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Après 52 ans de dictature, la Guinée va connaître sa première élection présidentielle démocratique, ce dimanche. Le candidat qui sera désigné aura la lourde tâche de sortir le pays du marasme dans lequel il est plongé depuis de longues années.

Les Guinéens sont appelés aux urnes, ce dimanche, pour élire leur président au cours d’un scrutin présenté comme la première élection libre, démocratique et transparente du pays depuis son accession à l’indépendance, en 1958. Une course au fauteuil présidentiel qui a suscité pléthore de vocations. Le 24 mai, la Cour suprême a validé 24 candidatures sur les 36 dossiers reçus.

Parmi elles ne figure aucun militaire. Une première dans le pays. Mais on y trouve, pêle-mêle, une femme, quatre anciens Premiers ministres et six hommes d’affaires. Revue de détails des principales têtes d’affiche.

Les favoris

Alpha Condé, 72 ans, l’opposant historique

Opposant historique des deux premiers présidents de la Guinée, Sékou Touré (1958-1984) et Lansana Conté (1984-2008), Alpha Condé a déjà participé à deux élections présidentielles, en 1993 et en 1998. Il a en revanche boycotté celle de 2003, comme de nombreux autres opposants, considérant que le scrutin manquait de "transparence".

Devenu un symbole pour toute une frange de la jeunesse ouest-africaine, le président du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG) est considéré comme l’un des hommes politiques les plus honnêtes de son pays. Il est vrai que celui-ci n’a jamais accepté de composer avec le pouvoir. Longtemps exilé en France, incarcéré au lendemain de la présidentielle de 1998, il a été condamné en 2000 à cinq ans de prison pour "atteintes à l’autorité de l’État et à l’intégrité du territoire national", avant d’être gracié en mai 2001.

Cellou Dalein Diallo, 58 ans, le technocrate

 Ancien Premier ministre de décembre 2004 à avril 2006, Cellou Dalein Diallo fut, pendant de longues années, un cacique du Parti de l’unité et du progrès (PUP) de Lansana Conté. Limogé, il rejoignit l’opposition, au sein de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG).

Ancien banquier, plusieurs fois ministre, technocrate rompu aux négociations avec les bailleurs de fonds, Cellou Dalein Diallo s’est construit une image de bon gestionnaire qu’il parvient pour l’instant à préserver, en dépit de l’apparition de son nom dans une affaire de malversation financière. Considéré comme l’un des principaux opposants à l'ex-chef de la junte guinéenne Moussa Dadis Camara, il fut grièvement blessé lors du massacre du 28-Septembre à Conakry, dans lequel plus de 150 personnes ont trouvé la mort.

Sidya Touré, 65 ans, "Sidya Courant"

 À l’instar de Cellou Dalein Diallo, Sidya Touré passe pour un gestionnaire efficace. À l’occasion de son passage à la primature entre 1996 et 1999, l’actuel président de l’Union des forces républicaines (UFR) a gagné un surnom, "Sidya Courant", pour avoir rétabli l'efficacité des services publics, notamment électriques, dans le pays.

Auparavant, l’homme s’était construit une carrure d’homme d’État en Côte d’Ivoire, pays où il a vu le jour en 1946. Sidya Touré y a vécu de l’intérieur le lent crépuscule du père de l’indépendance ivoirienne, Félix Houphouët-Boigny, occupant notamment le poste de directeur de cabinet de son dernier Premier ministre, Alassane Dramane Ouattara (1989-1993). Comptant parmi les rares hommes politiques à ne pouvoir se reposer sur une base régionale ou ethnique solide, il n’a cessé, pendant la campagne, de se poser en candidat "de tous les Guinéens".

Les outsiders

Lansana Kouyaté, 60 ans, l’homme du consensus

 Le fondateur du Parti de l’espoir pour le développement national (PEDN) a fait son apparition sur l’échiquier politique guinéen en février 2007, lorsque le président Lansana Conté, alors confronté à de violentes manifestations qui ont fait une centaine de morts à Conakry, le nomme Premier ministre "de consensus" sous la pression de la rue. Auparavant, Lansana Kouyaté  n’avait jamais occupé de hautes fonctions dans le pays.

Diplomate de carrière, il a d'abord occupé plusieurs postes d’ambassadeur, avant de rejoindre l’ONU, puis le secrétariat exécutif de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao).

François Lonsény Fall, 61 ans, le diplomate

Ex-ambassadeur de Guinée à l’ONU (2000-2002), ancien ministre guinéen des Affaires étrangères (2002-2004), François Lonseny Fall a brièvement occupé le poste de Premier ministre pendant deux mois, en 2004, avant d’en démissionner avec fracas, arguant qu’il ne pouvait travailler avec le chef de l’État.  Diplomate de carrière au carnet d’adresses bien fourni, François Lonsény Fall s’exile alors aux États-Unis, où il renoue avec ses premiers amours en intégrant l’administration onusienne.

Il ne revient en Guinée qu’à la mort de Lansana Conté, en décembre 2008. Après le putsch de Moussa Dadis Camara, il rejoint le forum des Forces vives, un mouvement regroupant des organisations de la société civile et différents partis de l’opposition guinéenne, dont il devient le porte-parole en janvier dernier, puis crée son propre parti, le Front uni pour la démocratie et le changement (Fudec).