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La droite poursuit son offensive sécuritaire et propose de sanctionner les maires "laxistes"

Le ministre de l'Industrie, Christian Estrosi, souhaite faire payer une amende aux élus qui n'assureraient pas la sécurité dans leur ville. Les maires de Grenoble et Lille, Michel Destot et Martine Aubry, dénoncent des propos "outranciers".

Après les Roms, les auteurs de crimes contre les forces de l'ordre, les parents de mineurs délinquants ou les personnes polygames, les maires sont à leur tour la cible du discours répressif du gouvernement. Et c'est cette fois le ministre de l'Industrie et maire de Nice, Christian Estrosi, qui mène l'offensive. Après avoir déclaré "être Français ou voyou, il faut choisir", le 8 août sur Europe 1, il suscite à nouveau la polémique en proposant de sanctionner les maires qui n'assureraient pas la sécurité dans leur commune.

"Je propose que les municipalités qui ne se conforment pas à leur obligation de sécurité, de prévention de la délinquance, de lutte contre l'absentéisme scolaire et de réformes des règles d'urbanisme soient condamnés à une très forte amende", a -t-il déclaré dans le Journal du Dimanche (JDD). Il affirme s'inspirer de la loi, votée par les socialistes, qui sanctionne les maires des communes de plus de 5 000 habitants qui ne construisent pas suffisamment de logements sociaux.

Martine Aubry et Michel Destot, "mauvais élèves"

"Il se trouve que la législation actuelle, et c'est Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, qui l'a voulu dès 2007, place le maire au centre de cette lutte contre l'insécurité. Or, dans toutes les villes de France, on note des disparités énormes sur l'application de cette loi", a ajouté Christian Estrosi. Il n'hésite pas, d'ailleurs, à pointer du doigt ceux qu'il considère comme les "mauvais élèves" : la secrétaire nationale du Parti socialiste (PS) Martine Aubry d'abord, qui "ne veut pas de caméras de surveillance" à Lille, puis le maire socialiste de Grenoble Michel Destot, qui "ne fait rien pour sécuriser sa commune et se plaint que tout explose". Bon point en revanche pour Manuel Valls, qui "joue pleinement son rôle de maire" à Evry.

Les élus ont aussitôt réagi, pour dénoncer des propos "outranciers" et "mensongers" visant à masquer l'échec du gouvernement en matière de sécurité. "Dois-je rappeler que depuis mon élection, les effectifs de la police municipale ont augmenté de 41% quand, depuis 2002, ceux de la police nationale baissaient de 17%? a rétorqué le maire de Grenoble, Michel Destot, dans un communiqué. Dois-je rappeler que si des faits graves se sont déroulés à Grenoble, la délinquance est en baisse dans ma ville comme le président de la République et le ministre de l'Intérieur l'ont eux-mêmes signalés ?"

Alors que Christian Estrosi a mis en avant les "excellents résultats" obtenus en matière de sécurité dans sa ville, Michel Destot a affirmé que l'obligation de 20 % de logements sociaux n'était pas respectée à Nice. "J'appelle le ministre de l'Industrie à se concentrer prioritarement sur son domaine de compétence et à ne pas se disperser, après le triste record de destruction d'emplois en 2009", a-t-il ajouté.

Baisse des effectifs de la police nationale

Un député UMP veut "moraliser" l'allocation de rentrée scolaire

Si Christian Estrosi veut sanctionner les maires "laxistes" en matière de sécurité, le député UMP de l'Oise, Edouard Courtial, souhaite "contrôler les devoirs" des bénéficiaires de l'aide sociale. Il a proposé ce dimanche que l'allocation de rentrée scolaire soit versée sous forme de bons d'achats, et non plus par virement bancaire. L'aide "est manifestement dévoyée par certaines familles"qui l'utilisent "pour s'acheter un téléviseur" ou d'autres biens n'ayant "rien à voir avec l'école", a-t-il estimé dans le JDD. Sa proposition de loi a été signée par 115 députés de la majorité.

En 2009, 2,9 millions de familles modestes ont reçu une allocation de rentrée comprise entre 280 et 307 euros.

L'adjoint à la maire de Lille chargé de la sécurité et de la prévention de la délinquance, Roger Vicot, a lui rappelé que les maires travaillaient en concertation avec les préfets, les procureurs ou l'Education nationale depuis 1999 dans la ville dirigée par Martine Aubry, et que plus de 4 000 caméras de vidéosurveillance sont installées dans Lille. "Nous sommes pour la vidéosurveillance là où ça fonctionne, dans les lieux fermés comme le métro ou les parkings", a-t-il précisé.

"La sécurité est une mission régalienne de l'Etat, a insisté Roger Vicot. Ce ne sont pas les maires qui décident de supprimer des effectifs de la police nationale. Et c'est bien Nicolas Sarkozy qui est aux manettes des questions de sécurité depuis 2002."

Le parti socialiste a invité le ministre de l'Industrie à "prendre des vacances". "Il en aura besoin pour la rentrée sociale qui se prépare", assure le PS dans un communiqué.

Les maires de Bondy, Gilbert Roger, de Sevran, Stéphane Gatignon, ou de Lyon, Gérard Collomb, ont également exprimé leur mécontentement après cette attaque du gouvernement. "Aucun maire n'est laxiste, a par exemple affirmé Stéphane Gatignon au JDD. Mais chacun fait ce qu'il peut". L'une des critiques est venue de l'UMP : le vice-président de l'Assemblée, Marc Laffineur, a regretté que "des membres du gouvernement puissent stigmatiser les élus locaux ou les maires".