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Au Soudan, les forces alliées de l'armée accusent les FSR d'avoir exécuté 2 000 civils à el-Facher
Port-Soudan (Soudan) (AFP) – Plusieurs rapports font état d'exactions à caractère ethnique depuis dimanche dans la ville d'El-Facher, dans l'ouest du Soudan, depuis sa prise par des paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR). L'armée accuse les combattants d'avoir "exécuté plus de 2 000 civils non armés".

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Capture d'écran d'une vidéo diffusée le 26 octobre 2025 sur le compte Telegram des Forces de soutien rapide (FSR), montrant des combattants des FSR célébrant leur victoire dans une rue d'El-Facher, au Darfour. © AFP
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Les forces alliées de l'armée ont accusé mardi 28 octobre les paramilitaires d'avoir "exécuté plus de 2 000 civils non armés" depuis dimanche dans la ville d'el-Facher, dans l'ouest du Soudan. Plusieurs rapports alarmants ont étayé de multiples exactions, fournissant notamment des images sur le terrain.

Ces derniers mois et jusqu'à sa chute, el-Facher, la capitale régionale du Darfour-Nord, était devenue le front le plus disputé de la guerre opposant depuis avril 2023 les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) et l'armée, soutenue notamment par les Forces Conjointes.

Les FSR ont "commis des crimes atroces contre des civils innocents dans la ville d'el-Facher, où plus de 2 000 citoyens désarmés ont été exécutés et tués les 26 et 27 octobre, la plupart étant des femmes, des enfants et des personnes âgées", affirme un communiqué publié sur la page Facebook officielle de cette coalition de groupes armés dans le Darfour.

Le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, Volker Türk, a pointé lundi "le risque croissant d'atrocités motivées par des considérations ethniques" en rappelant le passé du Darfour, ensanglanté au début des années 2000 par les massacres des milices arabes Janjawid dont sont issues les FSR.

Au Soudan, les forces alliées de l'armée accusent les FSR d'avoir exécuté 2 000 civils à el-Facher
Capture d'écran d'une vidéo diffusée le 26 octobre 2025 sur le compte Telegram des Forces de soutien rapide (FSR), montre des combattants armés des FSR dans une rue d'El-Facher, au Darfour. © FSR - AFP

Son bureau a reçu des informations faisant état d'"exécutions sommaires" de civils, a affirmé un communiqué évoquant les alertes lancées par plusieurs observateurs indépendants.

L'Union européenne a dit mardi veiller "à ce que toutes les violations du droit international humanitaire et des droits de l'homme soient documentées", appelant "toutes les parties belligérantes à désamorcer la situation". 

Le président de la Commission de l'UA, Mahamoud Ali Youssouf, a, quant à lui, "condamné avec la plus grande fermeté les graves violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire, y compris les crimes de guerre présumés et les meurtres de civils ciblés en raison de leur appartenance ethnique". "Les auteurs de ces actes odieux devront rendre des comptes", a-t-il poursuivi, dénonçant une "escalade de la violence" et des "atrocités".

Des "exécutions massives"

Un rapport du Humanitarian Research Lab de l'Université Yale (HRL), étayé par des vidéos en open source et des images satellites, fait état "d'exécutions massives" après la prise de la ville par les FSR.

"El-Facher semble être dans un processus systématique et intentionnel de nettoyage ethnique des communautés indigènes non arabes Fur, Zaghawa et Bartis, avec des déplacements forcés et des exécutions massives", indique le HRL qui a documenté les 18 mois de siège de la ville.

Les images analysées par le laboratoire montrent "des objets de taille humaine", identifiés à proximité des positions des FSR, parfois accompagnés de "traces rougeâtres" au sol, susceptibles d'indiquer des traces de sang.

Des observations similaires ont été faites sur des talus jonchés de corps en périphérie de la ville, corroborant les vidéos d'exécutions sommaires de civils tentant de fuir, largement diffusées sur les réseaux sociaux depuis dimanche.

Les images satellites confirment aussi d'importants mouvements de population.

Des groupes compacts de civils sont visibles quittant el-Facher vers le sud et le camp de déplacés de Zamzam, transformé pour partie en base paramilitaire depuis l'offensive sanglante menée en avril par les FSR.

Au Soudan, les forces alliées de l'armée accusent les FSR d'avoir exécuté 2 000 civils à el-Facher
Capture d'écran d'une vidéo diffusée le 26 octobre 2025 sur le compte Telegram des Forces de soutien rapide (FSR), montre des combattants des FSR célébrant près d'un char dans une rue d'El-Facher, au Darfour. © FSR - AFP

"Le monde doit agir immédiatement pour mettre la pression maximale sur les FSR et leurs soutiens, notamment les Émirats arabes unis [accusés par l'ONU de fournir des armes et des drones], pour que cessent les tueries", a déclaré le HRL en notant que les actions documentées relèvent du crime de guerre et du crime contre l'humanité.

"La perte d'el-Facher après un long siège est un tournant qui appelle à la rationalité et au réalisme", une reconnaissance que la voie politique est la seule option pour mettre fin à la guerre", a déclaré le conseiller présidentiel émirati Anwar Gargash sur X, en appelant à ratifier les propositions formulées par le groupe dit du "Quad" réunissant les États-Unis, l'Arabie saoudite, l'Égypte et les Émirats.

Cette proposition prévoit la formation d'un gouvernement civil de transition en excluant à la fois le gouvernement pro-armée actuel et les FSR de la transition politique post-conflit.

Soutiens étrangers

La situation est d'autant plus complexe que les belligérants bénéficient chacun de soutiens étrangers cherchant à peser sur un pays riche en or, traversé par le Nil et bordé par la mer Rouge.

Au Soudan, les forces alliées de l'armée accusent les FSR d'avoir exécuté 2 000 civils à el-Facher
Capture d'écran d'une vidéo diffusée le 26 octobre 2025 sur le compte Telegram des Forces de soutien rapide (FSR), montre des paramilitaires brandissant des armes et célébrant dans les rues d'El-Facher, au Darfour dans l'ouest du Soudan © - / Rapid Support Forces (RSF)/AFP

Les FSR ont reçu des armes et des drones des Émirats arabes unis, d'après des rapports de l'ONU, tandis que l'armée a bénéficié de l'appui de l'Égypte, de l'Arabie saoudite, de l'Iran et de la Turquie, selon des observateurs. Tous nient toute implication.

Lundi, le chef de l'armée, le général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'État de 2021, a reconnu la défaite de ses troupes à el-Facher tout en promettant "vengeance" et "victoire".

C'est une "étape" et "nous pouvons renverser la situation", a-t-il dit dans un discours en affirmant que ses hommes se battront "jusqu'à purifier cette terre de ses souillures."

Au Soudan, les forces alliées de l'armée accusent les FSR d'avoir exécuté 2 000 civils à el-Facher
Le général Burhane à Port-Soudan, le 26 avril 2025 © Ebrahim Hamid / AFP

Selon lui, l'armée a décidé de "quitter la ville pour un endroit sûr afin d'épargner les citoyens et la ville de la destruction".

Depuis dimanche, plus de 26 000 personnes ont fui les combats, majoritairement vers la périphérie de la ville et vers Tawila, à 70 km à l'ouest d'el-Facher.

Au Soudan, les forces alliées de l'armée accusent les FSR d'avoir exécuté 2 000 civils à el-Facher

La guerre a tué des dizaines de milliers de personnes, en a déraciné des millions d'autres et plongé le pays dans ce que l'ONU décrit comme "la pire crise humanitaire au monde."

Avec AFP