La présence sur le terrain fera-t-elle la différence ? Une armée de militants de gauche parcourt la France depuis plusieurs jours avec un objectif commun : mobiliser les électeurs des circonscriptions où les résultats du second tour des élections législatives anticipées, dimanche 7 juillet, s'annoncent serrés pour faire barrage à l'extrême droite.
Depuis l'annonce par Emmanuel Macron, dimanche 9 juin, de la dissolution de l'Assemblée nationale, des groupes d'actions se sont constitués spontanément. Ils s'appellent Circos Pivots, Les convois de la victoire, 5 jours pour gagner ou Victoires populaires et ont en commun de mettre en relation, sur X, Instagram, Facebook ou Telegram, des militants déterminés à ne pas laisser gagner le Rassemblement national (RN).
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Accepter Gérer mes choix"Quand j'ai vu les résultats du premier tour dimanche soir, j'étais vraiment mal et le lundi, je ne tenais plus en place alors j'ai voulu faire quelque chose, raconte Nolwenn, 40 ans. Un ami m'avait parlé de Circos Pivots et en scrutant les réseaux sociaux, je suis aussi tombée sur le site de Caroline de Haas [militante féministe engagée à gauche]. Dès le lundi soir, je faisais la formation pour apprendre à faire du porte-à-porte et le mercredi j'étais sur le terrain."
Habitant Paris, Nolwenn s'est rendue en Seine-et-Marne mercredi matin et dans l'Oise mercredi après-midi, avant de se rendre jeudi en Seine-Maritime, dans la banlieue de Rouen. Les groupes d'action ont mis en place des cagnottes pour financer les déplacements des militants, tandis que des options d'hébergements sont également proposées par d'autres militants habitant dans les circonscriptions décisives.
"Le sentiment d'être utile et l'impression qu'on peut faire la différence"
"On était une cinquantaine dans l'Oise, là on est une vingtaine en Seine-Maritime après avoir pris le train à 6 h 30 ce matin à Paris, raconte-t-elle. Il y a un côté colonie de vacances qui est sympa et puis être dans l'action donne le sentiment d'être utile et l'impression qu'on peut faire la différence. C'est mieux que de me morfondre toute seule chez moi."
Pour déterminer les circonscriptions à cibler prioritairement, un travail minutieux d'analyse des résultats du premier tour des législatives a été effectué dès le 30 juin au soir, puis affiné après l'annonce des nombreux désistements de candidats qui ont permis de faire passer le nombre de triangulaires de 306 à 89.
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Accepter Gérer mes choixÀ l'image des fameux "swing states" aux États-Unis, ces États-clés susceptibles de faire basculer l'élection présidentielle car votant parfois démocrate ou parfois républicain, les circonscriptions ciblées sont jugées décisives car elles mettent aux prises un candidat du Rassemblement national face à un candidat du Nouveau Front populaire (NFP). Et le plus souvent, le scrutin promet de se jouer à quelques dizaines ou quelques centaines de voix.
Les cartes diffusées et permettant de choisir où se rendre listent environ 80 circonscriptions "très prioritaires". De leurs résultats dépendra la couleur de la future majorité à l'Assemblée nationale.
C'est notamment le cas de la 1ere circonscription de Seine-et-Marne, où une triangulaire opposera dimanche un candidat du NFP, Arnaud Saint-Martin, un candidat du RN, Théo Michel, et la candidate et députée sortante Ensemble, Aude Luquet, qui a refusé de se désister malgré sa troisième place. Au premier tour, seulement 159 voix ont départagé le candidat de gauche (14 701 voix) du candidat d'extrême droite (14 542 voix).
Cibler les indécis et les abstentionnistes
C'est aussi le cas de la 4e circonscription de Seine-Maritime, où s'est rendue Nolwenn. Le candidat du RN, Guillaume Pennelle, y est arrivé en tête au premier tour avec 39,1 % des voix, devant la députée sortante du NFP, Alma Dufour (32,6 %), et le candidat Ensemble, Laurent Bonnaterre (24,7 %), qui s'est désisté en vue du second tour.
"On a d'abord fait du porte-à-porte dans Le Grand-Quevilly et ensuite on est allé à la sortie de l'usine Renault à Cléon, décrit Nolwenn. En discutant avec les gens, on se rend compte que beaucoup de personnes votent pour un candidat sans connaître les programmes et que beaucoup d'autres ne mesurent pas l'enjeu de ces élections et estiment que le résultat ne changera rien pour elles."
Il s'agit alors de bien identifier les profils rencontrés. Dans cette course contre la montre que sont ces élections législatives anticipées, chaque minute compte. Inutile de s'attarder avec un électeur du RN convaincu et sûr de son vote. Ces militants ciblent d'abord les indécis et les abstentionnistes.
Parviendront-ils à faire basculer ces circonscriptions pour empêcher le Rassemblement national de l'emporter dimanche soir ? À défaut d'avoir des certitudes, Nolwenn et ses camarades comptent bien jeter toutes leurs forces dans la bataille pour n'avoir aucun regret, vendredi soir, à 23 h 59, lorsque la campagne s'achèvera.
D'autant que les premières projections en sièges effectuées après la clôture des candidatures pour le second tour et publiées mercredi 3 juillet par Harris Interactive ont de quoi leur donner de l'espoir. Celles-ci donnent entre 190 et 220 députés au Rassemblement national et entre 159 et 183 députés au Nouveau Front populaire.