conservateur "Frankfurter Allgemeine Zeitung".
Preuve, toutefois, qu'il s'agit avant tout d'un débat politicien pour la plupart des médias : "Le principal syndicat de l’industrie soutient que le problème n’est pas l’immigration mais le manque de 400 000 travailleurs qualifiés à l'Allemagne", rappelle "Die Zeit".
Crédit photo : Arne List (via Flickr)