Depuis plus de 200 ans, les couvreurs zingueurs ornemanistes, artisans du zinc, donnent aux toits de Paris une identité architecturale particulière, qui inspire peintres, poètes et cinéastes. Leur savoir-faire pourrait bientôt faire son entrée au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco. Une reconnaissance pour ce métier ancien, qui doit désormais s’adapter aux défis du réchauffement climatique.
Depuis plus de dix ans, Gilles Mermet photographie les toits de Paris et ceux qui les façonnent : les couvreurs zingueurs et les ornemanistes, ces artisans qui fabriquent œils-de-bœuf, lucarnes et autres ornements de faîtage. Au fil des ans, le photographe est devenu l’ambassadeur de la candidature de cette communauté sélectionnée par le ministère français de la Culture pour être inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco, à l’occasion de la session prévue début décembre à Asuncion, au Paraguay.
Cette candidature met en valeur une profession, qui peine à recruter : il manquerait chaque matin 500 couvreurs sur les chantiers parisiens... "Nous avons fait des dossiers, des films et des photos pour montrer que cette communauté de couvreurs a besoin de faire parler d’elle pour susciter des vocations", explique Gilles Mermet.
Les couvreurs zingueurs, qui offrent aux toits de Paris mille nuances de gris, sont par ailleurs de plus en plus souvent amenés à poser également de l’isolant, en plus de leur travail sur le zinc, le bois et l’ardoise. Un isolant qui, selon certains professionnels, serait plus efficace en hiver qu’en été, et qui impose aux propriétaires d’engager des travaux conséquents, comme le souligne le rapport "Paris à 50 degrés".
Concilier toits en zinc et réchauffement climatique
En effet, le zinc est critiqué pour son rôle dans la surchauffe des logements parisiens. Pour contribuer aux objectifs de Paris face au réchauffement climatique, l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) a réalisé une étude sur les toitures de la capitale française. "Le zinc est un matériau qui présente beaucoup d’avantages : il est malléable, a une durée de vie importante - presque 100 ans - et il est écologique car recyclable", explique Olivier Richard, directeur d’études à l’Apur. "En revanche, cette matière conduit la chaleur de manière relativement importante, ce qui peut entraîner des situations d’inconfort dans les derniers étages des bâtiments avec des toitures en zinc".
Pour atténuer les effets du réchauffement climatique en ville, le cabinet d’architecture Roofscapes a installé un projet pilote sur l’ancienne mairie du 4ème arrondissement de Paris, désormais occupée par l'Académie du climat : des plateformes végétalisées fixées sur les toits en zinc. "On cherche à ombrager, végétaliser, et rendre accessibles les toits pour les adapter aux vagues de chaleur et au manque d’espace et d’espaces verts dans des villes très denses comme Paris", explique Eytan Levi, le co-fondateur de Roofscapes. "Nous allons créer des espaces extérieurs sur lesquels prendre un repas, lire un livre et peut-être même dormir lorsque nous aurons des vagues de chaleur encore plus importantes qu’aujourd’hui". Les vieux toits parisiens pourraient bien se transformer en dernier lieu de socialisation à la mode... et au frais !