Après sa rencontre avec Xi Jinping mercredi, Joe Biden a tenu jeudi, lors du sommet de l'Apec à San Francisco, à rassurer ses alliés de l'Asie-Pacifique. Le président américain a promis que son pays resterait un partenaire économique fiable. De son côté, son homologue chinois a vanté les attraits de la deuxième puissance mondiale face aux investisseurs étrangers.
L'un se démène pour attirer les pays asiatiques dans le giron américain, l'autre vante la Chine comme terre d'investissements : après un sommet censé poser les bases d'une compétition maîtrisée mais acharnée, Joe Biden et Xi Jinping sont passés à l'action.
"Nous sommes ici pour y rester", a lancé jeudi 16 novembre le président américain lors de son discours inaugural aux dirigeants et patrons réunis à San Francisco pour un sommet de la Coopération économique pour l'Asie-Pacifique (Apec).
Il a relaté sa longue rencontre de la veille dans les collines californiennes avec son homologue chinois, la première après douze mois de fortes tensions. Xi "m'a demandé pourquoi nous sommes aussi impliqués dans le Pacifique", a rapporté Joe Biden. "Je lui ai répondu, 'c'est parce que nous sommes une nation du Pacifique. Grâce à nous, il y a la paix et la sécurité dans la région, et donc de la croissance.'"
Face à la Chine, les États-Unis cherchent à muscler leurs alliances avec les 21 pays de l'Apec, qui pèsent ensemble 60 % de l'économie mondiale.
Xi Jinping a vu jeudi le président mexicain Andres Manuel Lopez Obrador, et la présidente du Pérou, Dina Boluarte, de quoi rappeler aux États-Unis que la Chine a massivement investi une zone autrefois sous influence américaine, dans le cadre de son gigantesque programme d'infrastructures dans le monde entier, les "Nouvelles routes de la soie".
Le président chinois, confronté à des cahots économiques, est venu à San Francisco vanter les attraits de la deuxième puissance mondiale, face à des investisseurs étrangers pour certains plus hésitants. Mercredi soir, lors d'un dîner avec de nombreux grands patrons américains, la salle s'était levée pour accueillir Xi Jinping et avait plusieurs fois applaudi son discours. "La Chine reste le moteur le plus puissant de la croissance mondiale", a par ailleurs déclaré le dirigeant chinois jeudi, dans un discours écrit pour le sommet des PDG de l'Apec.
Ambitions américaines revues à la baisse
Pékin a bien noté que les États-Unis, de leur côté, avaient dû revoir à la baisse leurs grandes ambitions de partenariat économique en Asie. Joe Biden a certes assuré jeudi que des "engagements tangibles ont été négociés en un temps record" pour un pacte commercial avec 13 autres pays de la région, dont le Japon, l'Inde, l'Australie, la Corée du Sud et une grande partie de l'Asie du Sud-Est, à l'exclusion de la Chine.
Le Cadre économique pour l'Indo-Pacifique (Ipef), qui n'offre pas d'accès aux marchés, avait été lancé l'année dernière par Washington pour en remontrer à Pékin. En pratique, si les discussions sur les chaînes d'approvisionnement, la transition énergétique et la lutte contre la corruption ont en bonne partie abouti, le projet achoppe sur le volet commercial, à cause d'une polémique au sein du Parti démocrate sur les normes de travail.
Loin de toute ambition de libre-échange, un principe que l'administration Biden assure avoir enterré, l'Ipef doit déboucher sur l'adoption de normes communes dans plusieurs domaines, comme le droit du travail et l'environnement, pour faciliter les échanges commerciaux. "Personne ne sera laissé en arrière", a promis jeudi le président démocrate, qui briguera dans un peu moins d'un an un second mandat. Les progrès de la semaine vont permettre à l'Ipef de "créer une course vers le haut et non vers le bas".
Joe Biden ne veut surtout pas froisser les syndicats, dont il espère le soutien électoral pour 2024. "Pourquoi nombre d'entre vous (patrons d'entreprise) employez des ouvriers syndicalisés ? Parce que ce sont les meilleurs au monde", a-t-il lancé.
Dans cette atmosphère de compétition économique, technologique et stratégique sans pitié, difficile de dire si le dégel constaté mercredi lors du sommet de Joe Biden et Xi Jinping va durer. La rencontre a en tous cas, au minimum, permis de relancer la "diplomatie du panda". Xi Jinping a laissé entendre qu'il pourrait envoyer prochainement aux États-Unis quelques émissaires à fourrure noire et blanche, après le départ récent des trois pandas géants du zoo de Washington, chouchous incontestés du public.
Avec AFP