
Embellie éphémère ou progression durable ? Le moral des cadres enregistre un regain exceptionnel. S’établissant sur l’indice -26, il connaît une hausse de 8 points par rapport aux données enregistrées le mois dernier.
Sondage Viavoice réalisé pour HEC, Le Figaro Economie, France Inter et France 24. Interviews effectuées du 18 au 24 Mars 2010, par téléphone.
Échantillon de 402 personnes, représentatif de la population des cadres résidant en France métropolitaine. Représentativité assurée par la méthode des quotas appliquée aux critères suivants : sexe, âge, statut d’activité (salarié du secteur public ou du secteur privé).
Analyse de François Miquet-Marty, Viavoice
Ce score rétablit l’indice du moral des cadres au niveau qui était le sien avant le déclenchement de la crise de 2008-2009 : ce chiffre de « -26 » avait été enregistré en 2005, deux ans avant l’élection présidentielle.
Cette forte progression actuelle s’explique par trois registres de facteurs.
Premier registre d’explication : la conjoncture macro-économique
L’actualité du mois de mars a été caractérisée par l’amélioration (ou une moindre détérioration) de la situation de l’emploi en France :
- Le ministère de l’Emploi a indiqué que le nombre de demandeurs d’emploi n’avait augmenté « que » de 0,1 % (3 300 demandeurs d’emploi supplémentaires, 2,667 millions de demandeurs d’emploi, publication du 24 mars) ;
- Le Premier ministre François Fillon a estimé que la courbe du chômage « devrait s’inverser » cette année (déclaration du 25 mars).
Dans ce contexte, le pessimisme en matière d’emploi en France livre ses premiers signes d’érosion : 23 % des cadres estiment que « le nombre de chômeurs en France augmentera nettement » au cours des « mois qui viennent », soit une baisse de 5 points par rapport aux résultats obtenus le mois dernier.
Deuxième registre d’explication : les opportunités micro-économiques
Le deuxième registre d’explication concerne les opportunités micro-économiques au sein des entreprises dans lesquelles les cadres travaillent. A cet égard, les progressions enregistrées sont particulièrement significatives :
- 25 % des cadres pensent que « les opportunités pour faire progresser » leur carrière au cours des mois qui viennent seront « importantes », soit un regain de 7 points par rapport au score connu il y a un mois ;
- 18 % considèrent que leur « situation financière va s’améliorer » au cours des mois qui viennent, soit un regain de 5 points. Ces évolutions micro-économiques sont importantes parce qu’elles sont inscrites dans la vie professionnelle des cadres, parce qu’elle reposent sur des perceptions personnelles concrètes, et parce qu’elles témoignent d’une part d’optimisme retrouvé au sein des entreprises.
Troisième registre d’explication : les élections régionales
Le troisième registre d’explication concerne les élections régionales, qui ont introduit une césure dans notre vie nationale : les résultats de ces élections ont conduit le président de la République a engager un remaniement gouvernemental et une clarification de la politique menée. Loin de suffire à générer un élan d’optimisme, cette actualité politique a eu pour effet de :
- Rassurer les Français de gauche sur la capacité de leur camp à s’inscrire dans une dynamique de conquête du pouvoir ;
- Rassurer les Français de droite sur la détermination de l’exécutif à poursuivre le cap des réformes engagées, à l’exception de la « taxe carbone » (contribution climat-énergie). Ainsi la forte progression du moral des cadres s’explique-t-elle par des facteurs de natures très différentes, et qui ne sont pas suffisantes pour conclure à une dynamique durable : l’amélioration sur le front de l’emploi doit se poursuivre mais va également se banaliser, l’avenir des perceptions micro-économiques est incertain, et le climat politique lié aux élections régionales est éphémère. Enseignement supérieur : une demande de moyens et d’une meilleure préparation au monde du travail
Dans le contexte global de crise économique, la place et le rôle de l’enseignement supérieur apparaissent déterminants pour préparer la France aux enjeux économiques de demain. Sur ce sujet, les cadres affichent en priorité une demande massive de moyens : 79 % d’entre eux considèrent que la France n’investit « pas assez » dans l’enseignement supérieur. Ce score est d’autant plus significatif qu’il est nettement plus élevé que ceux qui sont enregistrés, sur la même question, à propos de l’enseignement secondaire (72 %) et primaire (65 %).
Par ailleurs, sur le fond, les cadres n’expriment pas d’insatisfaction majeure à l’encontre de cet enseignement supérieur, dont la plupart d’entre eux sont d’ailleurs issus :
- Plus des deux tiers (68 %) font « confiance » à l’enseignement supérieur en France pour « transmettre une solide culture générale ».
- Une courte majorité (52 %) font également « confiance » à l’enseignement supérieur pour « préparer les jeunes au marché du travail ».
Mais ce second score masque, en creux, la part des attentes concernant l’adéquation de l’enseignement supérieur et du monde du travail :
- Dans le contexte actuel de chômage massif, les exigences en la matière s’intensifient ;
- Au jeu des adéquations entre investissement financier et capacité à générer des emplois, la question qui se pose désormais est celle de la nature des investissements à réaliser, et des voies permettant de les optimiser.
Sur ce dernier registre, les cadres aspirent à une meilleure interpénétration du monde universitaire et de l’entreprise : développement des stages, amplification des formations en alternance, contenu de l’enseignement intégrant les réalités de l’entreprise et les voies d’accès au monde du travail, comptent parmi les priorités citées spontanément pour demain. Il s’agit, pour la plupart, d’un impératif de décloisonnement.