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Bart De Wever, l’artisan du renouveau du régionalisme flamand

Le leader du parti séparatiste N-VA est considéré comme le principal vainqueur du scrutin de dimanche. Retour sur un personnage hors du commun qui a mis de l’eau dans son vin séparatiste.

Personnage haut en couleur, le président du N-VA (Nouvelle Alliance flamande), Bart De Wever est considéré en Belgique comme l’artisan de la revanche des nationalistes flamands. "Il a su transformer les restes de feu la Volksunie [parti séparatiste flamand disparu en 2001, ndlr] en grand parti régionaliste flamand", confirme Regis Dantoy, spécialiste des partis politiques belges au Cevipol à Bruxelles (Centre d’études de la vie politique).

Il a réussi à ancrer son parti dans le jeu politique démocratique belge. Et l’homme ne fait pas peur, à l’inverse des dirigeants de l’autre parti séparatiste, le Vlaams Belang, qui défraient la chronique. Pourtant à regarder de plus près le CV de Bart De Wever, l’électeur moyen pourrait avoir des sueurs froides.

Poignée de main à Jean-Marie Le Pen

L’homme est littéralement né dans la politique en 1970 à Mortsel en Flandres. Son père, un vieux routier des mouvements séparatistes et même sympathisant du VNV (parti idéologiquement proche du nazisme) l’inscrit à la Volksunie dès la naissance. Difficile, donc, pour Bart De Wever d’échapper à son destin politique.

Il pense à une carrière d'historien lors de ses études à l’université catholique de Louvain, mais la fibre politique le rattrape très vite. Il est ainsi rédacteur en chef, entre 1991 et 1992, d’une feuille de chou dont les idées flirtent avec celles des milieux catholiques traditionnalistes. A la sortie des études en 1996, il s’illustre en serrant la main au leader frontiste français Jean-Marie Le Pen…

Mais depuis son entrée officielle en politique, il aurait changé. "Il s’est assagi avec le temps, et il est depuis 2004 le garant de l’engagement démocratique du N-VA", résume Regis Dantoy. Bart De Wever est d’ailleurs l’artisan du cartel flamand, une alliance de gouvernement entre son parti et les chrétiens démocrates qui durera jusqu’en novembre 2008. "Pendant cette période, il a joué sur les deux tableaux : être dans le gouvernement tout en le critiquant, raconte Regis Dantoy. C’est un stratège politique hors pair."

Un fin tacticien doublé d’un personnage éminemment charismatique. Il participe à une émission de télé-réalité baptisée "L’homme le plus connu en Flandres". Il monte également des opérations médiatiques comme conduire un camion rempli de faux billets pour dénoncer le "scandale" du transfert d’argent de la Flandres vers la Wallonie. Bref, il fait parler de lui. "C’est un personnage populaire qui flirte avec le populisme", confirme Regis Dantoy.

Positionnement ambigu

Pour ratisser large, il fait des œillades à l’électorat radical du Vlaams Belang. Ainsi en janvier 2010 il pose en couverture du magazine très populaire "P Magazine" sur laquelle on voit la nouvelle miss Belgique piétiner le drapeau belge. "Pour gagner il ne pouvait pas s’aliéner les électeurs d’extrême droite, c’est pourquoi il a un positionnement plus qu’ambigu", reconnaît Regis Dantoy.

Reste que sa victoire va maintenant l’obliger à jouer le jeu des tractations de gouvernement. "Son principal défi va être d’expliquer à son électorat que ses réformes vont prendre plus longtemps que ce qu’il promettait à ses électeurs", juge Regis Dantoy. Mais qu’on ne s’y trompe pas, pour le politologue le but ultime de Bart De Wever demeure la scission de la Flandre.