
Avant le Mondial, la Fifa avait insisté sur l’importance du fair-play pendant le tournoi. Mais entre ses aspirations et le comportement des joueurs, il y a parfois un monde. Retour sur les plus grosses escroqueries de la Coupe du monde 2010.
"Le slogan de la Fifa depuis des années est ‘Mon jeu est fair-play’ et nous faisons totalement confiance aux 32 équipes participantes pour jouer honnêtement." Le 19 juin, lorsque le porte-parole de la Fifa, Nicolas Maingot, rappelle les fondamentaux éthiques de la compétition à la presse, l’allusion est presque transparente. Celui-ci a, en point de mire, un sulfureux Uruguay-Mexique (3e match du Groupe A), dans lequel un nul suffirait au bonheur des deux sélections.
Pour l’anecdote, l’Uruguay s’impose 1-0 et termine à la première place du groupe A. L’honneur du Mondial est sauf.
À quelques heures de la finale, un constat s’impose toutefois : le fair play qui a régné au cours de cette rencontre est loin d'avoir été la règle de cette Coupe du monde. À défaut de s’être illustrés dans le jeu, les footballeurs ont, en effet, rivalisé d’ingéniosité pour tenter de duper les arbitres.
Retour sur les exemples les plus frappants d’antijeu, de tromperie et d’hypocrisie observés sur les pelouses sud-africaines ces trois dernières semaines.
20 juin 2010 - Luis Fabiano : pas vu, pas pris !
Grand artisan du succès du Brésil sur la Côte d’Ivoire (3-1), l’attaquant de la Seleçao Luis Fabiano n’a pas hésité à faire des pieds et des mains pour porter son pays en huitièmes. L’enchaînement est inédit : main gauche, bras droit, pied gauche, but. Reste que cet accès spontané de "thierry-henryte" aiguë n’a pas déstabilisé outre mesure le buteur brésilien, qui a même eu le bon goût d’en rajouter après la rencontre : "C'est vrai, le ballon a frappé ma main, puis a touché mon épaule […]. C'est donc une main sainte, de Dieu. Je crois que c'est l'un des plus beaux buts que j'ai marqués".
Pour l’arbitre du match, le Français Stéphane Lannoy, la pilule est difficile à avaler : "J’ai eu un doute quant à l’endroit où il avait contrôlé le ballon […], alors je suis allé l’interroger après le but. Il m’a alors dit ‘chest’ qui, en anglais, signifie poitrine [source : lequipe.fr]."
20 juin 2010 - Le show Keita
Difficile soirée pour M. Lannoy. À l’approche du coup de sifflet final, le match entre le Brésil et la Côte d'Ivoire s’est considérablement durci. Dans l’entrejeu, Kaka, visiblement agacé par la proximité de Kader Keita au marquage strict, le repousse légèrement de l’épaule. L’ancien Lyonnais, dans un élan théâtral, s’écroule sur la pelouse et se tord de douleur. Stéphane Lannoy n’hésite pas et sort un carton jaune. Le second de la partie pour le stratège auriverde.
Avec le recul, l’arbitre français n’est plus tout à fait convaincu par sa décision : "En regardant les images, il faudrait être idiot pour ne pas voir que Kader Keita en rajoute trois tonnes […]. J’aurais dû exclure Kader Keita pour cette simulation [source : lequipe.fr]."
27 juin 2010 - De bonne foi ?
En huitièmes de finale de la compétition, l’Allemagne affronte l’Angleterre. Sur le terrain, le choc tient toutes ses promesses. À la 38e minute, alors que les Anglais sont menés 2-1, Lampard décoche une superbe frappe qui s’écrase sur la transversale avant de rebondir près d’un mètre derrière la ligne de but de Neuer. Le gardien allemand ne tergiverse pas, récupère le ballon et le relance dans la foulée...
Une stratégie probablement décisive. "Je n’ai regardé que le ballon, je l’ai vite capté et j’ai vite relancé […]. Peut-être que j’ai contribué à ce que le but ne soit pas validé", a-t-il admis par la suite, précisant tout de même qu’il n’avait eu confirmation de la validité du but que "lors du contrôle anti-dopage".
27 juin 2010 - Carlos Tevez : pas vu pas pris non plus !
Quelques heures plus tard, le "dimanche noir" de l’arbitrage se confirme. L’ultime choc de la journée oppose l’Argentine au Mexique. À la demi-heure de jeu, Carlos Tevez, hors jeu de plus de deux mètres dans la surface, hérite d’un ballon au point de penalty. Le buteur de l’Albiceleste catapulte le cuir dans les filets mexicains et célèbre son but comme si de rien n’était.
À la fin du match, interrogé par le journal espagnol La Razon, il s’explique de manière édifiante : "Je suis clairement hors-jeu. Il n’y a pas de controverse, mais j’ai faim de gloire avec ce maillot et ce soir, j’ai montré ce que je pouvais faire en sélection."
2 juillet 2010 - Suarez, gardien par intérim
Johannesburg, 2 juillet, environ 23h. En quarts de finale du premier Mondial africain de l’histoire, le Ghana, dernier représentant du continent, pousse dans les ultimes minutes des prolongations. À la 120e minute de jeu, Adiyah reprend un ballon de la tête que ne parvient pas à stopper le portier uruguayen.
Le cuir file vers le but mais, sur sa ligne, l’attaquant Luis Suarez effectue une claquette digne des plus grands gardiens et stoppe le ballon. La suite est écrite : Suarez est logiquement expulsé, le Ghana manque son penalty et s’incline ensuite aux tirs aux buts.
Au pays, le geste de Suarez, relevant pourtant de l’antijeu caractérisé, est accueilli comme un don divin. "Un dirigeant (de la Fédération uruguayenne) m'a demandé de dire que c'était la main de Dieu et de la Vierge Marie, c'est comme ça que le voient les Uruguayens !", reconnaît sans honte le sélectionneur. Et Suarez lui-même confirme : "J’ai ma main de Dieu désormais."