
Le président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, a suspendu ce matin la séance-marathon sur l'examen de la réforme des retraites. La prochaine séance est prévue à 15 heures, sans certitude quant au maintien du vote solennel du texte.
En marge des débats à l'Assemblée, le président de l'Assemblée nationale Bernard Accoyer a affirmé, lors d'un point presse, avoir "pris tout seul" et "la conscience tranquille" la décision de suspendre la séance-marathon sur les retraites afin de mettre fin à "l'obstruction" de l'opposition. "Cette décision, je l'ai prise moi-même", a-t-il déclaré en réfutant tout contact avec le président de la République à ce sujet.
"Je suis un parlementaire qui a aussi été sur les bancs de l'opposition. J'ai pratiqué l'obstruction", a-t-il expliqué. Et de poursuivre : "Mon honneur aura été de modifier profondément ce règlement (...) pour qu'il n'y ait plus dans cette Assemblée d'obstruction". Il fait ainsi référence aux modifications du règlement qui braquent l'opposition (temps d'intervention imparti à chaque groupe pour les débats...). Les députés PS ne sont "pas encore habitués à ce règlement", a-t-il conclu.
L’Assemblée nationale n’aura jamais vécu une séance aussi houleuse pour l’examen d’un projet de loi. Contre toute attente, le président de l'Assemblée nationale Bernard Accoyer (UMP) a mis un terme au débat après la fin de l'examen des 33 articles de la réforme des retraites. Débutée à 16 heures la veille, la séance-marathon aura duré plus de 17 heures.
Mais la séance était loin d'être terminée puisqu'après l'examen du texte, pas moins de 165 députés PS, PCF, Vert et Parti de gauche étaient inscrits pour s'exprimer à tour de rôle à l'occasion d'une explication de vote individuelle. Ce qui devait prolonger la séance de treize heures, à raison de cinq minutes par député, et ainsi retarder le vote sur le texte.
"Je ne laisserai pas, au travers de petites manœuvres, l'obstruction qui est paralysante et dévalorisante pour notre Parlement, se réinstaller", a lancé Bernard Accoyer, après la fin de l'examen du texte, devant un hémicycle survolté. Il a ensuite convoqué une prochaine séance à 15 heures, heure initialement prévue pour le vote solennel sur l'ensemble du projet de loi de réforme des retraites. "Démission !", ont alors scandé les députés de gauche en colère, en sortant dans les couloirs du Palais-Bourbon.
"C’est sans précédent, s’insurge Christian Paul, député PS de la Nièvre, interrogé par l’envoyé spécial de France 24 au Palais-Bourbon, Christophe Dansette. Le président de l’Assemblée nationale a interdit de parole une centaine de députés qui étaient inscrits – et c’est un droit constitutionnel - pour exprimer leur position personnelle sur le texte". Et de poursuivre : "Bernard Accoyer a interrompu les débats de façon totalement arbitraire car il trouvait que le débat était trop long et que ça bousculait le calendrier fixé autoritairement par le président de la République".
L’opposition appelle à la démission d’Accoyer
Le groupe PS à l'Assemblée, qui a annoncé qu'il comptait se "battre jusqu'au bout", au nom des Français, "majoritairement hostiles" selon lui à la réforme, dénonce "le comportement autoritaire du président de l’Assemblée nationale", et a demandé "sans délai" sa démission. Un peu plus tôt, Martine Aubry avait prié "solennellement" Accoyer de reprendre la séance à l'Assemblée.
Une majorité de Français (57 %) demande l'abandon du passage de l'âge légal de la retraite de 60 à 62 ans, selon un sondage BVA pour Les Échos et France Info publié ce mercredi. Les deux tiers des Français (66 %) jugent par ailleurs insuffisantes les concessions sur la pénibilité ou les carrières longues faites après la journée de grèves et de manifestations du 7 septembre. Cette opinion est partagée par 48 % des sympathisants de droite.
Dans le même temps, les syndicats vont marquer le coup avec un rassemblement face à l'Assemblée nationale à partir de 12h30. Tous les dirigeants syndicaux, dont Bernard Thibault, François Chérèque ou Jean-Claude Mailly, se retrouveront autour de militants syndicaux d'Ile-de-France pour une initiative qui se veut "très visuelle".
Selon Bernard Thibault, "le message que nous voulons faire passer, c'est que ce n'est pas parce que l'Assemblée nationale aura voté que le combat va s'arrêter". Pour l'intersyndicale, le 15 septembre est une étape avant la grande journée de grèves et de manifestations du 23 septembre, dont elle veut faire un tremplin pour amplifier la protestation contre la réforme portée par le ministre du Travail Éric Woerth.