Elles se sont donné rendez-vous, lundi 3 juin, devant les bureaux de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle (Arcom) pour protester contre leur invisibilisation. Sept "petites listes" candidates aux élections européennes du 9 juin ont ainsi dénoncé les règles et les pratiques relatives à la campagne des européennes qui, selon elles, "verrouillent le système politique" et "empêchent l’émergence d’idées nouvelles".
Les représentants du Parti animaliste, du Parti pirate, d’Équinoxe, de Nouvelle Donne, de Volt, du Parti radical de gauche et d’Allons enfants, qui ont également publié une tribune, dimanche 2 juin, dans Libération, critiquent notamment le seuil de 5 % des voix imposé en France pour obtenir des eurodéputés, alors que celui-ci est fixé à 0,6 % en Allemagne, où le Parti pirate a ainsi pu obtenir un député européen en 2019 avec seulement 0,65 % des suffrages.
Conférence de presse avec d'autres listes rendues peu visibles par la couverture médiatique de la campagne pour les élections #Européennes2024, devant les sièges de l'Arcom. pic.twitter.com/pgoDQetIjk
— Parti animaliste (@PartiAnimaliste) June 3, 2024Ils s’insurgent également contre les règles de fonctionnement du scrutin et de financement qui leur imposent "un coût insupportable". Un budget d’un million d’euros pour imprimer et fournir en bulletins l’ensemble des bureaux de vote est notamment évoqué, alors les bulletins sont fournis par les États en Belgique, en Espagne ou au Portugal.
Ces "petites listes" fustigent enfin le faible temps de parole qui leur est accordé. "Dans le dernier décompte officiel des temps de parole, les listes de Renaissance et du Rassemblement national cumulent à elles seules plus de quatre jours de temps d’antenne en continu en six semaines, tandis que toutes nos listes ensemble n’ont eu que six heures d’antenne (la somme de ces minutes glanées par-ci par-là, obtenues grâce à des efforts colossaux)", écrivent leurs représentants dans Libération.
Les élections européennes donnent systématiquement lieu à une multiplication de listes citoyennes ou de petits partis, battant à chaque nouvelle élection le record du nombre total de listes candidates – et de panneaux à installer devant les bureaux de vote. On en compte ainsi 38 cette année, contre 34 en 2019 et jusqu’à 31 en 2014 (la France était alors divisée en sept zones géographiques avec un nombre de listes différent en fonction des zones ; c’est la zone Île-de-France / Français établis hors de France qui en comptait le plus).
"On ne donne pas la parole aux personnes qui proposent des solutions nouvelles"
Parmi ces listes figurent de nombreux candidats d’extrême droite et/ou complotistes. Huit listes proposées le 9 juin "s’appuient sur des thèses racistes, antisémites, conspirationnistes ou ultranationalistes", relève ainsi Libération. C’est notamment le cas de la liste de l’ancien bras droit de Marine Le Pen, Florian Philippot, allié à l’ancien député du Parti chrétien-démocrate Jean-Frédéric Poisson, de celle du duo Dieudonné M’Bala M’Bala-Francis Lalanne ou de celle de l’UPR menée une nouvelle fois par l’ancien candidat à la présidentielle 2017 François Asselineau.
Mais il y a aussi des listes de partis établis, régulièrement présents aux différents scrutins français et notamment à l’élection présidentielle. C’est le cas des partis d’extrême gauche comme Lutte ouvrière (LO) et le Nouveau parti anticapitaliste (NPA), mais aussi du parti Résistons ! de Jean Lassalle, ce dernier menant la liste Alliance rurale.
D’autres petits partis plus ou moins structurés, comme Nouvelle Donne, le Parti animaliste ou le Parti pirate, profitent quant à eux de ces élections pour accroître petit à petit leur notoriété. Mais leur campagne s’apparente souvent à un chemin de croix, tant les portes des grands médias leur sont closes.
"Nous vivons actuellement une crise démocratique. L’abstention le 9 juin s’annonce une nouvelle fois autour de 50 %. Les partis qui se succèdent au pouvoir depuis 40 ans n’apportent aucune solution aux problèmes. Et malgré ce constat d’échec, on ne donne pas la parole aux personnes qui proposent des solutions nouvelles", déplore Pierre Larrouturou, président du parti Nouvelle Donne, eurodéputé élu en 2019 sur la liste de Raphaël Glucksmann et qui porte cette année la liste Changer l’Europe.
Impossible, dans ces conditions, de percer le mur du son. Toutes ces listes recueillent entre 0 et 2 % d'intentions de vote dans les sondages. L’immense majorité d’entre elles n’avaient obtenu que quelques milliers de voix il y a cinq ans. Le Parti animaliste avait tout de même réussi l’exploit de totaliser plus de 490 000 voix, soit 2,16 % des suffrages. Un score presque similaire à celui du Parti communiste français (PCF) qui, bien que traité par la plupart des médias comme un parti majeur en étant régulièrement invité sur les plateaux et participant même aux débats avec les autres têtes de liste, n’avait cumulé que 75 000 voix de plus pour un total de 2,49 % des votes.