Depuis Grenoble, le président français a souhaité que les personnes d'origine étrangère puissent être déchues de leur nationalité en cas d'atteinte aux représentants de l'ordre public. Opposition et associations s'offusquent.
Mêlant clairement insécurité et immigration, Nicolas Sarkozy a prononcé un discours musclé, vendredi, à Grenoble (Isère). Le chef de l'État français a annoncé une nouvelle batterie de mesures censées permettre de lutter contre la délinquance, en menaçant notamment de démettre de leur nationalité les personnes d'origine étrangère ayant porté atteinte à un représentant de l'ordre public. Une déclaration critiquée par l'opposition et les organisations de défense des droits de l'Homme, mais saluée par une partie de la majorité.
Après les graves violences qui ont éclaté à la mi-juillet dans le quartier de la Villeneuve, à Grenoble, le numéro un français s'est rendu dans la capitale iséroise pour assister à l'installation du nouveau préfet de la région, Éric Le Douaron, qui est aussi un ancien policier. L'occasion pour Nicolas Sarkozy de répéter qu'il était "en guerre" contre la délinquance.
Déchéance de nationalité
"La nationalité doit pouvoir être retirée à toute personne d'origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d'un fonctionnaire de police, d'un militaire de la gendarmerie ou de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique", a déclaré le président français depuis la préfecture, avant d'ajouter que l'acquisition de la nationalité française par un mineur délinquant au moment de sa majorité ne devrait plus être automatique.
itLe chef de l'État a ensuite proposé que les peines plancher, qui ne concernent actuellement que les récidivistes, soient élargies dès la rentrée parlementaire à toutes les formes de violences aggravées, et notamment aux violences sur des personnes dépositaires de l'autorité publique. Une peine incompressible de 30 ans de prison pourrait également être instaurée pour les assassins de gendarmes ou de policiers, et la responsabilité pénale des parents de mineurs délinquants pourrait être engagée en cas de "négligence manifeste".
Concernant l'immigration, Nicolas Sarkozy a souhaité que l'on "évalue les droits et prestations" auxquelles ont accès les étrangers en situation irrégulière. "Une situation irrégulière ne peut conférer plus de droits qu'une situation régulière et légale", a-t-il estimé.
Il a répété que tous les clandestins seront reconduits à la frontière. "Nous subissons les conséquences de 50 années d'immigration insuffisamment régulée, qui ont abouti à un échec de l'intégration, a jugé le président français. Nous sommes si fiers de notre système d'intégration ! Peut-être faut-il se réveiller pour voir ce qu'il a produit. Il a marché. Il ne marche plus."
Une mesure de "bon sens" pour l'UMP
Les responsables politiques d'opposition ont aussitôt dénoncé des propos "inacceptables", destinés à récupérer une partie de l'électorat d'extrême-droite lors de la présidentielle de 2012. "Menacer de déchoir de leur nationalité les Français d’origine étrangère auteurs de certains crimes renvoie aux heures les plus sombres de notre Histoire, a par exemple critiqué le député socialiste Pierre Moscovici. Il est désormais clair que, dans l’esprit du chef de l’État, il y a une sous-catégorie de Français qui ne méritent pas les mêmes droits que les 'Français de souche'".
"Il y a autour de la nationalité française un certain nombre de droits et de devoirs à respecter, a précisé de son côté le porte-parole du parti, Dominique Paillé, sur FRANCE 24. On perd les droits quand les devoirs ne sont pas accomplis. [La déchéance de la nationalité dans ce cas-là] est une mesure de bons sens. Le président prend en main la question de la lutte contre la délinquance, sur laquelle il a obtenu de très bons résultats. La délinquance prend des visages nouveaux qui nécessitent une réponse énergique et rapide."
Lors de son déplacement, Nicolas Sarkozy a également promis l'envoi d'une quarantaine de policiers supplémentaires à Grenoble et du matériel approprié à la lutte contre le grand banditisme.