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Une juge fédérale de Phoenix a suspendu les points les plus controversés de la loi sur l'immigration votée en avril par l'État d'Arizona. En juin, l'administration Obama avait vertement contesté la légitimité du texte.
AFP - La justice a suspendu mercredi les points les plus controversés de la loi sur l'immigration de l'Arizona, qui banalise selon les critiques le délit de faciès, à la demande de sept plaignants, dont l'administration Obama, en première ligne dans ce dossier.
La juge fédérale de Phoenix Susan Bolton a estimé dans une décision rendue publique à la veille de l'entrée en vigueur de la loi que l'Etat fédéral avait "de bonnes chances de l'emporter sur le fond".
L'administration Obama avait rejoint début juillet six plaignants pour contester en justice quatre articles de cette loi qui a provoqué un tollé lors de son adoption fin avril par l'Arizona, Etat américain frontalier du Mexique.
Une des dispositions bloquées prévoyait qu'un policier puisse vérifier la légalité de la présence aux Etats-Unis d'une personne lorsque celle-ci a été arrêtée pour une infraction.
En vertu de cet article, un policier pouvait demander ses papiers à une personne s'il existait "un soupçon suffisant que cette personne est illégalement présente aux Etats-Unis", une disposition assimilée par ses détracteurs au délit de faciès.
Les autres sections bloquées créaient de nouveaux délits pour n'avoir pas fait de demande de régularisation, n'avoir pas de papiers en règle, ou encore chercher ou exercer un emploi lorsqu'on est en situation illégale.
Selon la juge Bolton, ces dispositions pourraient constituer "un préjudice irréparable" pour les Etats-Unis.
Après le scandale provoqué par l'adoption de la loi le 23 avril, et les protestations en mai du président mexicain Felipe Calderon, Barack Obama avait promis d'"examiner de près" cette législation.
Malgré plusieurs sondages attestant que plus de 60% de la population américaine était en faveur de la loi, une plainte a été déposée début juillet par le ministère américain de la Justice.
"Même si les Etats peuvent exercer leur pouvoir politique de manière à ce qu'ils aient une influence directe ou indirecte sur les étrangers, un Etat ne peut pas établir de son propre fait une politique de l'immigration", affirme-t-il.
"La constitution et la loi fédérale sur l'immigration n'autorisent pas le développement d'un patchwork de politiques locales de l'immigration à travers le pays", poursuit le ministère.
Lors d'une audience réunissant les parties le 22 juillet à Phoenix, John Bouma, l'avocat de Jan Brewer, la gouverneure républicaine de l'Arizona qui défend ardemment la loi, avait rétorqué que la loi migratoire "n'interférait en rien avec (la politique) fédérale".
Il avait nié tout encouragement au délit de faciès. "Si on décidait de contrôler tous les gens qui ont l'air hispaniques, ce serait ingérable", avait-il dit.
"Alors la loi aurait dû le stipuler (dès le départ)", avait répondu la juge Bolton, en référence aux changements que Jan Brewer a dû opérer en urgence sur le texte pour gommer les formulations les plus controversées.
Des milliers de personnes convergeaient vers Phoenix où devait se tenir une manifestation jeudi, jour d'entrée en vigueur de la loi. Un tiers des 6,6 millions d'habitants de l'Arizona ne sont pas nés aux Etats-Unis et quelque 460.000 selon les estimations sont en situation irrégulière.
Les autorités de l'Arizona estiment être dépassées par le nombre d'illégaux, qui augmentent selon elle le taux de délinquance et grèvent les ressources de l'Etat.
Mais pour Pablo Alvarado, directeur d'une organisation créée contre la loi, celle-ci est "une mesure raciste, discriminatoire et hypocrite qui cible ceux-là mêmes qui travaillent pour les gens qui s'expriment contre les sans papiers".