
Opposants et policiers se sont affrontés à Ispahan et Najafabad (centre), où se tenaient des cérémonies à la mémoire de l'ayatollah dissident Montazeri. Selon un site d'opposition, une cinquantaine de manifestants ont été arrêtés.
REUTERS - Des affrontements entre forces de sécurité et partisans de l’opposition ont éclaté mercredi à Ispahan et à Najafabad, dans le centre de l’Iran, rapportent des sites internet.
Ces incidents surviennent deux jours après les manifestations qui ont marqué les funérailles du grand ayatollah Hossein Ali Montazeri, l’une des personnalités religieuses les plus critiques à l’égard du pouvoir actuel.
Les journalistes étrangers ne pouvant couvrir les manifestations, il est difficile d’évaluer l’ampleur de la contestation et sa capacité à durer.
Un nouvel épisode du bras de fer entre les autorités et les opposants pourrait avoir lieu dimanche prochain à l’occasion de l’Achoura, une grande fête religieuse chiite qui coïncidera avec le septième jour de deuil de la mort de Montazeri.
Le chef de la police iranienne a prévenu mercredi que les partisans de l’opposition seraient sévèrement réprimés par les forces de sécurité s’ils poursuivaient leurs manifestations dans le pays, rapporte l’agence semi-officielle Fars.
“Nous conseillons à ce mouvement de mettre fin à ses activités. Sinon, ceux qui enfreignent l’ordre seront sévèrement réprimés, conformément à la loi”, a déclaré le chef de la police Esmail Ahmadi-Moghadam, cité par Fars.
Pour Ali Ansari, professeur à l’université de St Andrews en Ecosse et spécialiste de l’Iran, la situation ne peut qu’empirer.
“Cela va être de plus en plus chaotique. On peut parler de voeu pieux quand certains affirment qu’il ne se passera rien ou qu’il va y avoir une sorte de ‘révolution de velours’. Cela va devenir très violent”, pronostique-t-il.
L’ancien président réformateur Mohammad Khatami a dénoncé la répression. “L’imam Khomeini pensait que la république islamique reposait sur deux piliers, la liberté et l’indépendance. Si ces piliers tremblent sur leurs bases, nous aurons à nouveau la tyrannie”, a-t-il dit, cité par le site Parlemannews.
“Qualifier de traitre celui qui fait entendre sa voix, alors même qu’il croit au système (islamique), constitue une dérive majeure qui doit être corrigée”, a-t-il ajouté.
Des manifestants et des journalistes arrêtés
À Ispahan, de nombreux manifestants ont été blessés et d’autres arrêtés, selon le site réformateur Jaras. La police a fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser les protestataires, qui s’étaient réunis pour commémorer la mort de Montazeri, intervenue samedi dernier à l’âge de 87 ans.
Le site Parlemannews fait état d’une cinquantaine de manifestants interpellés, dont quatre journalistes iraniens.
Des “affrontements sporadiques” ont également éclaté à Najafabad, la ville natale de Montazeri, selon Jaras. “La situation est tendue dans la ville, les gens scandent des slogans antigouvernementaux”, lit-on sur le site.
A Ispahan, des “agents en civil” ont encerclé le domicile de l’ayatollah réformateur Jalaleddin Taheri, rapporte Jaras. Les faits n’ont pu être vérifiés de source indépendante.
Ces incidents interviennent deux jours après les obsèques de Montazeri dans la ville sainte de Qom, auxquelles ont assisté des dizaines de milliers de personnes.
Des échauffourées entre forces de l’ordre et partisans de l’opposition avaient déjà éclaté, selon des sites internet.
Montazeri avait été l’un des artisans de la révolution islamique de 1979. Un temps choisi pour succéder au guide suprême Ruhollah Khomeini, il était tombé en disgrâce avant de devenir un détracteur du régime actuel.
“En dehors de son statut religieux, ce qui faisait la singularité de Montazeri, c’était son intégrité. Il aurait pu dans les années 1980 fermer les yeux sur les atteintes aux droits de l’homme et succéder ainsi à Khomeini. Il a choisi de finir sa vie en résidence surveillée”, note Karim Sadjadpour, du Carnegie Endowment for International Peace à Washington.