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RéessayerChaque vendredi soir dans la banlieue de Lyon, une salle des fêtes vibre au son des guitares, du piano et de la batterie. Une cinquantaine de personnes dansent, chantent, crient, faisant presque penser à un concert ou à une chorale de quartier. Jusqu’à ce que l’on prête attention aux paroles : des chants à la gloire de Dieu, des louanges chrétiennes. Ce à quoi l’on assiste, ce vendredi 17 octobre, c’est en réalité une soirée de prières évangélique, animée par un groupe de gospel et un pasteur en bombers et baskets.
Parmi les fidèles présents ce soir-là, Noémie, jeune maman de 27 ans, chante agenouillée les mains tournées vers le ciel. Il y a dix ans, elle s’est convertie à la foi évangélique. "Ça a été la révélation. Pour moi, c'est dans ce type d'église que je veux grandir et vivre ma foi." Pourtant, rien dans son histoire ne prédestinait Noémie à s’y convertir.
"De militante anti-dieu à chrétienne évangélique"
Noémie grandit entre une mère catholique, et un père anti-religion. "Pour moi, ça devenait essentiel de faire perdre la foi aux gens puisque j'avais en moi tous les plus grands stéréotypes, à savoir que les religions ont été créées pour asservir les hommes, que ce n'est qu'une question de business", se souvient-elle.
Jusqu’au jour où elle rencontre un garçon, chrétien évangélique, de qui elle tombe enceinte à l’âge de 16 ans. Impossible pour elle de se résoudre à avorter, alors en cours, au lycée, elle prie, sans savoir qui. "Deux jours après cette prière vraiment très sincère, j'ai fait une fausse couche et j’ai eu cette conviction que c'est Dieu qui avait répondu à ma prière."
Quelques semaines plus tard, après avoir cherché quel dieu avait provoqué cette fausse couche, Noémie se convertit au protestantisme évangélique et se fait baptiser. "Je suis passée d'une athéiste militante anti-dieu, à une chrétienne". Depuis, la Lyonnaise est devenue influenceuse évangélique, avec près de 120 000 abonnés sur réseaux, elle fait de l’évangélisation sur les plateformes.
Vers une évangélisation de l’Europe ?
Réseaux sociaux, concerts, les évangéliques adoptent les codes de la jeunesse pour attirer et convertir de nouveaux fidèles. Et les efforts semblent payants : le Cnef estime à 1 million le nombre de protestants évangéliques en France aujourd'hui, alors qu’ils étaient 50 000 en 1950.
Toutefois, la part des évangéliques chez les croyants en France reste faible. Une étude Ipsos estime que 2 % de la population française serait protestante évangélique, alors qu’au Brésil ou aux États-Unis, ce chiffre avoisine les 30 %. Là-bas, les évangéliques représentent un véritable vivier, notamment électoral, puisque leur vote a été décisif dans les élections de Jair Bolsonaro et Donald Trump.
Alors, les évangéliques français pourraient-ils un jour peser autant dans une campagne électorale ? "D'un agenda politique tel qu'on le voit aux États-Unis, avec une alliance des milieux conservateurs catholiques et évangéliques, non", explique Christophe Monnot, maître de conférences en sociologie du protestantisme à Strasbourg.
Selon lui, un phénomène d’une telle ampleur n’est pas à prévoir dans l’immédiat en Europe ou en France. "Mais ce sont des gens qui consomment des réseaux sociaux et qui comprennent l'anglais, ils seront influencés. Donc je ne peux pas dire qu'il n'y a pas de politisation, mais je dirais que c’est un effet halo de ce qui se passe aux États-Unis."
Accusés de dérives sectaires
Et puis en France, le milieu évangélique souffre d’une image qui lui colle à la peau, celle de certaines églises accusées de sectarisme.
Dans son dernier rapport, la Miviludes, l’organisme qui surveille les dérives sectaires en France, note une hausse des signalements relatifs aux églises évangéliques, surtout parmi les congrégations isolées.
Parmi ces signalements, on retrouve des pressions financières importantes (certains évoquent des versements réguliers atteignant 10 % du salaire des fidèles), des ruptures familiales ou amicales, et parfois des abandons d’études ou de soins.
Aujourd’hui, il reste difficile de contrôler les quelque 3 000 lieux de culte évangéliques du pays. "L'évangélisme n'est pas une marque déposée. N'importe qui peut déposer en préfecture une association cultuelle, se déclarer évangélique et mettre ça dans son titre. Et ça, personne ne peut vraiment le contrôler", explique Arnaud Jeuch, pasteur à Paris. Mais pour lui, la liberté de culte doit primer : "Je crois que ce serait un autre problème si on devait contrôler que tout le monde est bien dans le bon moule avant d'ouvrir une église."
