Un dernier rapport parlementaire sur l'attentat de Karachi en 2002 n'écarte pas le lien entre l'arrêt des commissions sur la vente de sous-marins en 1994 au Pakistan et l'attaque qui a tué 11 Français. Mais l’affaire reste opaque.
AFP- L'hypothèse d'un lien entre l'arrêt du versement de commissions sur la vente de sous-marins en 1994 au Pakistan et l'attentat de Karachi en 2002, qui a tué 11 Français, ne peut être écartée, selon un rapport parlementaire publié mercredi.
En revanche, il n'y a "pas de certitude" sur l'existence d'éventuelles rétrocommissions dans la mesure où cette hypothèse repose sur "des témoignages fragiles", selon le rapport sur les circonstances ayant entouré l'attentat du 8 mai 2002 contre des salariés de la Direction des constructions navales (DCN).
Le rapport de la mission d'information sur l'attentat de Karachi a été adopté à l'unanimité par la commission de la Défense de l'Assemblée Nationale, selon son président Guy Tessier (UMP). Il a souligné devant la presse que cette mission, composée de cinq députés (deux UMP, un Nouveau Centre, un PS et un PCF), a été confrontée à "l'amnésie" d'anciens ministres auditionnés.
La vente de sous-marins Agosta en 1994 au Pakistan "s'est accompagnée du versement de commissions", légales à l'époque et qui se sont "vraisemblablement" élevées à 10,25% du contrat, soit 550 millions de francs (environ 84 millions d'euros), indique le rapport, transmis à l'AFP.
Ces commissions ont été négociées via deux circuits, le premier représentant 6,25% du contrat et destiné à "des personnalités politiques pakistanaises" et le second en mai ou juin 1994 avec "l'irruption soudaine et plus qu'étrange" de deux intermédiaires "à la demande du cabinet du ministre de la Défense" (François Léotard, ndlr) et qui ont obtenu 4%, selon le rapport.
"Sur demande expresse du président de la République" Jacques Chirac, le versement des 4% a été annulé vers la fin de 1995 ou au début de 1996", ajoute t-il.
"Le lien entre l'arrêt de versement de certains FCE (commissions, ndlr) et l'attentat ne peut être écarté", selon le rapport, notant que la piste islamiste est également "plausible".
Selon un rapport interne à la DCN, l'interruption du versement des commissions par M. Chirac a été décidé en raison de soupçons de rétrocommissions qui auraient pu servir à financer la campagne électorale d'Edouard Balladur.
"L'absence de preuve ne signifie pas que de telles rétrocommissions aient été absentes du contrat mais rien pour l'heure ne permet d'étayer cette thèse", selon le rapport.
Le rapporteur socialiste de la mission, Bernard Cazeneuve, avait dénoncé le 28 avril l'attitude de "l'exécutif", affirmant n'avoir "jamais" rencontré "autant de difficultés" pour mener à bien son travail.
Pour M. Teissier, l'"entrave n'a pas été systématique". "Il est vrai que les parlementaires toutes tendances confondues ont fait part de leurs difficultés à obtenir des informations", a-t-il ajouté.
Selon lui, la mission a "consulté tous les anciens ministres, François Léotard, Charles Millon, Pierre Joxe... et le président de la mission (Yves Fromion, UMP, ndlr) a estimé qu'il y avait un mal qui répandait la terreur chez tous les anciens ministres qui était l'amnésie".
M. Teissier, qui n'était pas membre de la mission, a jugé que "la piste des commissions ne trouve pas de fondement". "Il semblerait qu'à l'heure d'aujourd'hui, la piste qui semble être privilégiée comme étant probablement la plus sérieuse soit la piste islamiste", a-t-il dit.