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En Afghanistan, l’ex-sportive de haut niveau Robina Jalali se présente aux élections législatives de samedi prochain. Malgré les menaces et les intimidations, la jeune femme était prête à tout pour devenir députée. Portrait...

Les affiches de Robina Jalali qui tapissent les murs de Kaboul, la capitale afghane, détonnent parmi celles des candidatures des seigneurs de guerre, des ex-moudjahidins, des intégristes religieux et des hommes d’affaires véreux qui visent un siège au Parlement.

Cette ancienne sportive de haut niveau fait partie des 408 femmes, sur environ 2 500 candidats, à se présenter aux élections législatives du 18 septembre. Combative de nature et bien décidée à mener ses ambitions à leur terme, elle a tout mis en oeuvre pour ne pas être stoppée dans son élan.

Parcours d'une combattante

Elevée sous le régime taliban, cette jeune femme de 25 ans n’a d'abord pas hésité à braver l’interdiction pour toute femme de faire du sport afin de devenir athlète. Après la chute du régime en 2001, elle a poursuivi son rêve jusqu’aux Jeux olympiques d’Athènes, puis de Pékin. Et peu importe si elle est respectivement arrivée avant-dernière et dernière de l'épreuve sur 100 mètres.

Les élections en chiffres
  • Deuxièmes législatives depuis 2001
  • Plus 10,5 millions d'électeurs appelés aux urnes
  • 2 500 candidats
  • 249 députés
  • 68 sièges réservés aux femmes
  • 9 menaces sur 10 concernent des femmes
  • 6835  bureaux de vote
  • 1000 pourraient être fermés pour raison de sécurité

Désormais, elle veut prouver qu’en sport, comme en politique, tout est possible pour une Afghane – célibataire, qui plus est, dans un pays où le mariage est la règle. Au terme d’une campagne active à Kaboul et dans ses environs, elle espère accéder à l’un des 249 sièges de la Wolesi Jirga, la Chambre basse du parlement afghan, où 68 sièges sont réservés aux femmes.

"Je voulais montrer au pays entier qu’une fille ou une femme peut faire ce qu’elle veut, notamment travailler aux côtés des hommes pour l’Afghanistan", écrit-elle sur son site officiel de campagne.

L’égalité entre hommes et femmes fait partie des grandes lignes de son programme - au même titre que la promotion du sport, l’éducation, la jeunesse et la lutte contre la corruption. "L’élection ne concerne pas que les riches, mais l’ensemble de la population afghane", explique-t-elle dans une interview accordée à la télévision de l’Otan.

Si elle affiche sur son compte Facebook une photo d’elle en train de serrer la main du président Hamid Karzai, Robina Jalali s’est tenue à  l’écart des grands partis, menant son combat politique en tant que candidate indépendante. "Je ne représente aucun parti ou organisation politique, ni groupe ethnique ou tribal. Je refuse. Je veux être une représentante indépendante du peuple qui comprend ce que ce dernier ressent ", poursuit-elle.  

Une campagne à risques pour les candidates

Sa campagne n'a pas été sans heurts. Comme d’autres candidates, Robina Jalali a été victime d’intimidations et de sabotages. Affiches arrachées, coups de téléphones anonymes et menaces physiques ont ainsi jalonné ses derniers mois en tant que candidate. Rien d’aussi dramatique, cependant, que le sort réservé aux cinq militants assassinés par un mouvement islamiste, le 29 août, pour avoir soutenu la candidate Fawzia Gilani.

La Fondation pour des élections libres et justes en Afghanistan (Fefa) a révélé, dans un rapport publié en août 2010, que les femmes continuent de faire face à des "obstacles  démesurés" à leur participation politique. En effet, sur 10 candidats menacés, 9 sont issus de la gent féminine.

"Dans la plupart du pays, il est plus difficile pour une femme de mener une campagne politique, non seulement à cause de l’insécurité et du harcèlement, mais aussi du fait des inégalités systémiques", note les auteurs dudit rapport, qui imputent ces menaces aux Taliban, ainsi qu’aux candidats rivaux (chefs locaux et autres hommes de pouvoir intégristes) opposés à toute forme de participation des femmes à la vie publique.

Les menaces et les intimidations n’ont cependant pas arrêté le combat de l’ex-sprinteuse, qui a mené sa campagne jusqu’à son terme officiel, le jeudi 16 septembre. Si Robina Jalali excellait sur 100 mètres, c’est dans la cadre d'une course de fond qu’elle s’est distinguée, cette fois-ci.