Le charismatique leader de la lutte contre l'apartheid, qui a quitté les geôles sud-africaines il y a tout juste 20 ans, est devenu une source d'inspiration pour cinéastes et musiciens. Son image est jalousement protégée par sa fondation.
"Freeeee Nelson Mandela !" Le cri qui appelle à la libération du militant anti-apartheid est d'abord musical. Il est lancé par le groupe Special Aka en 1983, et fait aussitôt le tour des dancefloors du monde entier.
Alors qu'il se trouve encore derrière les barreaux, Mandela se transforme en une icône pop sous les doigts de Stevie Wonder. L'Oscar que reçoit le chanteur en 1985 pour "I Just Called to Say I Love You" lui est dédié. En Afrique du Sud, le titre est banni des ondes. L'année suivante, Madiba, qui croupit toujours en prison, inspire cette fois un album à Youssou N'Dour.
Source d'inspiration de Johnny Clegg ("Asimbonanga", 1987), de Simple Minds ("Mandela Day", 1988), de Carlos Santana (morceau musical "Mandela", 1988), de Tracy Chapman ("Freedom Now", 1989), de Whitney Houston ("He I Believe", 1988)... mais aussi de Brenda Fassie ("Black President", 1989), Nelson Mandela hante l'imaginaire collectif de la planète, bercée par ces incantations anti-raciales.
Mandela, devant la caméra de Spike Lee
Lorsque, enfin, après 27 années de réclusion, le charismatique leader de la lutte contre l'apartheid retrouve la liberté, il devient une star de cinéma. Dès 1992, il incarne son propre personnage à la toute fin du film "Malcolm X", de Spike Lee, dans lequel il reprend à son compte le message du leader de la cause noire américaine en le présentant à de jeunes élèves de Soweto.
Par la suite, le calvaire de Mandela est adapté au grand écran, pour ce qu'il a d'incroyablement romanesque. Les stars du cinéma s'arrachent son rôle sur grand écran. Avant le récent "Invictus" de Clint Eastwood avec Morgan Freeman, Sidney Poitier, dans "Mandela and De Klerk" (1997), et Dennis Haysbert, dans "Goodbye Bafana" (2007), ont endossé le rôle.
Un abus signé Sassou Nguesso
Reste que, lorsque l'image d'un homme atteint un tel seuil de notoriété, les dérapages sont inévitables. Il en est ainsi du détournement de l'illustre patronyme par un dépôt de pièces automobiles de la ville côtière de Port Elizabeth, en Afrique du Sud, qui s'est baptisé "Mandela Auto Body Parts" (sic). Ou, plus grave, de l'utilisation abusive qu'en a récemment fait le président du Congo-Brazzaville, Denis Sassou Nguesso, qui n'a pas hésité à apposer la signature de l'ancien président sud-africain au bas de la préface de son dernier livre autobiographique paru à la veille de la présidentielle organisée dans son pays - qu'il a remportée haut la main.
Régulièrement, des escrocs de la charité sur Internet tentent enfin d'extorquer des fonds en envoyant de faux appels aux dons au nom de Nelson Mandela, dont la principale difficulté est désormais de porter un message fort, universel... et commercialisable à l'envi.
Heureusement, la Nelson Mandela Fondation veille au grain. Régulièrement, l'organisation met en garde contre les contrefaçons : les utilisations erronées de citations, par exemple. Ces bouts de phrase que l'on aime mettre dans la bouche d'un homme illustre alors qu'il ne les a jamais prononcés. Ainsi, "Our deepest fear is not that we are inadequate. Our deepest fear is that we are powerful beyond measure" n'est pas de Nelson Mandela, quoi qu'en dise Marianne Williamson dans "A return to love : Reflections on the principles of a course in miracles" (éd. Harper, 1996).
C'est que la "marque" Mandela peut effectivement être détournée de mille façons. La plus étonnante torsion du célèbre patronyme a été proposée par... Amy Winehouse. Lors du concert organisé pour fêter les 90 ans du vieux sage, la crooneuse monte sur scène pour reprendre la chanson des Special Aka. Mais, dans la bouche d'Amy Winehouse, "Free Nelson Mandela" devient... "Free Blake my fella" ("Libérez Blake [Fielder-Civil], mon copain"). Nelson Mandela en a été informé par le Premier ministre britannique Gordon Brown, qui lui a expliqué le "combat" que mène Amy Winehouse pour la libération de son compagnon... incarcéré à l'époque pour agression. Brown en pleure de rire (cf vidéo du "Sun").