logo

Le lieu de sépulture du président Kaczynski fait polémique

Lech Kaczynski doit être enterré dimanche à Cracovie, dans la crypte de la cathédrale du château du Wawel, le panthéon des grands hommes de Pologne. Des centaines de personnes ont manifesté mercredi soir contre cette décision.

AFP - Le choix du Wawel à Cracovie, panthéon des grands hommes de Pologne, comme lieu de sépulture du président polonais Lech Kaczynski, est venu briser l'unité manifestée dans tout le pays depuis sa mort samedi dans un accident d'avion.

Le président conservateur et son épouse Maria doivent être enterrés dimanche dans la crypte de la cathédrale du château du Wawel de l'ancienne capitale de Pologne, en présence de dirigeants du monde entier dont les présidents américain Barack Obama et russe Dmitri Medvedev.

"Le couple présidentiel reposera à côté du maréchal (Jozef) Pilsudski", le père de l'indépendance de la Pologne en 1918, avait précisé mardi l'archevêque de Cracovie (sud), le cardinal Stanislaw Dziwisz.

Manifestations, groupes de protestation sur des réseaux sociaux et sur facebook, commentaires d'intellectuels : un tournant est visible en Pologne, après quatre jours de deuil et de larmes dans une communion apparemment sans faille.

Après une première manifestation à Cracovie mardi soir, une autre a rassemblé 800 personnes, selon la PAP, dans la même ville. "Ne déshonorez pas le Wawel !", était-il écrit sur une pancarte, selon des images retransmises par la télévision.

Environ 200 personnes étaient rassemblées à Varsovie mercredi soir contre le projet, ont constaté des journalistes de l'AFP. Les protestataires sont également sortis dans les rues à Poznan (ouest) et à Gdansk (nord).

Une jeune Varsovienne brandissait une affiche avec l'inscription : "Je soutiens l'appel d'Andrzej Wajda !". Le cinéaste polonais Andrzej Wajda, auteur du film "Katyn" sur le massacre d'officiers polonais en URSS en 1940, est allé jusqu'à appeler mercredi l'Eglise à retirer sa décision.

"Je suis venue ici car le Wawel est une nécropole des rois de Pologne et des gens d'une réputation comparable à celle des poètes (Adam) Mickiewicz et (Juliusz) Slowacki", a indiqué à l'AFP Aleksandra Kozlowska, 55 ans, une économiste de Varsovie

M. Kaczynski devrait être le premier président de la nouvelle république polonaise, née de la chute du communisme en 1989, à reposer au Wawel.

Le grand quotidien de centre gauche Gazeta Wyborcza épinglait une décision "hâtive et émotionnelle" qui allait "sûrement diviser les Polonais" : "une inhumation au Wawel devrait être le résultat d'une discussion nationale (...). Ce serait alors démocratique et digne".

Le créateur d'un réseau social de l'internet ayant rassemblé mercredi soir 35.000 signatures, se présentant comme Piotr, a déclaré à l'AFP par courrier électronique que malgré tout son "respect pour M. Kaczynski" il voulait présenter une "opinion différente".

Semblant prendre ses distances, le président libéral en exercice Bronislaw Komorowski a précisé que la décision était celle de la famille et des autorités de l'Eglise "sans intervention du gouvernement".

Une précision qui désigne tout naturellement le frère jumeau de Lech Kaczynski, Jaroslaw, chef du parti d'opposition conservatrice Droit et Justice (PiS) dont on ne sait encore s'il se présentera à la présidentielle.

Le cardinal Dziwisz a lui même semblé vouloir désamorcer par avance une polémique en annonçant la nouvelle, disant que "la discorde ne sert personne" et souhaitant que "ces obsèques et ce lieu unissent" les Polonais.

"Au 19e et 20e siècles le Wawel est devenu le plus haut panthéon national et le choix de ceux qui doivent y reposer est depuis sujet à controverse", a expliqué à l'AFP l'historien britannique Richard Butterwick. L'inhumation de Pilsudski en 1935 avait déplu à l'Eglise qui y voyait un homme de gauche, ancien protestant et remarié.

Pour le maire de Cracovie, Jacek Majchrowski, la question est simple: "Nous enterrons notre président, mort en activité".

"La décision a été prise. Elle ne sera pas changée, tant pour des raisons familiales que pour ne pas nuire à l'image de la Pologne", a déclaré Adam Bielan eurodéputé du PiS très proche des Kaczynski.