Avant le déplacement de François Fillon au Japon, aucun membre du gouvernement n'avait osé prononcer le mot rigueur. De Nicolas Sarkozy à Christine Lagarde, ils se sont tous donnés beaucoup de mal pour l'écarter de leur vocabulaire.
François Fillon. L’homme qui a osé le terme lors de son déplacement au Japon n’a pas toujours été aussi clair dans son choix des mots. Il n’y a pas si longtemps, le 6 mai, le Premier ministre claironnait qu’il n’y avait "pas de plan de rigueur et qu’il n’y en aurait jamais". Il venait alors d’annoncer un gel des dépenses publiques. En mars 2008, il avait entonné le même refrain que le Président (cf ci-dessous). François Fillon avait alors estimé qu’il était plus juste de parler de "mesure d’économie" et non pas de rigueur.
Christine Lagarde. La ministre de l’Économie a frappé les esprits avec sa "rilance". Un néologisme qui est la contraction de relance et de rigueur. Elle l’a prononcé le 4 juillet pour qualifier la politique française de sortie de crise. Pour la patronne de Bercy, il s’agirait d’un "subtil dosage [...] qui consiste en réalité à réduire la dépense publique là où ce sera le moins douloureux pour la perspective de relance de l'activité économique". Un ingénieux moyen aussi pour ne pas lâcher le mot qui fâche.
Nicolas Sarkozy. Le président de la République a toujours réfusé de parler de rigueur. Encore lors de son allocution télévisée du 11 juillet, il a préféré évoqué une "République rigoureuse". L’adjectif plutôt que le mot lui-même ? Il y a dans la bouche de Nicolas Sarkozy une différence : "Etre rigoureux, cela veut dire qu’on revient à l’équilibre [du budget de l’État]". Depuis le début de la crise économique, il évite le terme rigueur comme la peste. En mars 2008, alors que le climat économique commençait sérieusement à se dégrader, le président affirmait déjà dans un entretien au "Figaro": "Je ne crois pas au plans de rigueur, ils ne mènent à rien."
Frédéric Lefebvre. Le porte-flingue de la Sarkozye et porte-parole de l’UMP a été le précurseur de la "République rigoureuse" reprise par le chef de l'État. Il l’a utilisé pour la première fois pour recadrer un autre ténor de l’UMP. En l’occurrence, Jean-François Copé, chef de file du parti majoritaire à l’Assemblée, qui avait osé, lors d’une interview à Europe 1 le 10 mai, parler de rigueur, parce qu'"après tout on ne va pas se battre pour des mots". Et bien si justement, lui a rétorqué dans la journée Frédéric Lefebvre. "En langage économique, rigueur veut dire augmentation des impôts, je ne parlerais donc pas de rigueur car nous avons fait le choix de la réduction de la dépense. C’est une politique rigoureuse."