Bruxelles menace de lancer, mi-octobre, une procédure d'infraction contre Paris pour non-transposition d'une directive sur la libre circulation. La France n’est, en revanche, pas poursuivie pour discrimination à l’égard des Roms.
Après plusieurs heures de discussions, la Commission européenne a décidé de lancer une procédure d’infraction contre la France devant la Cour européenne de justice. Elle lui reproche d’avoir mal transposé dans son droit la directive de 2004 sur la libre circulation des travailleurs. C’est ce qu’a annoncé, ce mercredi sur FRANCE 24, la commissaire à la Justice, Viviane Reding, à l’issue de la réunion.
La France n’est, en revanche, pas poursuivie pour discrimination à l’égard des Roms – la Commission estime ne pas avoir suffisamment d’éléments à sa disposition pour prendre une décision et demande à Paris un complément d’information.
"La Commission s’en sort bien, la France aussi"
Après des semaines de vives tensions entre la France et la Commission – Viviane Reding s’est montrée très critique envers la politique d’expulsion des Roms du gouvernement – Bruxelles adopte aujourd’hui un semblant de compromis qui permet aux deux parties de garder, pour l'instant, la tête haute.
"La Commission s’en sort bien", analyse Caroline de Camaret, spécialiste de l’Europe à FRANCE 24, elle réaffirme son rôle de "gardienne des traités". La France "s’en sort également bien car cette procédure n’est pas particulièrement vexatoire, ajoute-t-elle. Des poursuites pour non-transposition, il y en a beaucoup."
À l’annonce de la décision de la Commission, la France s’est d’ailleurs réjouie. Elle s’est félicitée de ne pas être poursuivie pour discrimination et qu’aucune procédure ne soit engagée précisément "à propos des mesures d’éloignement de citoyens européens prises à la suite de l’évacuation de campements illégaux depuis le début du mois d’août".
Le dossier de la discrimination "n’est pas clos"
Dans le dossier de la non-transposition de la directive de 2004, la France va simplement devoir "transposer cette directive dans sa législation", explique Caroline de Camaret. La Commission estime que la loi française ne mentionne pas toutes les garanties inscrites dans la directive en matière de règles à respecter quand un pays renvoie des citoyens de l'UE chez eux…C’est donc d’une façon indirecte que Bruxelles s’attaque aujourd’hui à la politique de Nicolas Sarkozy à l’égard des Roms, faute de pouvoir l’accuser frontalement
itde discrimination envers cette communauté.
Mais le dossier de la discrimination "n’est pas clos", a rappelé Viviane Reding sur France 24. Elle réfute l’idée d’un "compromis".
"Nous avons besoin de plus d’informations (…), nous pouvons lancer une procédure d’infraction contre un pays uniquement quand nous avons toutes les preuves". La commissaire demande donc à Paris de lui fournir les "documents des expulsions, du passage devant le juge de toutes les personnes qui ont été expulsées cet été", pour déterminer s’il y a eu discrimination ou non envers les Roms et décider s’il faut ouvrir une nouvelle procédure d’infraction devant la Cour.
Renoncement ou simple sursis ?
Renoncement ou sursis ? Les deux options sont possibles. Pour Bruxelles, il peut s’agir d’un recul stratégique, d’attendre de disposer d’un dossier plus solide avant de présenter l’affaire à la Cour. La Commission ne peut en effet pas se permettre de perdre en justice car "sa crédibilité est en jeu" face à un pays comme la France, explique Caroline de Camaret.
Mais cette décision peut aussi être un véritable signe d’apaisement et peut vouloir dire que la Commission ne souhaite pas s'engager dans un nouveau bras de fer avec la France après des semaines de tension.
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