Après les succès électoraux du mouvement populiste des Démocrates de Suède et de la formation islamophobe de Geert Wilders (photo) aux Pays-Bas, les partis d'extrême droite confirment leur percée au sein du Vieux Continent. Analyse.
Après avoir promis le soutien de ses 24 députés siégeant au Parlement néerlandais depuis juin, le Parti de la liberté (PVV) de Geert Wilders a obtenu de la coalition au pouvoir l'interdiction de la burqa et le durcissement de la législation sur l'immigration. Une victoire de taille pour le leader populiste et xénophobe par ailleurs poursuivi pour incitation à la haine raciale.
Percées électorales
Cet événement consacre l’influence directe d’un parti qui se situe à droite de la droite traditionnelle sur le pouvoir exécutif. Mais il n’est pas le premier du genre en Europe. Suède, Danemark, Norvège, Autriche, Belgique, Royaume-Uni, Suisse, Lituanie, Italie, France, Bulgarie et
Hongrie. Dans chacun de ses pays, des partis de la droite radicale ont progressé voire même enregistré des résultats à deux chiffres lors d'élections. Des succès qui leur permettent de jouer un rôle d’arbitre dans certains parlements du Vieux Continent. Pour l'hebdomadaire américain "Newsweek", ce phénomène "représente la plus importante secousse connue par le continent depuis la fin du communisme".
L’exemple le plus récent est intervenu en Suède. Le parti d’extrême droite, les Démocrates de Suède (SD), a recueilli 5,7 % des voix lors des législatives de septembre.
Un score qui, pour la première dans l’histoire du pays, leur a ouvert les portes du Parlement. "Les résultats électoraux de ces partis sont spectaculaires aux yeux des médias et de l’opinion car ils changent la donne politique d’un pays à travers des alliances ou en arbitrant les débats parlementaires comme en Suède", précise Sylvain Crépon, sociologue spécialiste des questions relatives à l’extrême droite au sein du laboratoire Sophiapol de l’université Paris Ouest-Nanterre.
11-Septembre, caricatures de Mahomet, crise économique...
Des électeurs qui sont aussi plus à l’écoute de discours radicalisés en temps de crise économique et de chômage. "La crise pousse une certaine frange de
l’électorat à se replier derrière un discours identitaire nationaliste ce qui provoque ce qu’on appelle le vote sanction ou d’humeur contre les gouvernants", explique Sylvain Crépon. Pour ne pas perdre de voix, certains dirigeants n’hésitent pas à durcir ou à "droitiser" leur politique. "Le président français, Nicolas Sarkozy, à la recherche d'un nouvel élan populiste pour relancer une aura politique en berne, a lancé une campagne de violentes accusations et d'expulsions forcées visant la minorité rom", a jugé "Newsweek". L’hebdomadaire a illustré la une de son édition européenne datée du 4 octobre, consacrée au "nouvel extrémisme en Europe"... avec la photo du chef de l'État français.
Extrême droite ou droite nationale-populiste ?
Outre l’islam et la crise, le rejet des élites et des partis au pouvoir est un élément fédérateur qui trouve un écho auprès des électeurs. Il s’agit d’un des thèmes phares du populisme qui cherche à montrer un visage plus "light" que l’extrême droite. Contrairement aux héritiers de l’extrême droite classique et idéologique tels
le Front national en France, qui a obtenu près de 12 % des voix au premier tour des régionales de 2010, certains partis européens sont en effet issus, comme aux Pays-Bas, d’une mouvance plus libérale ou conservatrice.
Une image plus lisse, un discours plus contrôlé et la légitimisation de certains de leur discours, comme la lutte contre l’immigration, thème largement récupéré par la droite républicaine, leur permet de séduire certaines franges de l’électorat. "L’exemple de Wilders est significatif car il ne vient pas du milieu de l’extrême droite traditionnelle. Ce qui ne l’empêche pas d’osciller entre nationalisme, xénophobie et populisme en prétendant défendre des idées libérales, note Sylvain Crépon, en référence à la lutte contre l’homophobie et à la défense du droit à l’avortement prônées par le leader populiste néerlandais. Le défi majeur des démocraties européennes consiste à proposer des solutions efficaces contre l’alliance des idées libérales et de la xénophobie."