logo

À Bangkok, les "chemises rouges" défilent avec leurs morts

Les "chemises rouges", partisans de l'ex-Premier ministre Thaksin, ont rendu hommage à leurs camarades tués dimanche au cours d'affrontements avec les forces de l'ordre. Le gouvernement nie la responsabilité des soldats et accuse des "terroristes".

REUTERS - Les manifestants anti-gouvernementaux se sont rassemblés de nouveau lundi dans la capitale thaïlandaise, Bangkok, en portant des cercueils à la mémoire de leurs camarades tués dans les affrontements du week-end avec les forces de sécurité.

Après les violences du week-end, les plus graves en près de 20 ans, la Bourse de Bangkok a dévissé dès son ouverture lundi. L'indice des valeurs a perdu jusqu'à 4,5%, aux alentours de 04h30 GMT, et d'aucuns s'attendaient à ce qu'elle cède jusqu'à 10% à court terme, cette semaine, en réaction aux événements.

En outre, l'agence de notations Fitch s'est déclarée lundi "particulièrement préoccupée" pour la monnaie thaïlandaise, le baht, du fait de la situation politique, et a dit craindre qu'une dissolution du parlement ne résolve pas l'impasse actuelle, que ce soit à court terme ou à moyen terme.

"Nous nous attendons à une dégradation des finances publiques de la Thaïlande, étant donné l'aggravation de l'incertitude politique, et nous sommes particulièrement inquiets concernant la note souveraine de la devise thaïlandaise", a déclaré à Reuters Vincent Ho, de Fitch Asia.

A en croire l'édition de lundi du journal Bangkok Post, le gouvernement thaïlandais pourrait proposer la tenue d'élections législatives anticipées, dans le but de désamorcer la crise politique qui dure depuis un mois, cela même si les "chemises rouges", à la pointe des manifestations en cours, estiment que le temps du dialogue est révolu après les violences du week-end, qui ont fait 21 morts.

Pour le Bangkok Post, qui ne cite pas ses sources, le Premier ministre Abhisit Vejjajiva pourrait dissoudre le parlement dans six mois - soit trois mois plus tôt qu'il ne proposait dans sa plus récente offre. Certaines personnalités du gouvernement voient là la meilleure façon de sortir de l'impasse politique actuelle, écrit le Bangkok Post.

Le gouvernement est tenu de convoquer des législatives d'ici la fin 2011.

"Ils pensent qu'une annonce faite par le Premier ministre sur un calendrier de dissolution du parlement - quelle que soit la réaction à cela du Front uni pour la démocratie contre la dictature (les "chemises rouges"), pourrait être, pour lui, la meilleure façon de se maintenir en fonctions", écrit le quotidien.

Le Premier ministre ne devrait, à en croire le Post, faire cette annonce qu'après la fête de Songkran, qui tombe cette semaine. Songkran, le nouvel an thaï, se fête cette année de mardi à jeudi, mais le gouvernement a fait également de vendredi 16 avril un jour de fête, et cela bien avant que le mouvement de protestation politique des chemises rouges ne commence.

Un porte-parole du gouvernement déclarait dimanche qu'un canal de dialogue était ouvert avec les chemises rouges mais que les conditions n'étaient pas réunies pour des négociations en bonne et due forme. Le gouvernement a proclamé l'état d'urgence le 7 avril, interdisant de ce fait les rassemblements publics de plus de cinq personnes.

"Tant qu'ils (les manifestants) continueront de violer la loi, cela compliquera les choses", a déclaré le porte-parole du gouvernement, Panitan Wattanayagorn.

De son côté, le chef des chemises rouges Wen Tojirakarn estimait dimanche que "Nous ne négocions pas avec les meurtriers". "Nous devons continuer la lutte", ajoutait-il.

Etant donné le risque de nouvelles violences, la Bourse de Bangkok a ouvert lundi en très forte baisse et cédait autour de 3,6% en début de matinée, vers 04h00 GMT.

Les milliers de chemises rouges, qui poussent Abhisit à quitter le pays et à dissoudre le parlement, sont d'autant plus remontés contre le pouvoir que l'armée n'est pas parvenue à les chasser de l'un de leurs deux bastions dans Bangkok, où ils campent depuis un mois.

Les affrontements de samedi ont été les pires violences politiques dans le pays depuis 1992. Quatre soldats figurent au nombre des tués. Les heurts ont pris fin après le retrait des forces de sécurité.